Interview : Moussa Fall, Directeur de l’Agence Nationale d’Appui et d’Insertion des Réfugiés à « Khabar Alyowm » :

"Les compétences et les ressources de l’ANAIR seront mises à contribution pour que cette grande œuvre de réparation initiée par le Président de la République soit aussi un méga-édifice de réconciliation nationale"

Le président de l’Assemblée Nationale Messaoud Ould Boulkheïr se dit confiant du succès de l’opération retour des réfugiés parce que « le Président de la République a désigné à la tête de l’ANAIR Moussa Fall une personnalité compétente unanimement respectée ». Ce dernier force l’estime et la considération de grosses pointures politiques de divers horizons. Même le doyen Mohamed Yehdhih Ould Breïdeleïl mentionne dans son bilan de l’an I de SIDIOCA cette « rare » nomination faîte dans le bon sens. Moussa Fall est à l’aise dans sa connaissance du dossier des réfugiés.

Et d’un point de vue strictement médiatique, Moussa Fall, en moins de trois mois, a bien fait pour mieux valoriser l’image du pays que toutes les structures communicationnelles du régime : on l’a vu, lu et écouté sur Al Arabiya TV, Al Jazeera, Nile TV, France 24, RFI, MBC, Walfadjri, Le Soleil, Africa Numéro 1, Alan TV, TV5, TVM… Sa rigueur et son enracinement politique lui seront utiles dans cette grande œuvre de réconciliation nationale initiée par le Président de la République. A l’occasion de notre bilan de la première année de l’arrivée au pouvoir de Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdellahi, il a accepté de répondre à nos questions.

K A : Quand on parle bilan du Président, on pense tout de suite au retour des réfugiés. D’abord, Monsieur le Directeur Général, c’est quoi l’Agence Nationale d’Appui et d’Insertion des Réfugiés (ANAIR) ?

Moussa Fall : L’Agence Nationale d’Appui et d’Insertion des Réfugiés (ANAIR) a été créée par décret le 02 janvier 2008. C’est une structure issue des résolutions des Journées Nationales de Concertation et de Sensibilisation tenues du 15 au 17 novembre 2008 autour des modalités de rapatriements des réfugiés mauritaniens. Elle a pour mission générale d’assurer l’insertion des réfugiés mauritaniens du Sénégal et du Mali, d’apporter l’appui aux administrations et aux commissions en charge de l’identification, du retour et de l’accueil des réfugiés et de contribuer au développement économique et social des zones concernées. A ce titre, l’ANAIR met en œuvre, en rapport avec les autorités administratives, le plan d’appui et d’insertion des réfugiés dans un cadre pacifié de consolidation de l’unité nationale et de franche cohabitation entre les différentes populations des zones d’accueil. L’ANAIR est donc l’instrument central de cette politique de rapatriement des Mauritaniens réfugiés au Sénégal et au Mali.

Les objectifs principaux de l’agence sont donc, en plus de l’accueil et de l’insertion des réfugiés, de réparer les préjudices qui ont été causés à des milliers de nos compatriotes à une période donnée.

Dans cette optique, l’Agence Nationale d’Appui et d’Insertion des Réfugiés va tout entreprendre pour garantir une bonne intégration des populations arrivantes dans un climat de coexistence harmonieuse entre les différents segments de notre peuple.

K A : Quels sont les programmes déjà réalisés par l’ANAIR ?

Moussa Fall : Nous avons un plan d’action général constitué de quatre composantes essentielles et complémentaires. D’abord, l’ANAIR a déjà mis en oeuvre le programme d’accueil et d’appui à la première installation. Il est destiné à répondre aux besoins immédiats des populations rapatriées dans le cadre de l’Accord Tripartite (Mauritanie, Sénégal, HCR). Ses procédures d’identification ont été établies à partir des besoins exprimés par les intéressés eux-mêmes au cours d’une mission d’évaluation ex ante de l’ANAIR dans les camps des réfugiés. Son contenu est la fourniture de deux vaches laitières, en moyenne, par famille. Les vaches sont choisies par les rapatriés eux-mêmes. En plus des produits alimentaires, des stocks de médicaments, du matériel de teintures pour les coopératives féminines et du financement d’activités génératrices de revenus..La deuxième composante du plan d’action général de l’ANAIR c’est donc le programme d’accueil renforcé. Il est destiné à apporter les premières corrections à la différence de traitement entre les rapatriés nouveaux venus et les populations d’accueil. Nous venons de terminer l’évaluation de ce programme avec l’Université américaine d’Arizona et sera soumis cette semaine à nos partenaires techniques et financiers. Son exécution nous permettra de mieux préparer le programme d’insertion durable qui constitue la troisième composante de notre plan d’action. Ce programme d’insertion durable consistera à réaliser des projets structurants et des équipements collectifs : aménagements hydro-agricoles, projets de désenclavement, construction des postes de santé et d’école, alimentation en eau potable, volet activités génératrices de revenu axées sur les métiers que connaissent les populations.

