
La sous-région est-elle maudite ? Hier, le Libéria ; la Sierra Léone ravagés par la guerre civile, la Côte d’Ivoire qui s’est embrasée pendant près d’une décennie à cause du concept de « l’ivoirité » peine encore à réconcilier sa nation et à enterrer ses morts. Les Guinée (Conakry et Bissau) sont encore instables ; elles sortent difficilement de la nuit des dictatures. Elles sont en proie à des soubresauts postélectoraux et/ou sont confrontées à la mainmise des narcotrafiquants qui y ont pris leurs quartiers. Au Sénégal, la question casamançaise reste insoluble. Le Burkina Faso sort à peine des révoltes de sa soldatesque qui ont fait vaciller le pouvoir de Blaise Compaoré et chahuté ses institutions.
Aujourd’hui, c’est au tour de la Mauritanie, confrontée comme la plupart des pays de la sous région (Mali, Niger, Mauritanie, Sénégal) à Alqaida au Maghreb islamique (Aqmi). La Mauritanie où semble ressurgir les démons du racisme et de l’exclusion qui ont écrit les pages les plus sombres de cette jeune République, retourne dans la danse de l’instabilité politique grosse de toutes les implosions sociales.
Depuis quelques mois, en dépit des « avertissements réitérés », la Mauritanie s’enfonce dans la crise dite de l’enrôlement/identification » au registre de l’état-civil, soutiennent des associations de la société civile. Selon celles-ci, cette situation « résulte du refus obstiné du gouvernement, de prendre en compte les inquiétudes, maintes fois exprimées, parmi les partis et les organisations de la société civile sur le potentiel de discrimination dans le mode opératoire ». Pour les camarades de Boubacar Messaoud de S.O.S.- Esclaves, «nombre de citoyens ont été récusés sans raison valable par les commissions en charge de la vérification. D’autres sont soumis à des interrogatoires humiliants qui se lisent et s’interprètent comme une insidieuse volonté d’exclusion».
Renchérissant, les autres membres du regroupement de la société civile, notamment Conscience et résistance, l’Association Mauritanienne des Droits de l’Homme, que pilote Fatimata M’Baye et l’Association des Femmes chefs de Familles, dirigée par Aminetou Mint Ely, révèlent que nombreux sont les Mauritaniens qui « ont vu dans la composition même des commissions, une manière sournoise d’exercer le filtrage ». Pour eux, « de l’aveu même du ministre de l’Intérieur, l’opération n’a touché à ce jour, depuis cinq mois, qu’un peu plus de 100 000 personnes, soit en moyenne 13 par moughataa (circonscription) et par jour, sur toute l’étendue du territoire ». Alors, concluent-ils, « le chiffre justifie, à lui tout seul, l’arrêt immédiat du processus afin d’en dégager le bilan, avant une réévaluation consensuelle ».
Pour les membres de la société civile mauritanienne, des membres de l’opposition et des observateurs « au lieu de comprendre l’ampleur et la profondeur des appréhensions, de prendre les mesures nécessaires pour communiquer, expliquer, rassurer et changer ce qui doit l’être, au lieu de prendre acte des insuffisances techniques, le gouvernement s’obstine à éluder toute autocritique ». Et devant les protestations légitimes des citoyens négro-africains non arabophones, « principales cibles du zèle au « contrôle de mauritanité », les pouvoirs publics hésitent, tergiversent entre tentatives de médiation et abus de la contrainte, notamment à Kaédi et Maghama. Selon eux, « tous les témoignages attestent de multi-tirs, croisés à balles réelles, sur le jeune manifestant désarmé, Lamine Mangane ». D’autres personnes ont été gravement blessées suite à l’usage d’armes à feu, par les forces de l’ordre, le 27 septembre dernier, lors d’une marche du collectif « Touche pas à ma nationalité », renseignent-ils également.
Le complot de l’étranger
Pour le regroupement de la société civile mauritanienne et ses alliés, notamment de l’opposition, « depuis, les actes de violence qui ont occasionné des incendies de véhicules, des saccages et des pillages sur les biens privés et publics, les autorités procèdent à l’arrestation de plusieurs individus dans la capitale et s’efforcent de créditer, comme le commande le réflexe entretenu sous la dictature de Ould Taya, l’idée d’un complot exécuté par des étrangers ».
