Murtodo Diop que nous recevons aujourd’hui est l’une des rares personnalités politiques mauritaniennes dont l’engagement pour les causes justes remonte à 1957, bien avant l’indépendance de notre pays.
Murtodo est le doyen de l’opposition mauritanienne par la longévité de son engagement, la constance de son combat, son honnêteté intellectuelle et son amour pour son pays. On ne peut pas résister à la tentation de savourer ses déclarations incendiaires contre le système injuste et barbare de Ould Taya ; rappelez-vous « Moor Maouya », « les esclaves de la peur » et j’en passe. Murtodo c’est aussi l’homme qui a donné toute sa vie pour l’égalité en générale et à celle des langues en particulier.
Issue d’une génération qui avait embrassé le marxisme, convaincue qu’il était l’instrument le plus fiable pour la libération des peuples, il fut donc, dés l’âge de 15 ans, membre du P.A.I. (Parti Africain de l’Indépendance) fondé en 1957 pour lutter contre la loi cadre, qui visait la balkanisation de l’Afrique. Ce parti préconisait déjà l’unité continentale et l’instauration du socialisme scientifique et la promotion des langues africaines. Il avait pour compagnons les Tijane Baidy, Amadou Malick Guaye, Silèye Dia et bien d’autres.
Il résume sa passion pour les langues en disant d’elles « Chaque langue exprime le génie de son peuple et pour nous pas de petite langue ou de grande langue, pas de langue de quantité et de langue de qualité. Toutes les langues se valent… »
Membre fondateur de DEKALEM (R.N.D.), il est aussi un grand poète engagé ; un grand poète militant. Qui a donné, avec d’autres, ces lettres de noblesse à la poésie halpoulaaren. Ses poèmes furent enregistrés et diffusés en Mauritanie, au Sénégal, en France et ailleurs. Sa poésie a fait le tour du monde. Cette poésie qui est, avant tout, une invite à la révolte contre l’oppression culturelle.
Toutes les associations pulaarophones le respectent et apprécient sa détermination à jeter les ponts entre elles. C’est ainsi, qu’il a travaillé à rapprocher le KAWTAL, l’Association des Halpoular d’Italie au Hoodere Pinal Pulaar des USA, ainsi que les autres structures pulaarophones (telles que l’Association des amis de Baba Maal, l’Association Amadou Hampâthé Bâ, l’Association Pulaar de Belgique), dans le sens d’une coopération avec la fédération mondiale de l’enseignement du Pulaar et du Fulfulde dont les principaux dirigeants se trouvent à Bordeaux. Il est aussi le Président de l'Association Internationale du Pulaar
Murtodo est aussi, un bon musulman, un homme pieux, qui pratique l’Islam, explique son sens et ses vertus dans sa propre langue maternelle. On lui doit la traduction du livre saint Le Coran en Pulaar. Il a aussi écrit en Pulaar plusieurs livres islamiques non édités faute de moyens. Projecteurs de l’AVOMM accueille pour vous le doyen Murtodo, l’homme qui a joué un rôle de premier plan dans la défense des droits de l’Homme dans notre pays. Le militant authentique, probe, droit que l’on aime aussi pour ses grandes qualités humaines et sa modestie. Que l’on aime tout simplement.
Med
Entretien:
AVOMM : Peut-on dire que les engagements pris par le CMJD et les espoirs qu’ils ont suscités au sein de la classe politique n’ont été que de beaux slogans qui s'accommodent mal avec la réalité Mauritanienne ?
MOURTOUDO : Le putsch prévisible disons inéluctable du 3 Août 2005 a soulevé au départ un grand espoir. Cet espoir s’est affaissé avec les déclarations imprudentes du colonel Ely dans J.A l’ intelligent où il s’ est présenté comme le protecteur du despote qu’ il a renversé , qu’ il amadoue au détriment des victimes et déportés noirs qui galèrent au Sénégal et au Mali, qu’ il ignore royalement.
Ely est étonnant, nous ne comprenons pas pourquoi il renverse Taya, il le finance, l’ invite à participer aux élections de 2007, alors qu’il refuse aux déportés mauritaniens qui vivent sur le bord du Sénégal de traverser le fleuve de rentrer chez eux, et de jouir de leurs droits spoliés depuis vingt ans.L’ espoir soulevé par le putsch du 3 Août n’est rien d’autre maintenant qu’un slogan qui ne cadre pas avec la réalité. L E COLONEL Ely était le bras droit du despote sanguinaire de Ould Taya . Nous comprenons pourquoi il tente d’acclimater une démocratie contrôlée pour ne pas dire un tropisme tropical. Il a imposé 3 commissions de réflexion, il a traçé lui-même un cadre de travail pour l’opposition mauritanienne interne, qui ne fait qu’avaliser ce que propose Ely , les travaux de ces commissions n'ont pas abordé le passif humanitaire. Jusqu’ ici l’opposition mauritanienne n’a jamais manifesté pour ces problèmes et d’autres sous un régime qui se dit démocratique .Cela signifie que cette opposition interne a encore peur. Cela veut dire qu’ il n’ y a pas encore de vraie démocratie en dépit de la création d’ une commission électorale indépendante.
AVOMM : Quel sens donner au contenu de ce changement où il n’est fait aucune allusion aux problèmes qui rongent le pays à savoir le passif humanitaire, retour des réfugiés… ?
