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Le bureau exécutif de l'AVOMM

"L'important n'est pas ce qu'on fait de nous, mais ce que nous faisons nous-mêmes de ce qu'on a fait de nous." Jean-Paul Sartre

"L'Association d'aides aux veuves et aux orphelins de mauritanie (AVOMM) qui nous rassemble, a été créée le 25/12/95 à PARIS par d'ex-militaires mauritaniens ayant fui la terreur, l'oppression, la barbarie du colonel Mawiya o/ sid'ahmed Taya ......
Ces rescapés des geôles de ould Taya, et de l'arbitraire, décidèrent, pour ne jamais oublier ce qui leur est arrivé, pour garder aussi la mémoire des centaines de martyrs, de venir en aide aux veuves, aux orphelins mais aussi d'engager le combat contre l'impunité décrétée par le pouvoir de Mauritanie."
E-mail : avommavomm@yahoo.fr

Bureau exécutif

*Ousmane SARR, président
*Demba Niang, secrétaire général
*Secrétaire général Adjt; Demba Fall
*Alousseyni SY, Chargé des relations extérieures
*Mme Rougui Dia, trésorière
*Chargé de l’organisation Mariame Diop
*adjoint Ngolo Diarra
*Mme Mireille Hamelin, chargée de la communication
*Chargé de mission Bathily Amadou Birama
Conseillers:
*Kane Harouna
*Hamdou Rabby SY










AVOMM

Rétro/ Conférence de Bruxelles 04 septembre 2004 : Intervention de Ba Bocar de l' AJD

« 28 novembre : symbole de construction nationale ou paroxysme d’une logique génocidaire ».

Je voudrais avant tout remercier l’AVOMM et la féliciter. La remercier pour m’avoir donner l’occasion de revenir dans cette magnifique ville de Bruxelles et de me retrouver en face


Rétro/ Conférence de Bruxelles 04 septembre 2004 : Intervention de Ba Bocar de l' AJD
d’une formidable communauté mauritanienne dont l’engagement politique et l’opposition radicale au régime fasciste et ethnogénocidaire de Nouakchott ne sont plus à démontrer.
La félicité pour tout le travail qu’elle ne cesse d’accomplir pour l’avènement des droits de l’Hommes en Mauritanie, derrière son président, M. SARR Ousmane. Le travail de parrainage des orphelins que l’AVOMM initie aujourd’hui est bien la démonstration, si besoin en était, qu’elle ne manque pas de volonté et d’imagination pour asseoir son projet humaniste. C’est pourquoi, chacun d’entre nous a le devoir de se faire l’ambassadeur de cette initiative, et cela où que nous soyons.


Je voudrais également dire combien je suis heureux de vous retrouver vous, public bruxellois ; car j’étais ici, dans cette même salle, l’année dernière pour une autre conférence, et je dois dire que j’avais bien apprécié l’accueil typiquement fountanké qu vous m’aviez réservé. Je vous en suis infiniment reconnaissant.

Cette phase de civilités passée, je vais maintenant essayer d’aborder la question qui nous réunit ici aujourd’hui, à savoir, la symbolique du 28 novembre. L’on peut légitimement se demander pourquoi cette date, plus que toute autre a-t-elle retenu mon attention. D’abord parce que comme tout patriote j’ai, depuis ma tendre enfance, toujours ressenti comme une sorte de fascination pour la date à la quelle mon pays a accédé à l’indépendance. Cette date marque les plus beaux souvenirs de ma vie de jeune écolier ; car c’était le moment, pour l’élève paresseux que j’étais, où l’école devenait festive, et où l’on apprenait tout naïvement des chants patriotiques aux sonorités d’unité nationale, qui nous emplissaient le cœur de joie, quand bien même ils occultaient la dure réalité de la question nationale.

