Et la rose d’Aziz tomba dans une forêt de cactus !

Il avait montré sur sa main droite une rose.Le cadeau était beau pour être refusé.Mais que représentait une fleur au milieu d'une forêt de cactus.Il fallait à tout prix accepter ce présent et faire abstraction des craintes et autres préjugés sur la descendance de cette fleur.Les mauritaniens y ont, sans beaucoup de cogitations, cru.Car l'histoire a elle aussi « ses raisons que la raison ne connaît pas. » Chemin faisant, les mille et une promesses du Général étaient tellement séduisantes qu'il fallait être trop négationniste pour les discréditer.

Même si tous en Mauritanie n'avaient pas forcément le même jugement favorable à l'égard de la personne du faiseur des rois devenu par le truchement de la politique, l'usurpateur du trône. Un statut qu'il finira par s'affubler. Un costume très grand pour sa mesure de nouveau fantassin de la République. Peut importe, le costume ne fait pas le président !Deuxième victoire qui sanctifia le putschiste élu par les urnes. Toutes les portes de la reconnaissance s'ouvrent après plusieurs mois de désaveux de la communauté internationale. Et de trois le peuple lui offrira en retour des chrysanthèmes. A son investiture, il s'épinglera de sa propre médaille de président des pauvres. Tout est parti pour un quinquennat qui va transformer le destin des mauritaniens.

Mais difficile de séparer les bonnes intentions de la propagande, l'ambition de l'illusion, la volonté des compétences, la fiction de la réalité, bref le vrai du faux. Le mélange était très concentré mais pour quelle mayonnaise ? Les mauritaniens se perdirent dans le flot des chantiers dont certains ne sont pas loin d'éléphants blancs. Le train « Azizien » donna son premier signal qui retentit dans tout le pays. Et ce sont les pauvres qui, en premier se mirent à scruter l'horizon de cette nouvelle Mauritanie où pendant des décennies un petit groupe de privilégiés s'enrichit sur le dos de la majorité. Où les rentes profitaient à des gros hommes d'affaires, où les deniers publics étaient empochés par des fonctionnaires aux dents très longues. Et surtout où l'injustice et le favoritisme étaient devenus les choses les mieux partagées en Mauritanie.

Nous étions aussi dans un pays où la corruption, la drogue, la prévarication étaient principales sources d'enrichissement les plus rapides. C'est avec cet argent sale que s'alimentaient les caisses de l'Etat. Notre économie était devenue une économie mafieuse. On ne pouvait plus situer avec précision l'origine de toutes ces grosses fortunes qui servaient à bâtir de belles villas, à acheter les plus rutilantes carrosseries du monde et à créer des sociétés avec des capitaux géants. Combattre tout ce système n'était pas une promenade de santé pour Aziz. Il fallait joindre l'acte à la parole. Des têtes sont tombées au premier coup. Le seul hiatus était dans le choix des cibles.

Cette lutte contre la gabegie revêtit ainsi deux poids deux mesures. Elle eut lieu tout de même sans des répercussions sur les indicateurs de la croissance. Le panier de la ménagère non plus n'a senti ses effets. Les mauritaniens voyant partout des promesses pleuvoir telles des mirages au loin, sans pouvoir les mettre sous la panse. Le quotidien des mauritaniens n'est pas des plus enviables avant les régimes passés. Jamais de mémoire de mauritanien un gouvernement aussi passif n'a été à la tête du pays. Aziz, l'homme qui toucha au dossier brûlant du passif humanitaire n'a pas poussé loin le doigt. Et en se laissant aller à la création d'un fichier biométrique il n'a pas pris la peine de mesurer la portée de cette décision. Et ce, au prix de l'atteinte de l'unité nationale. La rose de Aziz a fini par tomber dans une forêt de cactus…

Cheikh Tidiane Dia

Source: le renovateur