MOURTOUDO : Ce changement, nous souhaitions dés le départ qu’il soit réel et non cosmétique.Le contenu qu’ on lui donne dépend du camp où on se situe , celui du pouvoir ou de l’ opposition .En tant que Doyen de l’ opposition mauritanienne, acteur et témoin de l’ histoire,je n’ ai jamais connu un putsch aussi confus ;il ne vise ni au changement de société ni au changement de la société.Son objectif est de protéger Taya, toute l’ équipe de Taya, y compris Ely et les membres de son CMJD.Le but du coup d’ état est de restaurer l’ entente tribale brisée par les assauts réitérés des vaillants Cavaliers du changements (Vie , Santé , Force ), de divertir l’ opinion nationale et internationale jusqu’ aux élections présidentielles de 2007 pour négocier une amnistie générale pour tous ceux qui avaient trempé dans le complot contre les Nègres.Donc ce putsch est illisible et ne soulève plus aucun espoir car Ely refuse d’ abord de reconnaître le passif humanitaire, disons la catastrophe humanitaire.C’ est cet héritage accablant de Ould Taya qu’ il cherche à masquer par un vernis démocratique et une illusion de justice alors que les bases de l’ ETAT raciste, tribaliste et assimilateur sont consolidées, les pouvoirs ne sont pas partagés par les différentes ethnies ; la composition de son CMJD et de son gouvernement l’ ont prouvé.C’ est un bluff démocratique .
AVOMM : Lors de la conférence de Presse de Mr Ely Ould Mohamed Vall, il a déclaré, en réponse à une question relative aux réfugiés mauritaniens : « Je n'occulte aucun problème national; chaque chose a son temps, c'est une lâcheté d'occulter un problème national. Nous sommes contre l'utilisation comme fonds de commerce de tel ou tel problème national; nos problèmes devront se régler ici entre mauritaniens ». Ne croyez-vous pas qu’il s’agit d’une reconnaissance de ces problèmes dont les modalités de règlement figurent sur l’agenda du CMJD et qu’il ne s’agit en réalité que d’une question de temps?
MOURTOUDO : Lors de la conférence de Ely , il s’ est montré nerveux, et le fait de dire que je n’ occulte aucun problème et que chaque chose en son temps, c’ est une preuve éloquente de sa part que l’ oppression des noirs mauritaniens est le cadet de ses soucis. C’est déjà trop de vivre 50ans, un demi siècle, dans l’oppression, la marginalisation, la négation.L’ ETAT mauritanien est raciste. C’est contre lui et non Ould Taya ou Ely qu’il faut se battre .Depuis un demi siècle, ce problème crucial qui affecte la majorité écrasante démographique mauritanienne n’ a jamais été réglé par les mauritaniens eux mêmes .Les Haalpulaar’en, les Haratines, les Sooninkés, les Wolofs , lesBambaras pris ensemble sont plus nombreux que nos frères arabo-berbéres mauritaniens que nous aimons, avec qui nous voulons vivre ensemble. Malheureusement cela n’ a jamais été la volonté de ceux qui ont dirigé l’ Etat mauritanien de Ould Daddah à Ely Ould Mohamed Vall, de régler ce problème par le dialogue et la concertation pour mieux consolider e leur unité sur une base de la justice et de l’ égalité .L’ ETAT mauritanien a toujours voulu imposé une race sur une autre , une langue sur d’ autres.Il clame son arabité , la renforce, au détriment de son africanité. L’ETAT mauritanien confond Islam et arabité. Sous prétexte que tous les mauritaniens sont musulmans, il tire la conclusion donc ils sont tous arabes. C’est l’une des erreurs grossières que l’ ETAT a amplifiée qui constitue le point d’ achoppement de la Mauritanie.L’ ETAT veut massifier , standardiser,c’ est à dire masquer la problématique des nationalités.Le problème de la question nationale se pose dans tous les ETATS du monde entier et plus particulièrement en Mauritanie. Le fait de parler de ces problèmes contrairement au colonel Ely ce n’ est pas du tout en faire de la surenchère, ni un fond de commerce , c’ est plus tôt cerné les problèmes réels dont leurs solutions adéquates faciliteraient notre développement dans l’ unité et la concorde.Pour nous , pas d’ unité nationale vraie sans la solution de la question nationale. La question nationale est le problème de toutes nos nationalités mauritaniennes. Elle n’ est pas seulement culturelle, elle est liée à la question sociale. C’ est en un mot régler le problème de la cohabitation de nos différentes races et de nos différentes nationalités sur des bases de la science politique en générale en tenant compte des particularités historiques , de la réalité mauritanienne. Cela suppose d’abord l’ analyse de la formation sociale mauritanienne c’ est à dire la connaissance et la prise en compte de l’ histoire de chaque ethnie de notre pays , un débat profond entre les ethnies sur les cinq formes politiques en choisir une pour régler définitivement les conflits liés à la cohabitation, c’est à dire :
1 – Les mauritaniens peuvent choisir vivre dans une république sans discrimination raciale, tribale, castale, linguistique ou autre qui respecte les droits légitime de tous ses habitants.Cette république là, n’ a jamais existé en Mauritanie depuis son indépendance, nous ne vivons que dans une république injuste de Moctar ould DADDAH à Ely ould Mohamed Vall.
2- A défaut de cette république dont nous avons parlée, nous devrons nous battre pour une autonomie régionale où décentralisation où les pouvoirs seront transférés aux régions qui s’ autogérent elles mêmes, tous les pouvoirs sauf la monnaie , les relations étrangères, et la défense.
