7.000km de route, quatre frontières traversées et près de 200 tonnes de matériel médical et éducatif distribuées: partie de Nantes le 21mars, l'opération humanitaire des «Camions du partage» composée d'une majorité de Bretons, a atteint Bamako le 2avril.
Slalomant entre des charrettes et des 404 Peugeot fatiguées, Michel Lamboley se fraye un chemin dans les rues de Nouakchott, la capitale mauritanienne. Le soleil tape déjà dur et son camion de vingt ans d'âge tressaute à chaque passage de vitesse: «Il est aussi têtu qu'un âne!», gronde le transporteur routier à Hennebont (Morbihan) en frappant le volant.
Au bord de la route, les locaux font les yeux ronds en voyant défiler l'impressionnant convoi des «Camions du partage». 28 véhicules le composent, dont neuf semi-remorques chargées de près de 200tonnes de matériel médical et éducatif à destination du Maroc, de la Mauritanie et du Mali.
Quelque 60 bénévoles sont engagés dans cette opération initiée par Cap Sud Organisation, une association morbihannaise spécialisée dans l'organisation de raids, et l'organisation non gouvernementale Hôpital Assistance International.
Majoritairement bretonne, cette horde mécanique réunit des profils hétéroclites. Transporteurs routiers actifs ou à la retraite, médecins, chefs d'entreprise ou fans des raids en 4×4 qui, tous, ont quitté femmes et entreprises le 21mars dernier, jour du départ de Nantes.
Immobilisés à Tanger
«C'est l'occasion de voir du pays, de se faire une virée entre copains et tout cela pour une bonne cause», résume Michel, 53 ans. Pas le temps d'en dire plus. Il faut avancer. Toujours à la traîne, accompagné de Matthias le mécanicien, les deux compères ferment le convoi avec leur camion d'assistance. Charge à eux de pallier les pannes mécaniques ou d'essence dont souffriraient les autres véhicules.
À Nouakchott, le cortège bigarré qui a parcouru 4.000km accuse déjà une journée de retard sur le programme. La chaleur et le sable qui font souffrir la mécanique ne sont pourtant pas en cause. Les responsables? Les douaniers marocains, étrangement tatillons, qui ont bloqué pendant 48heures le convoi sur le port de Tanger.
L'arrivée en Afrique ne se pouvait plus caricaturale... Un moment d'attente qui rappelle aux briscards de la route le passage des frontières avant la création de l'espace Schengen. Ils en seraient presque nostalgiques.
Bivouac en plein désert
Chaque jour les camions du partage avalent entre 400 et 700km de bitume. Les livraisons régulières de matériel ponctuent le trajet. Et les paysages grandioses traversés font patienter jusqu'au soir, où la communauté se retrouve pour bivouaquer, le plus souvent en plein désert. Pour nourrir tous ces affamés, l'organisation n'a pas lésiné sur les quantités: 60kg de fromage, 150kg de pomme de terre ou encore 11kg d'andouille. De Guémené, cela va de soit.
«Les guerriers de l'humanitaire»
Malgré les 45° qu'affiche le thermomètre, la traversée du Mali est plus clémente. Le désert laisse place à la végétation. Même furtives, les rencontres avec la population se font plus nombreuses. Michel, le bourru, fend peu à peu l'armure et se dit «content de pouvoir aider les gamins». Enfin, le 2avril, Bamako, terme de l'aventure. L'arrivée dans le quartier de Sangarebougou est triomphale.
Au tour des bénévoles et de Michel de faire les yeux ronds. 700 personnes les acclament. Un brin grandiloquent, un officiel malien conclut ainsi le périple: «Vous êtes des guerriers de l'humanitaire. Vous avez quitté votre pays natal, traversé les mers et les déserts pour venir nous apporter votre aide. Pour tout cela, merci. Vous êtes au Mali chez vous!».
Les «guerriers» n'auront pourtant pas le temps de profiter de leur nouveau chez eux. Déjà il leur faut repartir. Par les airs, pour la plupart des bénévoles, par la route pour Michel et Matthias. La route encore et toujours.