Sonnant l’alerte, les organisations de la société civile trouvent que graduellement, la Mauritanie est en train de « glisser vers la ligne de clivage ethnique, malgré l’expérience douloureuse de la fin des années 1980. Jusqu’ici, l’attitude dominante au sommet de l’Etat, se caractérise par l’improvisation, la permanence de l’impunité et le postulat du doute sur la nationalité du négro-africain de Mauritanie ». Une situation qui exige selon elles, « une action conjointe pour contribuer, vite, à protéger la citoyenneté et l’égalité des droits, seuls garants de l’unité et de la cohésion nationales ; un état-civil moderne, fiable et viable en naitra ».
La FIDH et l'AMDH profondément préoccupées
Dans une déclaration conjointe datée du 28 septembre dernier, la Fédération internationale des Droits de l’Homme (FIDH) et l’Association marocaine des Droits de l’Homme (AMDH) se disent profondément préoccupées par les affrontements en Mauritanie, opposant forces de l’ordre et manifestants civils. Des manifestions « qui ont causé la mort d'une personne, fait une dizaine de blessés et conduit à plusieurs cas d'arrestations et de détentions arbitraires », selon la déclaration conjointe.
Le FIDH ET L’AMDH appellent les autorités mauritaniennes « à prendre toutes les mesures nécessaires pour mettre un terme à ces violences, dans le plus strict respect du droit international des droits de l'Homme, et à procéder dans les plus brefs délais, à la libération des personnes encore détenues, si aucune charge n'est retenue à leur encontre ». Pour la FIDH et l’AMDH, (…) «la répression violente de manifestations pacifiques n'est pas la réponse que l'on peut attendre d'un État de droit. Les événements tragiques survenus à Kaédi et Maghama nous rappellent avec inquiétude que les autorités mauritaniennes outrepassent régulièrement leurs droits. Aujourd'hui, il ne suffit pas simplement de regretter publiquement le décès du jeune Lamine Mangan. Une enquête indépendante sur les circonstances exactes de sa mort doit être ouverte immédiatement».
Pour les organisations sœurs, « à plusieurs reprises, la Mauritanie a été rappelée à l'ordre par les mécanismes régionaux et internationaux de protection des droits de l'Homme pour la persistance de discriminations en tous genres à l'encontre des populations noires. Il est urgent de mettre un terme à ces pratiques d'un autre temps et d'engager notre pays sur la voie d'une démocratie pluraliste, égalitaire et respectueuse des différences qui existent entre ses citoyens ».
En attendant, les autorités mauritaniennes maintiennent leur recensement pour un fichier qualifié de « fichier de la honte ».
Source: SudOnline
Aujourd’hui, c’est au tour de la Mauritanie, confrontée comme la plupart des pays de la sous région (Mali, Niger, Mauritanie, Sénégal) à Alqaida au Maghreb islamique (Aqmi). La Mauritanie où semble ressurgir les démons du racisme et de l’exclusion qui ont écrit les pages les plus sombres de cette jeune République, retourne dans la danse de l’instabilité politique grosse de toutes les implosions sociales.
Depuis quelques mois, en dépit des « avertissements réitérés », la Mauritanie s’enfonce dans la crise dite de l’enrôlement/identification » au registre de l’état-civil, soutiennent des associations de la société civile. Selon celles-ci, cette situation « résulte du refus obstiné du gouvernement, de prendre en compte les inquiétudes, maintes fois exprimées, parmi les partis et les organisations de la société civile sur le potentiel de discrimination dans le mode opératoire ». Pour les camarades de Boubacar Messaoud de S.O.S.- Esclaves, «nombre de citoyens ont été récusés sans raison valable par les commissions en charge de la vérification. D’autres sont soumis à des interrogatoires humiliants qui se lisent et s’interprètent comme une insidieuse volonté d’exclusion».
Renchérissant, les autres membres du regroupement de la société civile, notamment Conscience et résistance, l’Association Mauritanienne des Droits de l’Homme, que pilote Fatimata M’Baye et l’Association des Femmes chefs de Familles, dirigée par Aminetou Mint Ely, révèlent que nombreux sont les Mauritaniens qui « ont vu dans la composition même des commissions, une manière sournoise d’exercer le filtrage ». Pour eux, « de l’aveu même du ministre de l’Intérieur, l’opération n’a touché à ce jour, depuis cinq mois, qu’un peu plus de 100 000 personnes, soit en moyenne 13 par moughataa (circonscription) et par jour, sur toute l’étendue du territoire ». Alors, concluent-ils, « le chiffre justifie, à lui tout seul, l’arrêt immédiat du processus afin d’en dégager le bilan, avant une réévaluation consensuelle ».