3- Si l’ autonomie ou la décentralisation large n’ arrive pas à régler ces problèmes de cohabitation raciale linguistique ou religieuse comme en Irlande, on tente d’ instaurer une confédération, cette forme de règlement des conflits entre les nationalités n’ existe qu’ en Suisse depuis 1764 date de la création de la confédération Helvétique, il n’ y a pas de langue suisse. En suisse il n’ y a que des blancs mais divisés sur une base linguistique.Il y’ a des allemands des français et des italiens, donc trois ETAT , l’ ETAT français, l’ ETAT allemand, l’ ETAT italien ces trois ETATS ont formé la confédération helvétique dont la présidence est rotative .
4- La fédération : Partout dans le monde ou les conflits ethniques déstabilisent , engendrent des violences, la fédération peut être le quatrième moyen politique qui peut régler ces problèmes c’ est le cas de beaucoup de pays dont les USA , l’ INDE , le Mexique , l’ Allemagne, l’ AFRIQUE DU SUD , Le CAMEROUM entre les francophones et les anglophones, la Belgique ET LE Nigeria…Nous rappelons que la Mauritanie avant l’ indépendance avait vécu sous le régime de l’ AOF dont la capitale était Dakar, il y’ avait AEF( Afrique Equatoriale Française ) capitale Congo. La fédération ce n’ est pas la séparation. Elle se pratique dans un pays où il y’ a une volonté de vivre ensemble sans gommer les particularités culturelles, raciales ou religieuses des uns et des autres. Nous rappelons la fédération de Russie. Par ailleurs nous ne pouvons pas oublier l’ exemple du Québec, celui des corses, des catalans en Espagne…
5- La séparation : les peuples peuvent décider de vivre ensemble dans un cadre qui prend en compte leurs intérêts réciproques , c’ est pourquoi, même dans un ETAT fédéral, on doit inscrire dans la constitution le droit à la séparation au cas où un peuple quelconque ne trouve plus son compte dans cette fédération, c’ est pourquoi la séparation est l’ un des cinq moyens qui peut régler le problème des nationalités que nous avons abordé brièvement. Contrairement au colonel Ely ould Mohamed Vall qui est peut être un bon officier , un bon juriste mais malheureusement qui méconnaît ces problèmes , il ne peut pas s’ en soucier encore moins les résoudre. La Mauritanie n’ a pas encore le président qu’elle mérite, parce que tous masquent ces problèmes là. En parler ne signifie pas faire de l’ extrémisme, ni en faire un fond de commerce, mais c’ est la réalité que nous rappelons .Car comme le disait Lénine seule la vérité est révolutionnaire, or Ely et ses prédécesseurs l’ ont toujours masquée. C’est l’ Etat qui a divisé les mauritaniens , qui a semé le racisme, qui a marginalisé culturellement , économiquement, historiquement et diplomatiquement les noirs mauritaniens. C’est l’ Etat qui, pour briser la résistance a organisé les massacres des noirs de 1966 et de 1989-91, ce sont les fondements de cet Etat là, qu’ il faut briser. Ely ne fait que saupoudrer et non chambouler. IL se comporte en militaire compromis et non en chef d’état responsable qui reconnaît les problèmes et tente de les résoudre graduellement.
AVOMM : Que pouvez-vous nous dire sur le rôle que compte jouer le DEKALEM (R.N.D.) dans la transition en cours dans notre pays ?
MOURTOUDO : Depuis la création de DEKALEM en Juin 2001 à Nouakchott, notre objectif est de briser les tabous, les barrières psychologiques qui existent entre nos différentes races et nationalités. Nous avons décidé de les convier à une rencontre à un dialogue afin d’identifier leurs problèmes, et de les résoudre ensemble. C’ est pourquoi depuis ma présence en France je n’ai cessé de contacter tout le monde pour dialoguer objectivement et créer un cadre unitaire qui nous permet de faire face à tous les problèmes. Ce rôle que DEKALEM a accompli dans l’opposition mauritanienne en Europe est connu, nous voulons inciter au rassemblement constructif et non à la division destructive.Dekalem s’est déjà incrusté dans le paysage politique mauritanien. Nos militants participent à tous les débats et posent les vrais problèmes.
AVOMM : N’avez-vous pas songé, en tant que personnalité politique hautement connue et estimée par l’opposition mauritanienne, à retourner au pays, pour d’une part fédérer toutes les forces vives pour les élections législatives et pourquoi pas annoncer votre candidature à la Présidence ?
MOURTOUDO : Tout citoyen ou toute citoyenne conscient ou consciente de ses responsabilités et qui en dispose les moyens doit participer aux échéances électorales législatives et présidentielles .J’ ai d’ abord un problème majeur que je dois régler, c’est celui de ma santé.Le régime de Taya –Ely m’avait fait perdre l’ ouie pendant vingt ans. La communication ne s’effectuait que par écrits. Le traitement coûte très cher .C’ est grâce à l’appui de beaucoup de Haalpulaar’en du monde qu’une partie de ce traitement a été réglé .Depuis le 22 Novembre 2004, je commence à réentendre. J’attends d’abord compléter mes soins et terminer le suivi médical. « Ko cellal woni afo ngalu » la santé est la première des richesses. L’ETAT doit indemniser toutes les victimes comme moi et d’autres. D’autre part les élections nécessitent aussi une assise financière solide, dés que ces deux conditions seront réunies avec l’aide d’ Allah tout est possible dans la vie. Merci de m’avoir rappelé cela, car je n’ y pensais pas.