Jean Tigana, parrain de l'opération
«Je suis l'unique médecin pour 8.000 personnes. Et je n'ai rien, même pas une mobylette pour me déplacer. Je peux vous dire que tout ce matériel livré va être très utile», assure Sidi Boli, docteur à Koungo, village situé à l'ouest du Mali.
Béquilles, lits médicalisés, fauteuils roulants et matériel scolaire: voilà le genre d'équipement qu'ont déchargé les «Camions du partage» au Maroc, en Mauritanie et au Mali. Soit 200 tonnes récoltées depuis deux ans par Hôpital Assistance Internationale (HAI), organisation non gouvernementale créée en 1992.
Du matériel qui pour l'essentiel sommeillait dans les structures médicales françaises. Remis en état, l'idée est qu'il retrouve ainsi une seconde vie, en Afrique. Deux ambulances de pompiers, ainsi que trois voitures reconverties également en ambulances, ont également été données.
Ce projet d'envergure repose sur deux structures et deux hommes. Hervé Le Torch, transporteur routier à la retraite et fondateur de Cap Sud Organisation, et le docteur Marcel Sauvourel, délégué régional de HAI. Voilà deux ans, les deux amis pensent unir leurs compétences. Hervé se fait fort de trouver neuf semi-remorques. Marcel trouvera de quoi les remplir. Les «Camions du partage» sont nés.
Qui sont les bénéficiaires de l'opération? Dans le contexte politique trouble qui touche actuellement la Mauritanie, Marcel Sauvourel précise: «Cette aide ne revient en rien aux gouvernements mais aux centres de santé de Mauritanie et du Mali. Nous avons préféré travailler avec les élus des villes et villages pour nous assurer de la bonne utilisation de ces dons.
Ensuite nous enverrons des ingénieurs et techniciens pour garantir la formation». Huit des camions ayant servi au transport ont été offerts par les transporteurs qui les ont acheminés, à la fondation Jean Tigana, qui parraine l'opération.
L'ancien footballeur international français, présent au départ de Nantes et à l'arrivée à Bamako, pour qui «plus que les dons, c'est la prise de conscience de ces bénévoles des souffrances de l'Afrique qui est fondamentale».
* G.R.
source : Le Télégramme (France)
via cridem
Slalomant entre des charrettes et des 404 Peugeot fatiguées, Michel Lamboley se fraye un chemin dans les rues de Nouakchott, la capitale mauritanienne. Le soleil tape déjà dur et son camion de vingt ans d'âge tressaute à chaque passage de vitesse: «Il est aussi têtu qu'un âne!», gronde le transporteur routier à Hennebont (Morbihan) en frappant le volant.
Au bord de la route, les locaux font les yeux ronds en voyant défiler l'impressionnant convoi des «Camions du partage». 28 véhicules le composent, dont neuf semi-remorques chargées de près de 200tonnes de matériel médical et éducatif à destination du Maroc, de la Mauritanie et du Mali.
Quelque 60 bénévoles sont engagés dans cette opération initiée par Cap Sud Organisation, une association morbihannaise spécialisée dans l'organisation de raids, et l'organisation non gouvernementale Hôpital Assistance International.
Majoritairement bretonne, cette horde mécanique réunit des profils hétéroclites. Transporteurs routiers actifs ou à la retraite, médecins, chefs d'entreprise ou fans des raids en 4×4 qui, tous, ont quitté femmes et entreprises le 21mars dernier, jour du départ de Nantes.
Immobilisés à Tanger
«C'est l'occasion de voir du pays, de se faire une virée entre copains et tout cela pour une bonne cause», résume Michel, 53 ans. Pas le temps d'en dire plus. Il faut avancer. Toujours à la traîne, accompagné de Matthias le mécanicien, les deux compères ferment le convoi avec leur camion d'assistance. Charge à eux de pallier les pannes mécaniques ou d'essence dont souffriraient les autres véhicules.
À Nouakchott, le cortège bigarré qui a parcouru 4.000km accuse déjà une journée de retard sur le programme. La chaleur et le sable qui font souffrir la mécanique ne sont pourtant pas en cause. Les responsables? Les douaniers marocains, étrangement tatillons, qui ont bloqué pendant 48heures le convoi sur le port de Tanger.
