Près de deux mois après la formation du nouveau gouvernement, la situation politique paraît encore très confuse. La nouvelle équipe, dirigée par Yahya Ould Ahmed Waghef, fait l’objet d’un feu nourri d’attaques, venues de toutes les chapelles politiques (majorité et opposition).
Un discours très critique, parfois d’une virulence extrême qui pique à tout-va sur les «méfaits» d’un gouvernement qui vient, pourtant, tout juste d’arriver aux commandes et dont il est, tout de même, assez prématuré de tirer un bilan.
Sauf à considérer l’éventuel vice rédhibitoire en s’obnubilant sur le retour en force de quelques personnalités dont l’image n’est pas associée – c’est un euphémisme – à une volonté de réforme en vue d’un véritable changement.
Quant la lecture des motivations profondes des «tireurs», c’est un sacré casse-tête! Pour la bonne et simple raison que ça tire de partout… Et ce n’est pas tout ! En plus du lynchage tous azimuts du gouvernement, de nombreuses rumeurs font état d’un «désaccord» entre le président de la république et son chef d’état-major particulier, le général Mohamed Ould Abdel Aziz. Rumeurs totalement «infondées», selon une source proche du palais... Bon. Mettons les casques et essayons de nous rapprocher des snipers.
Première à monter à l’affût, l’Initiative des Cadres pour un Changement Démocratique (ICCD), pilotée par Mohamed El Hacen Ould Hadj, sénateur de Rosso et vice président de la chambre haute du parlement, exige la démission «immédiate» du gouvernement et «la formation d’un gouvernement d’union nationale autour d’un programme de développement, pour une durée déterminée» Faute de quoi, l’ICCD invite les députés à voter une motion de censure pour renverser l’équipe Ould Waghef. Une volée de bois vert dont la justification réside dans «le dévoiement» du processus de changement qui s’enlise vers une situation «critique».
Le retour aux affaires des caciques de l’ancien régime, renversé le 3 août 2005, est ici pointé du doigt. Ce choix malheureux, souligne l’ICCD, réduit à néant toute possibilité de mise en œuvre du programme du président de la république, notamment sa partie relative «à la protection des libertés publiques, l’égalité des chances, la dépolitisation de l’administration, la lutte contre l’exclusion politique, la corruption et le clientélisme».
Une coalition formée d’une dizaine d’autres partis politiques, parmi lesquels les «Verts» de Mohamed Abdallahi Ould Dellahy, fait monter les enchères, en exigeant la démission du président de la république, accusé d’avoir rangé au placard tous les engagements sur la base desquels il avait été élu.
Mécontente depuis la formation du premier gouvernement post-transition, en avril 2007, l’Union pour la Démocratie et le Progrès (UDP), franchit le Rubicon, le mardi 17 juin, lors d’un point de presse organisée à l’hôtel Khater, en annonçant son retrait de la majorité présidentielle. Une rupture que le vice-président et porte parole de la formation, Sanghott Ousmane Racine, explique par «un manque de considération des autorités» et par «l’exclusion» du parti de Naha Mint Mouknass des deux premiers gouvernements post-transition, en dépit de son poids avéré sur le plan électoral et politique.
Ce parti, lui non plus, pourtant membre de la majorité présidentielle sous le régime déchu, n’apprécie pas du tout le retour aux commandes des symboles du pouvoir de Taya «qui compromet l’espoir» du changement.
Sortie d’Ahmed Ould Daddah.
Ce concert de critiques est conforté par les déclarations du chef de file institutionnel de l’opposition, Ahmed Ould Daddah, dans un entretien avec la chaîne satellitaire «Al Jazeera», diffusé le lundi 16 juin. Le président du Rassemblement des Forces Démocratiques (RFD) constate «l’échec» d’un gouvernement «incapable d’améliorer le quotidien, de plus en plus difficile, des mauritaniens et l’invite à passer la main».
Déclaration tout à fait normale et ordinaire dans la bouche d’un chef de l’opposition. Elle suscite, pourtant, des réactions passionnées de la part de certains «souteneurs». Ces derniers, dépourvus d’un minimum de culture démocratique, sont allés fouiller dans les poubelles pour déterrer la rhétorique débile du régime déchu, qui consistait à qualifier d’extrémistes, tout tenant d’un discours critique et non conforme à la théorie de l’Eldorado mauritanien.
Que les propos du président du RFD, notamment sur le point précis des hydrocarbures, fasse l’objet de contestations, plus ou moins pertinentes, ne changent strictement rien au problème de fond. C'est-à-dire la nécessaire acquisition d’une culture démocratique, débattant intelligemment du poids relatif des arguments des uns et des autres. Messieurs et dames, un peu de rigueur dans vos échanges ! Faites, de grâce, avancer au moins vos idées. Si vous en avez…
Au-delà de ces réactions des différents camps politiques, une partie de la société civile, à travers les associations de victimes de la répression, s’élève également contre la situation actuelle. Ainsi, cette semaine, l’Observatoire pour le Règlement du Passif Humanitaire (ORPH), qui regroupe toutes celles-ci, a exprimé son «désaccord» avec la nomination «des caciques du régime déchu et les auteurs des actes de tortures à des postes-clés de responsabilités, particulièrement sensibles pour le traitement des dossiers de violation de droits de l’Homme». Voilà des inquiétudes argumentées. Quelle en sera la réponse?
En fin de compte, si l’on comprend les motivations de la société civile, de l’opposition et de l’UDP, on reste, tout de même, fort étonné de certaines positions au sein de la majorité. Jalousies? Langue de bois? Remugle de luttes souterraines? On espérait, au moins, avec la démission du précédent gouvernement, une plus grande stabilité politique.