AVOMM : Aujourd’hui, tout le monde s’accorde à dire en public comme en privé que le colonel Ely Ould Mohamed Vall nous a sauvé (nous sommes toujours victimes de cette mentalité du sauveur qui nous colle à la peau) d’une situation catastrophique . Comment alors expliquer qu’aucun responsable du système Taya n’ait été inquiété ?
MOURTOUDO : Non , Ely ould Mohamed Vall a peur de reconnaître l’héritage de Taya parce que, lui-même, comme Directeur de la sûreté pendant 20 ans a trempé dans les sales besognes. La reconnaissance de ces problèmes le grandit et absout ses erreurs. C’est dés le premier jour qu’il fallait le faire pour sortir par la grande porte de l’histoire. Son hésitation a déçu la communauté nationale et internationale.
AVOMM : Avez-vous en projet de déposer une demande de reconnaissance du DEKALEM (R.N.D.), au Ministère de l'Intérieur ou avez-vous l’intention de laisser les espaces de libertés aux mains des nostalgiques de Maaouya-la-betise, et autres filières mafieuses. Qu'en dites-vous ?
MOURTOUDO : Dans le cours et moyen terme nous pensons déposer un dossier pour la reconnaissance de DEKALEM. Dekalem s’opposera par tous ses moyens à la MAOUYAFOLIE, à la MAOUYAFELONIE représentées par le PRDS. C’est un vampire détruit dont il faut enlever les racines.Le PRDS p. parti r. riiwoobé d . Dorjoobé s. sokoobé (c’est à dire le parti de ceux qui déportent, ceux qui tronçonnent, ceux qui emprisonnent) est le poison de notre peuple qu’il faut extirper partout.
AVOMM : On assiste ces jours-ci à une agitation ambiante au sein du parti de la gamelle (PRDS) qui semble s’organiser pour investir les espaces de liberté afin de terminer son travail de pillage des ressources du pays. Que suggérez-vous à l’opposition pour barrer le chemin à cette mafia organisée ?
MOURTOUDO : Toute action engendre une réaction. C’ est la loi de la dialectique ; les sbires de Ould Taya qui ont vécu gracieusement sur le dos du peuple ne peuvent que réagir contre ce changement chimérique qui fait perdre à leur tribu la position de domination et de sangsue. La mafia du PRDS doit être neutralisée et dévirilisée par une jonction de l’opposition intérieure et extérieure.
AVOMM : Le 05 Octobre 2005, a vu la naissance à Nouakchott d’une Coalition de sept partis de l’ex-opposition à l’ancien régime de Ould Taya dénommée le Bloc des Partis pour le Changement (BPC), que pensez-vous de cette démarche qui vise à unir des partis autour d’une plate forme d’action ?
MOURTOUDO : Les partis de l’intérieur et de France ont toujours tenté de mettre en place une coalition. Le plus souvent ils ont buté sur les querelles de personnes ou de programmes .Avoir une plate forme est une nécessité qui tonifie nos actions. C’ est pourquoi, il faut inciter à un dialogue serein entre nos nationalités nos races, nos formations politiques et autres sur les différents problèmes que nous rencontrons et tenter de les résoudre ensemble. Aucun problème ne doit être un tabou.C’ est à ce prix que nous pourrons sauver notre pays menacé par diverses forces centrifuges et par la cécité politique de nos dirigeants.
AVOMM : L’AVOMM est déterminée à faire aboutir la plainte contre Taya introduite devant la justice Belge, que vous inspire cette démarche ?
MOURTOUDO : La réactivation de la plainte contre Taya et ceux qui s’efforcent de le protéger est une œuvre de salubrité publique .Nous devons accélérer cette procédure et exiger l’extradition de Taya.
AVOMM : Quels conseils serez-vous tenté de donner à l’opposition invitée à la concertation sur la transition actuelle ?
MOURTOUDO : Le conseil que je donne à toute opposition de l’ intérieure et de l’ extérieur, est de faire son bilan ,son autocritique , de reconnaître aussi son erreur , et de repartir sur une base nouvelle après lecture correcte des réalités mauritaniennes dans un contexte général de mondialisation. L'approfondissement de la formation sociale mauritanienne , la particularité historique de notre question nationale , la volonté de la résoudre nous permettrait de panser les plaies, de nous réconcilier avec nous-mêmes et de faire face aux défis du futur .Il est indigne d’ être, au 21eme siècle, retardé par les survivances de l’ esclavages, du tribalisme , des castes, et une mentalité ségrégationniste.Nous devons reconnaître nos spécificités culturelles , raciales et les assumer et éviter l’ hégémonie d’ une race , d’ une nationalité quelconque sur une autre. Seule l’ unité et le dialogue fécond entre les opposants et nos masses peuvent nous aider à réaliser nos desseins.
L’avènement d’une société nouvelle que nous voulons passe d’ abord par le retour et l’indemnisation de tous les déportés, la restitutions de leurs biens spoliés et leur participation au processus démocratique qui lui-même ne peut servir efficacement le peuple sans l’introduction des langues nationales dans le système éducatif mauritanien pour favoriser une symbiose culturelle facteur de paix, d’égalité, de concorde, de fraternité, de liberté et de progrès.
AVOMM : Merci Doyen d'avoir répondu à nos questions.
MOURTOUDO : Merci DOGUI, je connais votre probité intellectuelle, votre résistance farouche contre toutes les formes d’ injustice qui éclaboussent notre pays .Avec des compatriotes de votre trempe , nous pourrons reconstruire une autre Mauritanie débarrassée des tares qui la ternissent , merci à Adama et au site avomm.com.