L'arrivée en Afrique ne se pouvait plus caricaturale... Un moment d'attente qui rappelle aux briscards de la route le passage des frontières avant la création de l'espace Schengen. Ils en seraient presque nostalgiques.
Bivouac en plein désert
Chaque jour les camions du partage avalent entre 400 et 700km de bitume. Les livraisons régulières de matériel ponctuent le trajet. Et les paysages grandioses traversés font patienter jusqu'au soir, où la communauté se retrouve pour bivouaquer, le plus souvent en plein désert. Pour nourrir tous ces affamés, l'organisation n'a pas lésiné sur les quantités: 60kg de fromage, 150kg de pomme de terre ou encore 11kg d'andouille. De Guémené, cela va de soit.
«Les guerriers de l'humanitaire»
Malgré les 45° qu'affiche le thermomètre, la traversée du Mali est plus clémente. Le désert laisse place à la végétation. Même furtives, les rencontres avec la population se font plus nombreuses. Michel, le bourru, fend peu à peu l'armure et se dit «content de pouvoir aider les gamins». Enfin, le 2avril, Bamako, terme de l'aventure. L'arrivée dans le quartier de Sangarebougou est triomphale.
Au tour des bénévoles et de Michel de faire les yeux ronds. 700 personnes les acclament. Un brin grandiloquent, un officiel malien conclut ainsi le périple: «Vous êtes des guerriers de l'humanitaire. Vous avez quitté votre pays natal, traversé les mers et les déserts pour venir nous apporter votre aide. Pour tout cela, merci. Vous êtes au Mali chez vous!».
Les «guerriers» n'auront pourtant pas le temps de profiter de leur nouveau chez eux. Déjà il leur faut repartir. Par les airs, pour la plupart des bénévoles, par la route pour Michel et Matthias. La route encore et toujours.
Jean Tigana, parrain de l'opération
«Je suis l'unique médecin pour 8.000 personnes. Et je n'ai rien, même pas une mobylette pour me déplacer. Je peux vous dire que tout ce matériel livré va être très utile», assure Sidi Boli, docteur à Koungo, village situé à l'ouest du Mali.
Béquilles, lits médicalisés, fauteuils roulants et matériel scolaire: voilà le genre d'équipement qu'ont déchargé les «Camions du partage» au Maroc, en Mauritanie et au Mali. Soit 200 tonnes récoltées depuis deux ans par Hôpital Assistance Internationale (HAI), organisation non gouvernementale créée en 1992.
Du matériel qui pour l'essentiel sommeillait dans les structures médicales françaises. Remis en état, l'idée est qu'il retrouve ainsi une seconde vie, en Afrique. Deux ambulances de pompiers, ainsi que trois voitures reconverties également en ambulances, ont également été données.
Ce projet d'envergure repose sur deux structures et deux hommes. Hervé Le Torch, transporteur routier à la retraite et fondateur de Cap Sud Organisation, et le docteur Marcel Sauvourel, délégué régional de HAI. Voilà deux ans, les deux amis pensent unir leurs compétences. Hervé se fait fort de trouver neuf semi-remorques. Marcel trouvera de quoi les remplir. Les «Camions du partage» sont nés.
Qui sont les bénéficiaires de l'opération? Dans le contexte politique trouble qui touche actuellement la Mauritanie, Marcel Sauvourel précise: «Cette aide ne revient en rien aux gouvernements mais aux centres de santé de Mauritanie et du Mali. Nous avons préféré travailler avec les élus des villes et villages pour nous assurer de la bonne utilisation de ces dons.
Ensuite nous enverrons des ingénieurs et techniciens pour garantir la formation». Huit des camions ayant servi au transport ont été offerts par les transporteurs qui les ont acheminés, à la fondation Jean Tigana, qui parraine l'opération.
L'ancien footballeur international français, présent au départ de Nantes et à l'arrivée à Bamako, pour qui «plus que les dons, c'est la prise de conscience de ces bénévoles des souffrances de l'Afrique qui est fondamentale».
* G.R.
source : Le Télégramme (France)
via cridem