La crise multidimensionnelle que vit la Mauritanie actuellement, n'est que le résultat de l'accumulation des effets d'une longue tradition de monolithisme politique, installée en Mauritanie de 1960 à nos jours. Cette tradition se caractérise par une gestion néo-patrimoniale de tous les secteurs de la vie de la nation.
La définition de Max Weber de ce phénomène, trouve dans les modes de pouvoir (civils et militaires), chez nous un terrain de prédilection.
En effet, les formes de gouvernement se fondent sur la domination personnelle, se ressourçant d'un mélange de traditions et particulièrement de l'arbitraire.
Dans ce mode de gouvernement, il n'y a point de limites entre les sphères publique et privée et partant, la gestion des affaires de l'Etat devient comparable à celle d'une entreprise privée.
Dès son accession à l'indépendance nationale, le 28 novembre 1960, notre jeune Etat a enregistré un net recul démocratique, passant du multipartisme au monopartisme. La révision constitutionnelle de 1965 a fondé le parti unique, qui va constituer l'inauguration du système monolithique, que le règne de feu Mokhtar Ould Daddah va enraciner au plus profond des réflexes et comportements des mauritaniens. A telles enseignes que les militaires qui le déposeront et lui succèderont en quatre temps par des régimes instables ne pourront se démarquer de cette passion et/ou obsession du pouvoir. Car, la personnalisation du pouvoir était devenue une caractéristique intrinsèque de tout homme fort du pays à chaque fois qu'un coup d'Etat ou une révolution de palais lui permettait d'y accéder. Ce pouvoir était si jalousement gardé que seul un départ forcé s'offrait comme solution pour déloger le président en place. A la longue et après des décennies aux commandes, comme ce fut le cas avec feu le président Mokhtar Ould Daddah (1960-1978) ou Maaouiya Ould Sid'Ahmed Taya (1984-2005) et de manière un peu moins soutenue, sans doute faute de temps, sous Mohamed Khouna Ould Haidalla (1979-1984), on assistera à une patrimonialisation du pouvoir qui, au delà de la personne même du Président, maître absolu, se confondait avec ceux qui lui sont proches. Donc trop fort, trop adulé, centre de toutes les décisions, le président, vrai distributeur des grâces qu'il pourrait accorder à tous ceux et toutes celles qui se plieraient devant son leadership et dont la mainmise sur le peuple était totale, imposait un ordre auquel toute la nation devrait se soumettre. Or, de là ce qu'il y'ait une dérive monarchique il n'y a qu'un pouce que les sociétés arabes et africaines affaiblies par leur ségmentarité et vulnérables à la manipulation d'un chef incontesté et magnifié par le clientélisme ambiant, osent aisément franchir. C'est grâce à ce parti unique, véritable Parti-Etat, dirigé par le président de la République, mais aussi grâce à la confusion des pouvoirs qui permet au PPM de se voir reconnaître un rôle de conception et de direction qui lui confère une évidente suprématie sur les institutions de 1'Etat, que les lettres de noblesse du monopartisme seront écrites sous Mokhtar Ould Daddah et seront ainsi conservées après sa chute. Mais autant le monolithisme est d'abord le produit du régime civil (le Parti unique), autant la désagrégation et le délitement de l'Etat, dans des proportions massives, sont venus avec les cabinets militaires successifs. Car l'arrivée des militaires au pouvoir va plonger le pays dans une période d'instabilité d'autant plus remarquable qu'elle fait suite à dix-huit ans de pouvoir personnel ininterrompu. Non seulement l'inexpérience des militaires dans l'exercice du pouvoir livrera le pays à l'affrontement entre les divers clans aux sympathies externes affichées (pro-marocains, pro-algériens, pro-libyens, pro-irakiens, etc.), mais elle le conduira à une évolution politique chaotique, rythmée de coups d'Etat, de révolutions de palais et de tentatives de putsch. Cette instabilité s'étalera sur les treize années que dureront les quatre régimes militaires allant du Comité Militaire de Redressement National (CMRN) au Comité militaire de salut national, qui stabilisera le pouvoir avec Ould Taya.