Propos recueillis par Mohamed Dogui et Adama Sarr
Novembre 2005
Murtodo est le doyen de l’opposition mauritanienne par la longévité de son engagement, la constance de son combat, son honnêteté intellectuelle et son amour pour son pays. On ne peut pas résister à la tentation de savourer ses déclarations incendiaires contre le système injuste et barbare de Ould Taya ; rappelez-vous « Moor Maouya », « les esclaves de la peur » et j’en passe. Murtodo c’est aussi l’homme qui a donné toute sa vie pour l’égalité en générale et à celle des langues en particulier.
Issue d’une génération qui avait embrassé le marxisme, convaincue qu’il était l’instrument le plus fiable pour la libération des peuples, il fut donc, dés l’âge de 15 ans, membre du P.A.I. (Parti Africain de l’Indépendance) fondé en 1957 pour lutter contre la loi cadre, qui visait la balkanisation de l’Afrique. Ce parti préconisait déjà l’unité continentale et l’instauration du socialisme scientifique et la promotion des langues africaines. Il avait pour compagnons les Tijane Baidy, Amadou Malick Guaye, Silèye Dia et bien d’autres.
Il résume sa passion pour les langues en disant d’elles « Chaque langue exprime le génie de son peuple et pour nous pas de petite langue ou de grande langue, pas de langue de quantité et de langue de qualité. Toutes les langues se valent… »
Membre fondateur de DEKALEM (R.N.D.), il est aussi un grand poète engagé ; un grand poète militant. Qui a donné, avec d’autres, ces lettres de noblesse à la poésie halpoulaaren. Ses poèmes furent enregistrés et diffusés en Mauritanie, au Sénégal, en France et ailleurs. Sa poésie a fait le tour du monde. Cette poésie qui est, avant tout, une invite à la révolte contre l’oppression culturelle.
Toutes les associations pulaarophones le respectent et apprécient sa détermination à jeter les ponts entre elles. C’est ainsi, qu’il a travaillé à rapprocher le KAWTAL, l’Association des Halpoular d’Italie au Hoodere Pinal Pulaar des USA, ainsi que les autres structures pulaarophones (telles que l’Association des amis de Baba Maal, l’Association Amadou Hampâthé Bâ, l’Association Pulaar de Belgique), dans le sens d’une coopération avec la fédération mondiale de l’enseignement du Pulaar et du Fulfulde dont les principaux dirigeants se trouvent à Bordeaux. Il est aussi le Président de l'Association Internationale du Pulaar
Murtodo est aussi, un bon musulman, un homme pieux, qui pratique l’Islam, explique son sens et ses vertus dans sa propre langue maternelle. On lui doit la traduction du livre saint Le Coran en Pulaar. Il a aussi écrit en Pulaar plusieurs livres islamiques non édités faute de moyens. Projecteurs de l’AVOMM accueille pour vous le doyen Murtodo, l’homme qui a joué un rôle de premier plan dans la défense des droits de l’Homme dans notre pays. Le militant authentique, probe, droit que l’on aime aussi pour ses grandes qualités humaines et sa modestie. Que l’on aime tout simplement.
Med
Entretien:
AVOMM : Peut-on dire que les engagements pris par le CMJD et les espoirs qu’ils ont suscités au sein de la classe politique n’ont été que de beaux slogans qui s'accommodent mal avec la réalité Mauritanienne ?
MOURTOUDO : Le putsch prévisible disons inéluctable du 3 Août 2005 a soulevé au départ un grand espoir. Cet espoir s’est affaissé avec les déclarations imprudentes du colonel Ely dans J.A l’ intelligent où il s’ est présenté comme le protecteur du despote qu’ il a renversé , qu’ il amadoue au détriment des victimes et déportés noirs qui galèrent au Sénégal et au Mali, qu’ il ignore royalement.
Ely est étonnant, nous ne comprenons pas pourquoi il renverse Taya, il le finance, l’ invite à participer aux élections de 2007, alors qu’il refuse aux déportés mauritaniens qui vivent sur le bord du Sénégal de traverser le fleuve de rentrer chez eux, et de jouir de leurs droits spoliés depuis vingt ans.L’ espoir soulevé par le putsch du 3 Août n’est rien d’autre maintenant qu’un slogan qui ne cadre pas avec la réalité. L E COLONEL Ely était le bras droit du despote sanguinaire de Ould Taya . Nous comprenons pourquoi il tente d’acclimater une démocratie contrôlée pour ne pas dire un tropisme tropical. Il a imposé 3 commissions de réflexion, il a traçé lui-même un cadre de travail pour l’opposition mauritanienne interne, qui ne fait qu’avaliser ce que propose Ely , les travaux de ces commissions n'ont pas abordé le passif humanitaire. Jusqu’ ici l’opposition mauritanienne n’a jamais manifesté pour ces problèmes et d’autres sous un régime qui se dit démocratique .Cela signifie que cette opposition interne a encore peur. Cela veut dire qu’ il n’ y a pas encore de vraie démocratie en dépit de la création d’ une commission électorale indépendante.
AVOMM : Quel sens donner au contenu de ce changement où il n’est fait aucune allusion aux problèmes qui rongent le pays à savoir le passif humanitaire, retour des réfugiés… ?
