
J’ai lu récemment un article publié par mon ami, Moulaye Dioum, dans le site avomm. Un article d’autant plus intéressant et généreux qu'il soulève ou s’articule méthodiquement autour de la problématique épineuse de l’identité singulière des populations négro-africaines de Mauritanie. Le mien, précisons-le d'entrée en jeu, est une simple contribution au débat et s'écarte alors de toute velléité d'ordre polémique. Effectivement, comme l'a fait observer mon ami, la Mauritanie moderne (au sens politique du terme) est encore et toujours confrontée à des contradictions majeures ; contradictions qui, du reste, se traduisent par le refus légendaire de reconnaissance des différences culturelles, mais encore et surtout par cette volonté politique de phagocyter des cultures des communautés nationales arbitrairement minorisées.
Mais parler d'identité singulière ou plurielle, c'est interroger, du coup, le concept et les fondements d'Etat-nation ou d'Etat national. Cette opération de la pensée conduit en général à cette bipolarité différentielle largement symbolisée par ce « eux et nous ». Par expérience, un Etat national se caractérise par le culte de l'homogénéité culturelle abstraite et la négation donc de toute hétérogénéité qui ne pourrait, théoriquement et politiquement, correspondre à sa vocation idéologique d'unification. Cependant, le cas de la Mauritanie n'est pas exceptionnel. Car le débat sur la justification et la légitimité des revendications identitaires s'enflamme partout où cohabitent des communautés
nationales différentes. La quête identitaire coïncide, en Afrique, avec la construction des Etats-nation, et par extension de la pensée souveraine postcoloniale portée par Achille Mbembé, entre autres historiens. Cette quête de l'identité noire vise avant tout une singularité de la culture de l'homme noir. Elle l'enferme dans cette singularité et cette nostalgie vive, et ce, pour résister à la dictature de la culture dite universelle ou dominante.
Mais attention. Méfions-nous du concept d'identité comme celui d'ailleurs de la race. L'identité et la race recouvrent des formes de construction politique et idéologique et servent le plus souvent des causes étroites.
Actuellement, les deux concepts ne constituent plus des catégories d'analyse pertinente dans les sciences humaines et sociales. Puisque l'identité n'est jamais quelque chose de stable et qu'elle change, évolue au fur et à mesure que les peuples se rencontrent par contingence. C'est dire que le parcours des peuples s'enrichit des imbrications sociales spontanées sur lesquelles ni les uns ni les autres n'exercent aucun pouvoir de contrôle. Ainsi a-t-on vu, par exemple, des Peul qui ne parlent plus leur langue et des non -Peul parler peul. Dans son livre intitulé « Histoire de la Mauritanie. Des origines à l'indépendance », Désiré-Vuillemin Geneviève nous en donne une belle illustration, avec justement les cavaliers Peul sous le commandement de Teguella. Pour la race, la même logique implacable s'applique. Ernest Renan (Qu'est-ce qu'une nation?) nous fait voir son caractère hautement instable. Ainsi pourrions-nous dire que la base classique (l'ethnologie, entre autres) sur laquelle repose la définition de la nation, s'effondrerait rapidement à partir du moment où on réalise que les mouvements démographiques s'entrecroisent continuellement en s'opérant dans le couple spatio-temporel.
La race et l'identité renvoient en définitive à des clôtures sociales, à une hiérarchisation des humanités. Or, l'histoire de l'humanité nous montre que les usages des deux concepts sont généralement pervers. En ce sens qu'ils sont à l'origine de toutes les dérives et de tous les totalitarismes.
Abdoulaye W.
Paris
WANE
Mais parler d'identité singulière ou plurielle, c'est interroger, du coup, le concept et les fondements d'Etat-nation ou d'Etat national. Cette opération de la pensée conduit en général à cette bipolarité différentielle largement symbolisée par ce « eux et nous ». Par expérience, un Etat national se caractérise par le culte de l'homogénéité culturelle abstraite et la négation donc de toute hétérogénéité qui ne pourrait, théoriquement et politiquement, correspondre à sa vocation idéologique d'unification. Cependant, le cas de la Mauritanie n'est pas exceptionnel. Car le débat sur la justification et la légitimité des revendications identitaires s'enflamme partout où cohabitent des communautés
nationales différentes. La quête identitaire coïncide, en Afrique, avec la construction des Etats-nation, et par extension de la pensée souveraine postcoloniale portée par Achille Mbembé, entre autres historiens. Cette quête de l'identité noire vise avant tout une singularité de la culture de l'homme noir. Elle l'enferme dans cette singularité et cette nostalgie vive, et ce, pour résister à la dictature de la culture dite universelle ou dominante.
Mais attention. Méfions-nous du concept d'identité comme celui d'ailleurs de la race. L'identité et la race recouvrent des formes de construction politique et idéologique et servent le plus souvent des causes étroites.
Actuellement, les deux concepts ne constituent plus des catégories d'analyse pertinente dans les sciences humaines et sociales. Puisque l'identité n'est jamais quelque chose de stable et qu'elle change, évolue au fur et à mesure que les peuples se rencontrent par contingence. C'est dire que le parcours des peuples s'enrichit des imbrications sociales spontanées sur lesquelles ni les uns ni les autres n'exercent aucun pouvoir de contrôle. Ainsi a-t-on vu, par exemple, des Peul qui ne parlent plus leur langue et des non -Peul parler peul. Dans son livre intitulé « Histoire de la Mauritanie. Des origines à l'indépendance », Désiré-Vuillemin Geneviève nous en donne une belle illustration, avec justement les cavaliers Peul sous le commandement de Teguella. Pour la race, la même logique implacable s'applique. Ernest Renan (Qu'est-ce qu'une nation?) nous fait voir son caractère hautement instable. Ainsi pourrions-nous dire que la base classique (l'ethnologie, entre autres) sur laquelle repose la définition de la nation, s'effondrerait rapidement à partir du moment où on réalise que les mouvements démographiques s'entrecroisent continuellement en s'opérant dans le couple spatio-temporel.
La race et l'identité renvoient en définitive à des clôtures sociales, à une hiérarchisation des humanités. Or, l'histoire de l'humanité nous montre que les usages des deux concepts sont généralement pervers. En ce sens qu'ils sont à l'origine de toutes les dérives et de tous les totalitarismes.
Abdoulaye W.
Paris
WANE