Liste de liens

Le bureau exécutif de l'AVOMM

"L'important n'est pas ce qu'on fait de nous, mais ce que nous faisons nous-mêmes de ce qu'on a fait de nous." Jean-Paul Sartre

"L'Association d'aides aux veuves et aux orphelins de mauritanie (AVOMM) qui nous rassemble, a été créée le 25/12/95 à PARIS par d'ex-militaires mauritaniens ayant fui la terreur, l'oppression, la barbarie du colonel Mawiya o/ sid'ahmed Taya ......
Ces rescapés des geôles de ould Taya, et de l'arbitraire, décidèrent, pour ne jamais oublier ce qui leur est arrivé, pour garder aussi la mémoire des centaines de martyrs, de venir en aide aux veuves, aux orphelins mais aussi d'engager le combat contre l'impunité décrétée par le pouvoir de Mauritanie."
E-mail : avommavomm@yahoo.fr

Bureau exécutif

*Ousmane SARR, président
*Demba Niang, secrétaire général
*Secrétaire général Adjt; Demba Fall
*Alousseyni SY, Chargé des relations extérieures
*Mme Rougui Dia, trésorière
*Chargé de l’organisation Mariame Diop
*adjoint Ngolo Diarra
*Mme Mireille Hamelin, chargée de la communication
*Chargé de mission Bathily Amadou Birama
Conseillers:
*Kane Harouna
*Hamdou Rabby SY










AVOMM

Dans le Sahara, « les policiers marocains ont lâché les chiens sur nous »


De nombreux migrants arrivant de la Mauritanie racontent avoir subi des violences et avoir été abandonnés dans le désert par les forces de sécurité marocaines, équipées par des pays européens.




Les mots ne sortent pas de la bouche d’Amadou. Dans une chambre d’hôtel climatisée où rendez-vous lui a été donné, en plein cœur du quartier des ambassades de la capitale mauritanienne, Nouakchott, le jeune Guinéen, 19 ans, qui ne donne que son prénom comme d’autres migrants interrogés, peine à afficher autre chose que son mutisme. Sur le canapé où il est installé, il se rétracte, se met en boule, donne l’impression de vouloir disparaître.

A sa gauche, son ami Mamadou, 20 ans, lui aussi originaire de Conakry, fait le récit de leur tentative de rejoindre le Maroc depuis la Mauritanie, via le Sahara occidental – ancienne colonie espagnole contrôlée en majeure partie par le Maroc, mais revendiqué par les indépendantistes sahraouis du Front Polisario, soutenus par l’Algérie –, pour y trouver un travail. C’est dans cette zone désertique, cernée par des militaires et truffée de mines antipersonnel, l’une des frontières les moins accessibles du monde, que les deux jeunes hommes ont vécu l’enfer. Ils auraient été tabassés par ce qu’ils identifient comme des policiers ou des militaires marocains, mordus par leurs chiens avant d’être abandonnés dans le désert, pieds et poings liés. « Personne ne peut vivre avec ce que l’on a vécu, confie Mamadou. J’ai eu peur de mourir. »
Violences, torture

En tout, ils sont neuf à relater la même histoire. Des officiels marocains les auraient appréhendés dès le franchissement de la frontière, gardés captifs dans un campement au milieu du désert, avant d’en abandonner certains. La plupart évoquent des violences. Certains parlent même de torture. La pratique de refoulements est en outre attestée par plusieurs associations sur place et le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), d’après des documents et des témoignages obtenus par le média à but non lucratif Lighthouse Reports, qui a enquêté avec Le Monde et sept médias internationaux sur ces violations des droits humains, parfois perpétrées avec des moyens alloués par des pays de l’Union européenne.

« Les Marocains larguent les gens tout près de la frontière. J’en ai pris un en voiture en juin 2023, il était très blessé », reconnaît encore, sous le couvert de l’anonymat, un membre de la Guardia Civil espagnole, qui travaille sur place. Il assure avoir entendu parler de « très nombreuses personnes blessées par des chiens ».

« Durant notre voyage en Mauritanie [dans le cadre d’une mission parlementaire en décembre 2023], on nous a fait comprendre que les Marocains n’étaient pas tendres avec les migrants qui essaient de rentrer par le Sahara occidental », confie, de son côté, le député européen (Rassemblement national) Gilles Lebreton.

Frontière sous bonne garde

Contactées, les autorités mauritaniennes assurent ne pas avoir connaissance de telles pratiques. « Ces allégations de violence ou de mauvais traitements sont totalement infondées », assure, de son côté, le ministère de l’intérieur marocain. Ni le HCR ni l’Organisation internationale pour les migrations n’ont répondu à nos sollicitations.