MOURTOUDO : Ce changement, nous souhaitions dés le départ qu’il soit réel et non cosmétique.Le contenu qu’ on lui donne dépend du camp où on se situe , celui du pouvoir ou de l’ opposition .En tant que Doyen de l’ opposition mauritanienne, acteur et témoin de l’ histoire,je n’ ai jamais connu un putsch aussi confus ;il ne vise ni au changement de société ni au changement de la société.Son objectif est de protéger Taya, toute l’ équipe de Taya, y compris Ely et les membres de son CMJD.Le but du coup d’ état est de restaurer l’ entente tribale brisée par les assauts réitérés des vaillants Cavaliers du changements (Vie , Santé , Force ), de divertir l’ opinion nationale et internationale jusqu’ aux élections présidentielles de 2007 pour négocier une amnistie générale pour tous ceux qui avaient trempé dans le complot contre les Nègres.Donc ce putsch est illisible et ne soulève plus aucun espoir car Ely refuse d’ abord de reconnaître le passif humanitaire, disons la catastrophe humanitaire.C’ est cet héritage accablant de Ould Taya qu’ il cherche à masquer par un vernis démocratique et une illusion de justice alors que les bases de l’ ETAT raciste, tribaliste et assimilateur sont consolidées, les pouvoirs ne sont pas partagés par les différentes ethnies ; la composition de son CMJD et de son gouvernement l’ ont prouvé.C’ est un bluff démocratique .
AVOMM : Lors de la conférence de Presse de Mr Ely Ould Mohamed Vall, il a déclaré, en réponse à une question relative aux réfugiés mauritaniens : « Je n'occulte aucun problème national; chaque chose a son temps, c'est une lâcheté d'occulter un problème national. Nous sommes contre l'utilisation comme fonds de commerce de tel ou tel problème national; nos problèmes devront se régler ici entre mauritaniens ». Ne croyez-vous pas qu’il s’agit d’une reconnaissance de ces problèmes dont les modalités de règlement figurent sur l’agenda du CMJD et qu’il ne s’agit en réalité que d’une question de temps?
MOURTOUDO : Lors de la conférence de Ely , il s’ est montré nerveux, et le fait de dire que je n’ occulte aucun problème et que chaque chose en son temps, c’ est une preuve éloquente de sa part que l’ oppression des noirs mauritaniens est le cadet de ses soucis. C’est déjà trop de vivre 50ans, un demi siècle, dans l’oppression, la marginalisation, la négation.L’ ETAT mauritanien est raciste. C’est contre lui et non Ould Taya ou Ely qu’il faut se battre .Depuis un demi siècle, ce problème crucial qui affecte la majorité écrasante démographique mauritanienne n’ a jamais été réglé par les mauritaniens eux mêmes .Les Haalpulaar’en, les Haratines, les Sooninkés, les Wolofs , lesBambaras pris ensemble sont plus nombreux que nos frères arabo-berbéres mauritaniens que nous aimons, avec qui nous voulons vivre ensemble. Malheureusement cela n’ a jamais été la volonté de ceux qui ont dirigé l’ Etat mauritanien de Ould Daddah à Ely Ould Mohamed Vall, de régler ce problème par le dialogue et la concertation pour mieux consolider e leur unité sur une base de la justice et de l’ égalité .L’ ETAT mauritanien a toujours voulu imposé une race sur une autre , une langue sur d’ autres.Il clame son arabité , la renforce, au détriment de son africanité. L’ETAT mauritanien confond Islam et arabité. Sous prétexte que tous les mauritaniens sont musulmans, il tire la conclusion donc ils sont tous arabes. C’est l’une des erreurs grossières que l’ ETAT a amplifiée qui constitue le point d’ achoppement de la Mauritanie.L’ ETAT veut massifier , standardiser,c’ est à dire masquer la problématique des nationalités.Le problème de la question nationale se pose dans tous les ETATS du monde entier et plus particulièrement en Mauritanie. Le fait de parler de ces problèmes contrairement au colonel Ely ce n’ est pas du tout en faire de la surenchère, ni un fond de commerce , c’ est plus tôt cerné les problèmes réels dont leurs solutions adéquates faciliteraient notre développement dans l’ unité et la concorde.Pour nous , pas d’ unité nationale vraie sans la solution de la question nationale. La question nationale est le problème de toutes nos nationalités mauritaniennes. Elle n’ est pas seulement culturelle, elle est liée à la question sociale. C’ est en un mot régler le problème de la cohabitation de nos différentes races et de nos différentes nationalités sur des bases de la science politique en générale en tenant compte des particularités historiques , de la réalité mauritanienne. Cela suppose d’abord l’ analyse de la formation sociale mauritanienne c’ est à dire la connaissance et la prise en compte de l’ histoire de chaque ethnie de notre pays , un débat profond entre les ethnies sur les cinq formes politiques en choisir une pour régler définitivement les conflits liés à la cohabitation, c’est à dire :
1 – Les mauritaniens peuvent choisir vivre dans une république sans discrimination raciale, tribale, castale, linguistique ou autre qui respecte les droits légitime de tous ses habitants.Cette république là, n’ a jamais existé en Mauritanie depuis son indépendance, nous ne vivons que dans une république injuste de Moctar ould DADDAH à Ely ould Mohamed Vall.
2- A défaut de cette république dont nous avons parlée, nous devrons nous battre pour une autonomie régionale où décentralisation où les pouvoirs seront transférés aux régions qui s’ autogérent elles mêmes, tous les pouvoirs sauf la monnaie , les relations étrangères, et la défense.