Quelque deux mois plus tard, rien n’est moins sûr…
Amadou Seck
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Source: LeCalame
(M) avomm
Un discours très critique, parfois d’une virulence extrême qui pique à tout-va sur les «méfaits» d’un gouvernement qui vient, pourtant, tout juste d’arriver aux commandes et dont il est, tout de même, assez prématuré de tirer un bilan.
Sauf à considérer l’éventuel vice rédhibitoire en s’obnubilant sur le retour en force de quelques personnalités dont l’image n’est pas associée – c’est un euphémisme – à une volonté de réforme en vue d’un véritable changement.
Quant la lecture des motivations profondes des «tireurs», c’est un sacré casse-tête! Pour la bonne et simple raison que ça tire de partout… Et ce n’est pas tout ! En plus du lynchage tous azimuts du gouvernement, de nombreuses rumeurs font état d’un «désaccord» entre le président de la république et son chef d’état-major particulier, le général Mohamed Ould Abdel Aziz. Rumeurs totalement «infondées», selon une source proche du palais... Bon. Mettons les casques et essayons de nous rapprocher des snipers.
Première à monter à l’affût, l’Initiative des Cadres pour un Changement Démocratique (ICCD), pilotée par Mohamed El Hacen Ould Hadj, sénateur de Rosso et vice président de la chambre haute du parlement, exige la démission «immédiate» du gouvernement et «la formation d’un gouvernement d’union nationale autour d’un programme de développement, pour une durée déterminée» Faute de quoi, l’ICCD invite les députés à voter une motion de censure pour renverser l’équipe Ould Waghef. Une volée de bois vert dont la justification réside dans «le dévoiement» du processus de changement qui s’enlise vers une situation «critique».
Le retour aux affaires des caciques de l’ancien régime, renversé le 3 août 2005, est ici pointé du doigt. Ce choix malheureux, souligne l’ICCD, réduit à néant toute possibilité de mise en œuvre du programme du président de la république, notamment sa partie relative «à la protection des libertés publiques, l’égalité des chances, la dépolitisation de l’administration, la lutte contre l’exclusion politique, la corruption et le clientélisme».
Une coalition formée d’une dizaine d’autres partis politiques, parmi lesquels les «Verts» de Mohamed Abdallahi Ould Dellahy, fait monter les enchères, en exigeant la démission du président de la république, accusé d’avoir rangé au placard tous les engagements sur la base desquels il avait été élu.
Mécontente depuis la formation du premier gouvernement post-transition, en avril 2007, l’Union pour la Démocratie et le Progrès (UDP), franchit le Rubicon, le mardi 17 juin, lors d’un point de presse organisée à l’hôtel Khater, en annonçant son retrait de la majorité présidentielle. Une rupture que le vice-président et porte parole de la formation, Sanghott Ousmane Racine, explique par «un manque de considération des autorités» et par «l’exclusion» du parti de Naha Mint Mouknass des deux premiers gouvernements post-transition, en dépit de son poids avéré sur le plan électoral et politique.
Ce parti, lui non plus, pourtant membre de la majorité présidentielle sous le régime déchu, n’apprécie pas du tout le retour aux commandes des symboles du pouvoir de Taya «qui compromet l’espoir» du changement.
Sortie d’Ahmed Ould Daddah.
Ce concert de critiques est conforté par les déclarations du chef de file institutionnel de l’opposition, Ahmed Ould Daddah, dans un entretien avec la chaîne satellitaire «Al Jazeera», diffusé le lundi 16 juin. Le président du Rassemblement des Forces Démocratiques (RFD) constate «l’échec» d’un gouvernement «incapable d’améliorer le quotidien, de plus en plus difficile, des mauritaniens et l’invite à passer la main».
Déclaration tout à fait normale et ordinaire dans la bouche d’un chef de l’opposition. Elle suscite, pourtant, des réactions passionnées de la part de certains «souteneurs». Ces derniers, dépourvus d’un minimum de culture démocratique, sont allés fouiller dans les poubelles pour déterrer la rhétorique débile du régime déchu, qui consistait à qualifier d’extrémistes, tout tenant d’un discours critique et non conforme à la théorie de l’Eldorado mauritanien.
Que les propos du président du RFD, notamment sur le point précis des hydrocarbures, fasse l’objet de contestations, plus ou moins pertinentes, ne changent strictement rien au problème de fond. C'est-à-dire la nécessaire acquisition d’une culture démocratique, débattant intelligemment du poids relatif des arguments des uns et des autres. Messieurs et dames, un peu de rigueur dans vos échanges ! Faites, de grâce, avancer au moins vos idées. Si vous en avez…
Au-delà de ces réactions des différents camps politiques, une partie de la société civile, à travers les associations de victimes de la répression, s’élève également contre la situation actuelle. Ainsi, cette semaine, l’Observatoire pour le Règlement du Passif Humanitaire (ORPH), qui regroupe toutes celles-ci, a exprimé son «désaccord» avec la nomination «des caciques du régime déchu et les auteurs des actes de tortures à des postes-clés de responsabilités, particulièrement sensibles pour le traitement des dossiers de violation de droits de l’Homme». Voilà des inquiétudes argumentées. Quelle en sera la réponse?
En fin de compte, si l’on comprend les motivations de la société civile, de l’opposition et de l’UDP, on reste, tout de même, fort étonné de certaines positions au sein de la majorité. Jalousies? Langue de bois? Remugle de luttes souterraines? On espérait, au moins, avec la démission du précédent gouvernement, une plus grande stabilité politique.
Quelque deux mois plus tard, rien n’est moins sûr…
Amadou Seck
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Source: LeCalame
(M) avomm