Aussi parce que ce 28 novembre qui m’avait tant fait rêvé a été souillé, et a fini par révéler cette évidence que la Mauritanie n’est encore indépendante, car prise en otage par un système qui exclut une partie importante de la communauté nationale. En effet, si le régime ne place a réussi à évacuer la question nationale de son univers lexical, il n’a jamais réussi cependant à faire oublier que la nation mauritanienne est en question. Et là où la nation est en question, la question nationale est une évidence permanente. Il me semble d’ailleurs, si ma mémoire livresque ne me joue pas un mauvais tour, que la question nationale n’est rien d’autre que la mauvaise traduction du russe en français d’une phrase de Lénine qui disait : « la nation est en question ».c’est dire que ce concept et cette phrase expriment en fait une seule et même chose. C’est dire également, que ceux qui dans la classe politique mauritanienne rechignent, par je ne sais quelle espèce de pudeur idéologique à employer le concept de « question nationale » et qui pourtant, n’ont d’autres solutions que de reconnaître que la nation mauritanienne est en question, sont entrain de se complaire dans un faux débat sémantique.

Ainsi donc, si la nation mauritanienne est toujours en question, et cela, prés d’un demi siècle après l’indépendance, c’est que cette date et les discours d’auto glorification qui l’ont accompagnée, n’ont pas été l’occasion d’un « vouloir vivre ensemble », qui est le fondement de toute nation véritable.

Et pourtant les joutes oratoires n’avaient manqué à l’époque pour souligner le caractère arc-en-ciel de ce jeune pays qui allait, selon le discours officiel, et de par sa position géographique et sa composition pluriethnique, occuper une place charnière entre le monde arabe et le monde négro-africain. Ah que le diable est beau lorsqu’il veut se faire lutin !

28 novembre, symbole de construction natinale.

Ce sous-titre, j’en conviens, trahit dans le meilleur des cas, une certaine naïveté. Vous comprendrez bien que mon propos ici n’est pas de verser dans cette naïveté, mais d’essayer de comprendre avec vous, comment pendant des décennies, on a pu noter un certain écart entre le discours officiel et la pratique politique réelle.

J’ai eu à évoquer tantôt comment les différents régimes qui ont été aux affaires ont produit un tapage médiatique autour de l’unité nationale et de la double appartenance de la Mauritanie à l’univers arabe et négro-africain. L’on se rappelle même cette fameuse phrase de Mokhtar Ould Daddah disant : « En Mauritanie, il n’y a de noirs et de blancs que pour les anthropologues et les sociologues. » Cela pouvait ressembler une négligence expresse de ce qui divise pour mettre en avant ce qui ressemble, toute chose pouvant aboutir à l’essentiel : l’unité nationale. On a même mis à contribution le patriotisme romantique d’un vieux poète qui, par une belle figure, comparait le caractère bi racial de la Mauritanie au noir de l’œil et au blanc de l’œil qui, réunis permettent de voir. Toute cette littérature aux allures progressistes auraient pu faire sens, n’eurent été les actes politiques qui ont été posés par la suite et qui achèveront de démontrer que l’idéologie de construction nationale est en réalité basée sur l’affirmation quasi exclusive de l’arabité de la Mauritanie. Et cela à qui mieux mieux, par les différent régimes qui se sont succédés à la tête de l’Etat.

Je vous ferai volontiers l’économie du détail quant aux différentes dates qui ont rythmé l’entreprise de déconstruction nationale. Toujours est-il que de 1966 à 1990, en passant par 1979, 1986, 1987 et 1989, l’apartheid à la mauritanienne a montré des signes de performance et de subtilité dans la mise ne branle de sa logique génocidaire.

Quand un pays qui prétend être une nation se retrouve avec une partie de ces enfants (et pas forcément des moins valeureux), certains hors de sa terre, et d’autres sous sa terre, sans que le drapeau national n’ait été mis en berne, sans qu’un élan populaire et spontané, sans nuance de couleurs n’exprime le deuil national, c’est que le sentiment national a cédé le pas au nationalisme étroit. Or ce nationalisme étroit et sectaire, véhiculé jusque dans les plus hautes sphère de l’appareil d’état, est celui-là même qui a trahi l’esprit du 28 novembre, si tant il est vrai que le 28 novembre 1960 incarnait la naissance d’une nation.