3- Si l’ autonomie ou la décentralisation large n’ arrive pas à régler ces problèmes de cohabitation raciale linguistique ou religieuse comme en Irlande, on tente d’ instaurer une confédération, cette forme de règlement des conflits entre les nationalités n’ existe qu’ en Suisse depuis 1764 date de la création de la confédération Helvétique, il n’ y a pas de langue suisse. En suisse il n’ y a que des blancs mais divisés sur une base linguistique.Il y’ a des allemands des français et des italiens, donc trois ETAT , l’ ETAT français, l’ ETAT allemand, l’ ETAT italien ces trois ETATS ont formé la confédération helvétique dont la présidence est rotative .
4- La fédération : Partout dans le monde ou les conflits ethniques déstabilisent , engendrent des violences, la fédération peut être le quatrième moyen politique qui peut régler ces problèmes c’ est le cas de beaucoup de pays dont les USA , l’ INDE , le Mexique , l’ Allemagne, l’ AFRIQUE DU SUD , Le CAMEROUM entre les francophones et les anglophones, la Belgique ET LE Nigeria…Nous rappelons que la Mauritanie avant l’ indépendance avait vécu sous le régime de l’ AOF dont la capitale était Dakar, il y’ avait AEF( Afrique Equatoriale Française ) capitale Congo. La fédération ce n’ est pas la séparation. Elle se pratique dans un pays où il y’ a une volonté de vivre ensemble sans gommer les particularités culturelles, raciales ou religieuses des uns et des autres. Nous rappelons la fédération de Russie. Par ailleurs nous ne pouvons pas oublier l’ exemple du Québec, celui des corses, des catalans en Espagne…
5- La séparation : les peuples peuvent décider de vivre ensemble dans un cadre qui prend en compte leurs intérêts réciproques , c’ est pourquoi, même dans un ETAT fédéral, on doit inscrire dans la constitution le droit à la séparation au cas où un peuple quelconque ne trouve plus son compte dans cette fédération, c’ est pourquoi la séparation est l’ un des cinq moyens qui peut régler le problème des nationalités que nous avons abordé brièvement. Contrairement au colonel Ely ould Mohamed Vall qui est peut être un bon officier , un bon juriste mais malheureusement qui méconnaît ces problèmes , il ne peut pas s’ en soucier encore moins les résoudre. La Mauritanie n’ a pas encore le président qu’elle mérite, parce que tous masquent ces problèmes là. En parler ne signifie pas faire de l’ extrémisme, ni en faire un fond de commerce, mais c’ est la réalité que nous rappelons .Car comme le disait Lénine seule la vérité est révolutionnaire, or Ely et ses prédécesseurs l’ ont toujours masquée. C’est l’ Etat qui a divisé les mauritaniens , qui a semé le racisme, qui a marginalisé culturellement , économiquement, historiquement et diplomatiquement les noirs mauritaniens. C’est l’ Etat qui, pour briser la résistance a organisé les massacres des noirs de 1966 et de 1989-91, ce sont les fondements de cet Etat là, qu’ il faut briser. Ely ne fait que saupoudrer et non chambouler. IL se comporte en militaire compromis et non en chef d’état responsable qui reconnaît les problèmes et tente de les résoudre graduellement.
AVOMM : Que pouvez-vous nous dire sur le rôle que compte jouer le DEKALEM (R.N.D.) dans la transition en cours dans notre pays ?
MOURTOUDO : Depuis la création de DEKALEM en Juin 2001 à Nouakchott, notre objectif est de briser les tabous, les barrières psychologiques qui existent entre nos différentes races et nationalités. Nous avons décidé de les convier à une rencontre à un dialogue afin d’identifier leurs problèmes, et de les résoudre ensemble. C’ est pourquoi depuis ma présence en France je n’ai cessé de contacter tout le monde pour dialoguer objectivement et créer un cadre unitaire qui nous permet de faire face à tous les problèmes. Ce rôle que DEKALEM a accompli dans l’opposition mauritanienne en Europe est connu, nous voulons inciter au rassemblement constructif et non à la division destructive.Dekalem s’est déjà incrusté dans le paysage politique mauritanien. Nos militants participent à tous les débats et posent les vrais problèmes.
AVOMM : N’avez-vous pas songé, en tant que personnalité politique hautement connue et estimée par l’opposition mauritanienne, à retourner au pays, pour d’une part fédérer toutes les forces vives pour les élections législatives et pourquoi pas annoncer votre candidature à la Présidence ?
MOURTOUDO : Tout citoyen ou toute citoyenne conscient ou consciente de ses responsabilités et qui en dispose les moyens doit participer aux échéances électorales législatives et présidentielles .J’ ai d’ abord un problème majeur que je dois régler, c’est celui de ma santé.Le régime de Taya –Ely m’avait fait perdre l’ ouie pendant vingt ans. La communication ne s’effectuait que par écrits. Le traitement coûte très cher .C’ est grâce à l’appui de beaucoup de Haalpulaar’en du monde qu’une partie de ce traitement a été réglé .Depuis le 22 Novembre 2004, je commence à réentendre. J’attends d’abord compléter mes soins et terminer le suivi médical. « Ko cellal woni afo ngalu » la santé est la première des richesses. L’ETAT doit indemniser toutes les victimes comme moi et d’autres. D’autre part les élections nécessitent aussi une assise financière solide, dés que ces deux conditions seront réunies avec l’aide d’ Allah tout est possible dans la vie. Merci de m’avoir rappelé cela, car je n’ y pensais pas.
AVOMM : Aujourd’hui, tout le monde s’accorde à dire en public comme en privé que le colonel Ely Ould Mohamed Vall nous a sauvé (nous sommes toujours victimes de cette mentalité du sauveur qui nous colle à la peau) d’une situation catastrophique . Comment alors expliquer qu’aucun responsable du système Taya n’ait été inquiété ?