Le voyage de Mamadou et d’Amadou commence en mars 2023. Les deux jeunes, qui se sont rencontrés en Mauritanie, se mettent en tête de rejoindre le Maroc. « Beaucoup de migrants essaient d’aller là-bas pour prendre un bateau pour les Canaries plutôt que de traverser depuis la Mauritanie. D’autres y vont juste pour trouver du travail », rapporte le frère Arthur Kalonda, de l’Association d’aide aux migrants Daniel-Brottier. « En ce moment, il y a beaucoup de gens qui arrivent à Dakhla [l’une des principales villes du Sahara occidental, au sud du Maroc], ajoute le président d’une association de soutien aux migrants, qui préfère garder l’anonymat. Certains ont marché pendant une semaine dans le désert. »


Après une halte à Nouadhibou, une ville côtière accolée au Sahara occidental, Mamadou et Amadou, accompagnés de deux autres Guinéens, décident de marcher le long de la frontière, au milieu du désert. Conséquence de la guerre qui oppose toujours les indépendantistes sahraouis du Front Polisario aux forces marocaines, la frontière est sous bonne garde. Un grillage, surmonté de barbelés, délimite le territoire des deux Etats. « Nous avons dépassé un poste-frontière et nous sommes passés par un trou que d’autres avaient fait dans le grillage avant nous », se souvient Mamadou.


Le groupe ne tarde pas à être repéré. « Nous avons marché une heure avant que les policiers marocains nous attrapent. Ils ont lâché les chiens sur nous. Les policiers, eux, étaient sur des quads. » En 2023, plusieurs véhicules tout-terrain du même type ont été livrés aux autorités marocaines par la Fondation internationale et ibéro-américaine pour l’administration et les politiques publiques (FIIAPP), l’agence de développement liée au ministère des affaires étrangères espagnol. L’objectif : renforcer le contrôle aux frontières. Interrogée sur ce point, la FIIAPP n’a pas donné suite à nos sollicitations.
Lire aussi | Article réservé à nos abonnés En Tunisie, des migrants camerounais interceptés en mer et abandonnés à la frontière algérienne

Trois jours durant, racontent les deux jeunes hommes, les policiers les battent, les privent de nourriture après les avoir ramenés à leur campement de fortune. Puis ils les abandonnent ligotés au milieu du désert. Mamadou et Amadou ne sont pas seuls ce jour-là. « Autour de nous, j’ai vu des gens blessés. Ils avaient été mordus par des chiens au niveau du cou ou des pieds », se souvient Mamadou. Après avoir réussi à se détacher, ils cheminent à travers les dunes jusqu’à la seule route qui serpente le long du littoral. Là, selon leur récit, un camion les prend en stop et les fait rentrer en Mauritanie, où ils sont recueillis par plusieurs membres de la diaspora guinéenne.

Mordue sur tout le corps

Le périple de Khady, quant à lui, s’est achevé au Sahara occidental. Début mars 2024, la nuit est tombée depuis longtemps sur le désert quand le petit groupe que la Guinéenne de 28 ans forme avec une quinzaine d’hommes et de femmes arpente le même sentier. C’est la quatrième fois que Khady tente de « passer en Europe ». Un mois plus tôt, la jeune femme quittait Conakry en voiture pour le Sénégal. Avant de mettre le cap sur la Mauritanie.
Dans cette photo envoyée un mois après l’incident, Khady montre ses blessures consécutives à l’attaque des chiens des forces marocaines, en avril 2024.

A peine la frontière franchie, Khady entend un grognement au loin. Elle aperçoit des chiens et la silhouette de plusieurs de leurs maîtres. Elle n’est pas surprise. « En Mauritanie, les gens disaient que nous allions nous faire attaquer par des chiens. » En quelques secondes, elle se jette au sol avant d’être attaquée par plusieurs bêtes qui la mordent sur tout le corps. Des photographies, que nous avons obtenues, attestent de ses blessures. De larges cicatrices s’affichent sur le haut de son buste.

En mai 2023, plusieurs représentants de la police marocaine paradaient devant les objectifs de la presse pour présenter la police cynotechnique chargée, entre autres missions, du contrôle de la frontière. Cette brigade canine – le Maroc nie qu’elle opère à la frontière avec la Mauritanie – a reçu des chiens et des entraînements de l’Autriche depuis 2009. Sollicité, le ministère de l’intérieur autrichien a refusé de commenter cette information.

Les blessures de Khady sont sévères. Les policiers marocains décident alors de l’envoyer à l’hôpital. En route, elle assure avoir été frappée, insultée.

Khady n’a pas abandonné son rêve d’Europe. Elle vit de petits boulots en espérant réunir la somme nécessaire à la traversée. Amadou et Mamadou, eux, regrettent leur Guinée natale. « Je veux retourner dans mon pays, je n’ai pas d’autre programme. J’ai vu ce qu’il y avait là-bas », témoigne le second. Là-bas, au Maroc.




Maud Julien (Lighthouse Reports), Andrei Popoviciu (Lighthouse Reports) et Tomas Statius (Lighthouse Reports)

Source : Le Monde - (Le 21 mai 2024)
Jeudi 23 Mai 2024 - 10:52
Jeudi 23 Mai 2024 - 11:06
INFOS AVOMM
Accueil | Envoyer à un ami | Version imprimable | Augmenter la taille du texte | Diminuer la taille du texte


Nouveau commentaire :


Dans la même rubrique :
1 2 3 4 5 » ... 591