En tous cas, à défaut d’avoir incarné la nation mauritanienne , le 28 novembre n’en sera moins désormais l’incarnation de la fracture nationale, et le début de ce qu’il conviendrait d’appeler « la solution finale » à la mauritanienne.

28 novembre, paroxysme d’une logique génocidaire.

Je suis pleinement conscient que le mot de génocide ici employé, pourrait être soumis à une volonté de contestation par certains esprits, désormais presque naturellement sceptiques, qui ont fini par trouver dans la valse sémantique leur danse politique favorite ; et ce, comme une sorte d’ultime retranchement argumentaire face au principe têtu de réalité.

On a même entendu récemment, lors de la manifestation de l’AVOMM à Mantes la jolie, un homme politique mauritanien évoquer cette question, par un insidieux jeu de nuance entre le « génocide au sens philosophique » et « le génocide qu sens juridique ». Je ne rentrerai pas ici dans le piège ce faux débat qui de toute façon, n’ajoutera, ni retranchera rien à votre conviction dans le caractère génocidaire de ce qui s’est passé en Mauritanie.

Quant au 28 novembre 1990, il s’agit là désormais d’une date repère dans l’histoire de la tragédie nationale. Un peu comme un certain 12-12-84…ou un octobre 86, et j’en passe. Mais s’il y a tant de dates repères, pourquoi le 28 novembre devrait-il tant cristalliser notre attention ? Pour le double symbole qui s’y cache. Pour le rendez-vous manqué entre la Mauritanie et elle-.même. Avouons qu’il y a quelque chose d’insolite lorsque dans un même pays, une partie fête le 28 novembre, alors qu’une autre pleure, ou en tous les cas devrait pleurer cette même date.

Car le 28 novembre 1990, ce sont de valeureux soldats de la République qui ont été sacrifiés à l’autel de la bêtise humaine et de la cruauté politique. Ce sont 28 jeunes hommes, tous négro-africains, dont certains venaient d’être papas, qui ont été froidement exécutés, pour, dit-on, fêter la nation ; ou plus exactement péter la nation. La mort sous les balles de militaires, fussent-ils jeunes et beaux n’est pas ce qui surprend le plus. C’est leur mort sous les balles de leurs propres camarades de troupe qui frise l’absurde. Une nation qui tire sur ces propres soldats, ceux-là même censés défendre son intégrité territoriale, est une nation moribonde. En cela le 28 novembre 1990 fut l’aboutissement bien imaginé d’une entreprise de fracture nationale.

Après les arrestations de 1986 et les morts de cadres politiques et d’intellectuels noirs, après les évènements de 1989 et la déportation de dizaine de milliers de familles négro-africaines (dont des villages entiers vidés de leurs populations d’origine et remplacées par des arabes, avec arabisation de nom à la clé), après la radiation dans l’Administration de cadres noirs pour les remplacer par des arabes, après l’état de siège dans le sud, où les viols de femmes et les exécutions de jeunes garçons avaient pour but faire abandonner les populations noires des terres qui étaient les leurs et un pays qui était le leur ; après tout ceci et après tout cela, il ne manquait plus qu’une méthodique dénègrification de l’armée pour sécuriser définitivement l’entreprise de purification ethnique. Le 28 novembre 1990 est la suite logique des événements précédents. Car peut-on faire tout ceci à une communauté et laisser ses représentants dans l’armée ? Ces événements ne pouvaient qu’advenir. C’est pourquoi, l’accusation de coup d’état portée contre les militaires négro-africains est une stratégie cousue de fils roses. On aurait donc dû l’apercevoir de très loin.
En espérant n’avoir pas été trop long, je vous remercie de votre attention.
Lundi 1 Novembre 2021 - 12:15
Lundi 1 Novembre 2021 - 12:19
BA Bocar (AJD)
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