MOURTOUDO : Non , Ely ould Mohamed Vall a peur de reconnaître l’héritage de Taya parce que, lui-même, comme Directeur de la sûreté pendant 20 ans a trempé dans les sales besognes. La reconnaissance de ces problèmes le grandit et absout ses erreurs. C’est dés le premier jour qu’il fallait le faire pour sortir par la grande porte de l’histoire. Son hésitation a déçu la communauté nationale et internationale.
AVOMM : Avez-vous en projet de déposer une demande de reconnaissance du DEKALEM (R.N.D.), au Ministère de l'Intérieur ou avez-vous l’intention de laisser les espaces de libertés aux mains des nostalgiques de Maaouya-la-betise, et autres filières mafieuses. Qu'en dites-vous ?
MOURTOUDO : Dans le cours et moyen terme nous pensons déposer un dossier pour la reconnaissance de DEKALEM. Dekalem s’opposera par tous ses moyens à la MAOUYAFOLIE, à la MAOUYAFELONIE représentées par le PRDS. C’est un vampire détruit dont il faut enlever les racines.Le PRDS p. parti r. riiwoobé d . Dorjoobé s. sokoobé (c’est à dire le parti de ceux qui déportent, ceux qui tronçonnent, ceux qui emprisonnent) est le poison de notre peuple qu’il faut extirper partout.
AVOMM : On assiste ces jours-ci à une agitation ambiante au sein du parti de la gamelle (PRDS) qui semble s’organiser pour investir les espaces de liberté afin de terminer son travail de pillage des ressources du pays. Que suggérez-vous à l’opposition pour barrer le chemin à cette mafia organisée ?
MOURTOUDO : Toute action engendre une réaction. C’ est la loi de la dialectique ; les sbires de Ould Taya qui ont vécu gracieusement sur le dos du peuple ne peuvent que réagir contre ce changement chimérique qui fait perdre à leur tribu la position de domination et de sangsue. La mafia du PRDS doit être neutralisée et dévirilisée par une jonction de l’opposition intérieure et extérieure.
AVOMM : Le 05 Octobre 2005, a vu la naissance à Nouakchott d’une Coalition de sept partis de l’ex-opposition à l’ancien régime de Ould Taya dénommée le Bloc des Partis pour le Changement (BPC), que pensez-vous de cette démarche qui vise à unir des partis autour d’une plate forme d’action ?
MOURTOUDO : Les partis de l’intérieur et de France ont toujours tenté de mettre en place une coalition. Le plus souvent ils ont buté sur les querelles de personnes ou de programmes .Avoir une plate forme est une nécessité qui tonifie nos actions. C’ est pourquoi, il faut inciter à un dialogue serein entre nos nationalités nos races, nos formations politiques et autres sur les différents problèmes que nous rencontrons et tenter de les résoudre ensemble. Aucun problème ne doit être un tabou.C’ est à ce prix que nous pourrons sauver notre pays menacé par diverses forces centrifuges et par la cécité politique de nos dirigeants.
AVOMM : L’AVOMM est déterminée à faire aboutir la plainte contre Taya introduite devant la justice Belge, que vous inspire cette démarche ?
MOURTOUDO : La réactivation de la plainte contre Taya et ceux qui s’efforcent de le protéger est une œuvre de salubrité publique .Nous devons accélérer cette procédure et exiger l’extradition de Taya.
AVOMM : Quels conseils serez-vous tenté de donner à l’opposition invitée à la concertation sur la transition actuelle ?
MOURTOUDO : Le conseil que je donne à toute opposition de l’ intérieure et de l’ extérieur, est de faire son bilan ,son autocritique , de reconnaître aussi son erreur , et de repartir sur une base nouvelle après lecture correcte des réalités mauritaniennes dans un contexte général de mondialisation. L'approfondissement de la formation sociale mauritanienne , la particularité historique de notre question nationale , la volonté de la résoudre nous permettrait de panser les plaies, de nous réconcilier avec nous-mêmes et de faire face aux défis du futur .Il est indigne d’ être, au 21eme siècle, retardé par les survivances de l’ esclavages, du tribalisme , des castes, et une mentalité ségrégationniste.Nous devons reconnaître nos spécificités culturelles , raciales et les assumer et éviter l’ hégémonie d’ une race , d’ une nationalité quelconque sur une autre. Seule l’ unité et le dialogue fécond entre les opposants et nos masses peuvent nous aider à réaliser nos desseins.
L’avènement d’une société nouvelle que nous voulons passe d’ abord par le retour et l’indemnisation de tous les déportés, la restitutions de leurs biens spoliés et leur participation au processus démocratique qui lui-même ne peut servir efficacement le peuple sans l’introduction des langues nationales dans le système éducatif mauritanien pour favoriser une symbiose culturelle facteur de paix, d’égalité, de concorde, de fraternité, de liberté et de progrès.
AVOMM : Merci Doyen d'avoir répondu à nos questions.
MOURTOUDO : Merci DOGUI, je connais votre probité intellectuelle, votre résistance farouche contre toutes les formes d’ injustice qui éclaboussent notre pays .Avec des compatriotes de votre trempe , nous pourrons reconstruire une autre Mauritanie débarrassée des tares qui la ternissent , merci à Adama et au site avomm.com.
Propos recueillis par Mohamed Dogui et Adama Sarr
Novembre 2005