Bien plus, l’ANAIR a un programme plus ambitieux en terme de durabilité où toutes les compétences et les ressources de l’agence seront mises à contribution pour que cette grande œuvre de réparation initiée par le Président de la République Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdellahi soit aussi un méga-édifice de réconciliation nationale. Et pour que la greffe se fasse sans rejet, les catégories bénéficiaires ciblées par les programmes de l’ANAIR sont d’abord les nouveaux revenants mais aussi les réfugiés rentrés individuellement et spontanément à partir de 1996. La troisième catégorie ciblée est constituée des Moussafarines qui se sont installés sur les lieux des réfugiés. La quatrième grande catégorie visée est l’ensemble des populations des zones d’accueil. Donc plus concrètement, en plus des opérations spécifiques aux réfugiés, les projets de l’ANAIR et tout sera entamé dans une synergie fraternelle pour qu’il y ait une harmonisation des conditions d’existence.

K A : Tout à l’heure, vous avez évoqué vos partenaires américains, l’ANAIR a reçu la visite du ministre français des Affaires Etrangères Bernard Kouchner ; d’après nos sources les Allemands et les Européens sont enthousiastes pour vous financer, déjà aussi le Président Bongo du Gabon s’est manifesté généreusement, mais les Arabes brillent par leur absence. Pourquoi ce peu d’empressement de nos frères Arabes ?

Moussa Fall : Au dernier groupe consultatif sur la Mauritanie tenu à Paris, plusieurs pays et organismes arabes ont émis de bonnes intentions pour financer les opérations d’accueil et d’insertion de nos réfugiés au Sénégal et au Mali. Nous les relancerons le moment venu.

K A : Quel message voudriez-vous adresser aux réfugiés en ce 19 avril 2008 ?

Moussa Fall : Mon message à leur adresse est un message de fraternité et de concorde nationale. C’est aussi celui de tous les Mauritaniens. Avec leur retour, ils nous apportent le bien-être que confèrent la réparation des injustices, la réconciliation nationale et la paix des cœurs.

Au-delà des déclarations d’intention, nous ferons tout au niveau de l’ANAIR pour convaincre de notre volonté afin de bien accueillir et bien insérer nos frères rapatriés dans le tissu social de leur propre pays. Ils seront mis au courant et de façon transparente de tous les mécanismes d’accueil et d’insertion. Tous les efforts seront focalisés pour la réussite de la mission de l’Agence dans un esprit de sérénité et d’acceptation mutuelle.

K A : Le Président de la République a, contre vents et marées, tenu parole sur ce sujet précis. Ca été difficile, n’est-ce pas ?

Moussa Fall : Le Président Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdellahi est un homme droit et juste. Sa passion c’est de bien servir la Mauritanie en réglant tous ses problèmes. Et cette date du 19 Avril est pour moi l’occasion de lui rendre hommage ; lui qui a pris la décision historique et courageuse d’appeler le 29 juin 2007 nos compatriotes à rentrer dans leur pays. C’est aussi l’occasion de mentionner le rôle hautement positif du gouvernement de la République de tout entreprendre pour régler cette question. Avec le retour de nos compatriotes dans leur pays, l’œuvre de reconstruction de l’unité du pays commence. Il ne dépend que de nous, mauritaniens, de faire en sorte que ce processus soit irréversible tout en sachant qu’il nécessitera beaucoup d’engagements pour le conforter, pour surmonter les obstacles et vaincre les réticences.

Propos recueillis par Sidi Ali Ould Mohamed Mahmoud

Source: alyowm
(M)