Après trois décennies de monopartisme et de régimes militaires, et à la faveur des crises intérieures, du discours de la Baule et les changements dans le bloc socialiste ,un multipartisme contrôlé fut institué par la Constitution du 20 juillet 1991. Le système politique né de cette loi fondamentale avait ses limites, parce que n'intégrant point la possibilité d'alternance, ni par des textes et moins dans les pratiques. Mais le boycott des législatives de 1992 par l'Union des Forces Démocratiques(U.F.D), d'Ahmed Ould Daddah et principal parti d'opposition, avait fragilisé davantage toutes les Institutions, déjà affaiblies par leur caractère formel, laissant ainsi la voie libre au Parti Républicain Démocratique et Social(P.R.D.S), pour exercer seul, une mainmise sur la vie politique nationale. Le Parlement et l'ensemble des Institutions issues de la constitution de juillet 1991 devinrent des chambres d'enregistrement du Président de la république et chef du P.R.D.S. La demande de changement de ce système, fut exprimée pacifiquement par des partis politiques, des intellectuels et violemment par des officiers de l'armée (juin 2003).
En effet, face à cette situation aux dangers incalculables pour le pays, le Rassemblement pour la Démocratie et l'Unité (R.D.U) a pris l'initiative de regrouper pour la première fois en avril 2005, depuis le lancement du processus démocratique en 1991, la majorité présidentielle et l'opposition sur la même table ,pour discuter de la situation et trouver une sortie de la crise . Le document final de la rencontre a proposé des réformes importantes, mais leur mise en œuvre dépendait du pouvoir ,qui s'est montré dubitatif. Le système institué à travers la loi fondamentale de juillet 1991, a engendré au niveau du pouvoir le rejet systématique de l'alternance, seul gage d'une vie politique équilibrée et apaisée. Cette situation gravissime pour une démocratie pluraliste, a provoqué chez les acteurs de la vie nationale une demande, du moins naturelle, de changement s'exprimant tantôt pacifiquement et parfois violemment.
Le 3 Août 2005, le pouvoir politique a été renversé par les forces armées et de sécurité, dans l'optique, disent-elles, de mettre en place des institutions démocratiques dignes de ce nom.
Mais l'un des défis majeurs auquel faisait face le Conseil Militaire, résidait dans sa capacité à proposer au peuple un projet convaincant et réalisable durant la période fixée.
Un amendement constitutionnel, limitant les mandats présidentiels à deux, fut voté et des élections plus ou moins libres organisées. Mais pour ne pas travestir l'histoire, il est important de souligner, que n'eut été l'engagement ferme de quelques officiers du Cmjd pour le respect des engagements, on ne serait pas arrivé à un régime civil. Mais après plus d'une année de démocratie formelle, force est de constater que le pays, n'a avancé qu'en direction de la gabegie, de la déliquescence et partant l'anarchie. Le pouvoir central n'arrive pas à s'imposer aux différentes institutions de la république et aux populations. L'exemple le plus récent, est la prise de position du président de l'assemblée nationale, sur un sujet sensible de politique étrangère. Le train de vie de l'Etat augmente de manière fulgurante, alors que les populations baignent dans la pauvreté.
Le parti ADIL, en dépit de l'espoir de plusieurs forces novatrices qui l'ont ralliées, a pris le même chemin que le PRDS. La confiance entre les dirigeants et le peuple s'effrite. C'est pour cette raison que plusieurs groupes commencent à le quitter. Le gouvernement que vient de former Ould El Waghef, représente un recul pour tous ceux qui veulent une rupture avec la gestion néo-patrimoniale du pouvoir. Face à cette situation gravissime, les parlementaires, les partis politiques, les syndicats, les personnalités et toutes les forces patriotiques, sont interpellés par la nation, pour mettre un terme à la dérive que vit la patrie. Sauvons la Mauritanie.
Cheikhna Ould Nenni
Cheikhna Ould Nenni
SOURCE/ ANI
La définition de Max Weber de ce phénomène, trouve dans les modes de pouvoir (civils et militaires), chez nous un terrain de prédilection.
En effet, les formes de gouvernement se fondent sur la domination personnelle, se ressourçant d'un mélange de traditions et particulièrement de l'arbitraire.
Dans ce mode de gouvernement, il n'y a point de limites entre les sphères publique et privée et partant, la gestion des affaires de l'Etat devient comparable à celle d'une entreprise privée.