Pour les membres de la société civile mauritanienne, des membres de l’opposition et des observateurs « au lieu de comprendre l’ampleur et la profondeur des appréhensions, de prendre les mesures nécessaires pour communiquer, expliquer, rassurer et changer ce qui doit l’être, au lieu de prendre acte des insuffisances techniques, le gouvernement s’obstine à éluder toute autocritique ». Et devant les protestations légitimes des citoyens négro-africains non arabophones, « principales cibles du zèle au « contrôle de mauritanité », les pouvoirs publics hésitent, tergiversent entre tentatives de médiation et abus de la contrainte, notamment à Kaédi et Maghama. Selon eux, « tous les témoignages attestent de multi-tirs, croisés à balles réelles, sur le jeune manifestant désarmé, Lamine Mangane ». D’autres personnes ont été gravement blessées suite à l’usage d’armes à feu, par les forces de l’ordre, le 27 septembre dernier, lors d’une marche du collectif « Touche pas à ma nationalité », renseignent-ils également.
Le complot de l’étranger
Pour le regroupement de la société civile mauritanienne et ses alliés, notamment de l’opposition, « depuis, les actes de violence qui ont occasionné des incendies de véhicules, des saccages et des pillages sur les biens privés et publics, les autorités procèdent à l’arrestation de plusieurs individus dans la capitale et s’efforcent de créditer, comme le commande le réflexe entretenu sous la dictature de Ould Taya, l’idée d’un complot exécuté par des étrangers ».
Sonnant l’alerte, les organisations de la société civile trouvent que graduellement, la Mauritanie est en train de « glisser vers la ligne de clivage ethnique, malgré l’expérience douloureuse de la fin des années 1980. Jusqu’ici, l’attitude dominante au sommet de l’Etat, se caractérise par l’improvisation, la permanence de l’impunité et le postulat du doute sur la nationalité du négro-africain de Mauritanie ». Une situation qui exige selon elles, « une action conjointe pour contribuer, vite, à protéger la citoyenneté et l’égalité des droits, seuls garants de l’unité et de la cohésion nationales ; un état-civil moderne, fiable et viable en naitra ».
La FIDH et l'AMDH profondément préoccupées
Dans une déclaration conjointe datée du 28 septembre dernier, la Fédération internationale des Droits de l’Homme (FIDH) et l’Association marocaine des Droits de l’Homme (AMDH) se disent profondément préoccupées par les affrontements en Mauritanie, opposant forces de l’ordre et manifestants civils. Des manifestions « qui ont causé la mort d'une personne, fait une dizaine de blessés et conduit à plusieurs cas d'arrestations et de détentions arbitraires », selon la déclaration conjointe.
Le FIDH ET L’AMDH appellent les autorités mauritaniennes « à prendre toutes les mesures nécessaires pour mettre un terme à ces violences, dans le plus strict respect du droit international des droits de l'Homme, et à procéder dans les plus brefs délais, à la libération des personnes encore détenues, si aucune charge n'est retenue à leur encontre ». Pour la FIDH et l’AMDH, (…) «la répression violente de manifestations pacifiques n'est pas la réponse que l'on peut attendre d'un État de droit. Les événements tragiques survenus à Kaédi et Maghama nous rappellent avec inquiétude que les autorités mauritaniennes outrepassent régulièrement leurs droits. Aujourd'hui, il ne suffit pas simplement de regretter publiquement le décès du jeune Lamine Mangan. Une enquête indépendante sur les circonstances exactes de sa mort doit être ouverte immédiatement».
Pour les organisations sœurs, « à plusieurs reprises, la Mauritanie a été rappelée à l'ordre par les mécanismes régionaux et internationaux de protection des droits de l'Homme pour la persistance de discriminations en tous genres à l'encontre des populations noires. Il est urgent de mettre un terme à ces pratiques d'un autre temps et d'engager notre pays sur la voie d'une démocratie pluraliste, égalitaire et respectueuse des différences qui existent entre ses citoyens ».
En attendant, les autorités mauritaniennes maintiennent leur recensement pour un fichier qualifié de « fichier de la honte ».
Source: SudOnline