Dès son accession à l'indépendance nationale, le 28 novembre 1960, notre jeune Etat a enregistré un net recul démocratique, passant du multipartisme au monopartisme. La révision constitutionnelle de 1965 a fondé le parti unique, qui va constituer l'inauguration du système monolithique, que le règne de feu Mokhtar Ould Daddah va enraciner au plus profond des réflexes et comportements des mauritaniens. A telles enseignes que les militaires qui le déposeront et lui succèderont en quatre temps par des régimes instables ne pourront se démarquer de cette passion et/ou obsession du pouvoir. Car, la personnalisation du pouvoir était devenue une caractéristique intrinsèque de tout homme fort du pays à chaque fois qu'un coup d'Etat ou une révolution de palais lui permettait d'y accéder. Ce pouvoir était si jalousement gardé que seul un départ forcé s'offrait comme solution pour déloger le président en place. A la longue et après des décennies aux commandes, comme ce fut le cas avec feu le président Mokhtar Ould Daddah (1960-1978) ou Maaouiya Ould Sid'Ahmed Taya (1984-2005) et de manière un peu moins soutenue, sans doute faute de temps, sous Mohamed Khouna Ould Haidalla (1979-1984), on assistera à une patrimonialisation du pouvoir qui, au delà de la personne même du Président, maître absolu, se confondait avec ceux qui lui sont proches. Donc trop fort, trop adulé, centre de toutes les décisions, le président, vrai distributeur des grâces qu'il pourrait accorder à tous ceux et toutes celles qui se plieraient devant son leadership et dont la mainmise sur le peuple était totale, imposait un ordre auquel toute la nation devrait se soumettre. Or, de là ce qu'il y'ait une dérive monarchique il n'y a qu'un pouce que les sociétés arabes et africaines affaiblies par leur ségmentarité et vulnérables à la manipulation d'un chef incontesté et magnifié par le clientélisme ambiant, osent aisément franchir. C'est grâce à ce parti unique, véritable Parti-Etat, dirigé par le président de la République, mais aussi grâce à la confusion des pouvoirs qui permet au PPM de se voir reconnaître un rôle de conception et de direction qui lui confère une évidente suprématie sur les institutions de 1'Etat, que les lettres de noblesse du monopartisme seront écrites sous Mokhtar Ould Daddah et seront ainsi conservées après sa chute. Mais autant le monolithisme est d'abord le produit du régime civil (le Parti unique), autant la désagrégation et le délitement de l'Etat, dans des proportions massives, sont venus avec les cabinets militaires successifs. Car l'arrivée des militaires au pouvoir va plonger le pays dans une période d'instabilité d'autant plus remarquable qu'elle fait suite à dix-huit ans de pouvoir personnel ininterrompu. Non seulement l'inexpérience des militaires dans l'exercice du pouvoir livrera le pays à l'affrontement entre les divers clans aux sympathies externes affichées (pro-marocains, pro-algériens, pro-libyens, pro-irakiens, etc.), mais elle le conduira à une évolution politique chaotique, rythmée de coups d'Etat, de révolutions de palais et de tentatives de putsch. Cette instabilité s'étalera sur les treize années que dureront les quatre régimes militaires allant du Comité Militaire de Redressement National (CMRN) au Comité militaire de salut national, qui stabilisera le pouvoir avec Ould Taya.
Après trois décennies de monopartisme et de régimes militaires, et à la faveur des crises intérieures, du discours de la Baule et les changements dans le bloc socialiste ,un multipartisme contrôlé fut institué par la Constitution du 20 juillet 1991. Le système politique né de cette loi fondamentale avait ses limites, parce que n'intégrant point la possibilité d'alternance, ni par des textes et moins dans les pratiques. Mais le boycott des législatives de 1992 par l'Union des Forces Démocratiques(U.F.D), d'Ahmed Ould Daddah et principal parti d'opposition, avait fragilisé davantage toutes les Institutions, déjà affaiblies par leur caractère formel, laissant ainsi la voie libre au Parti Républicain Démocratique et Social(P.R.D.S), pour exercer seul, une mainmise sur la vie politique nationale. Le Parlement et l'ensemble des Institutions issues de la constitution de juillet 1991 devinrent des chambres d'enregistrement du Président de la république et chef du P.R.D.S. La demande de changement de ce système, fut exprimée pacifiquement par des partis politiques, des intellectuels et violemment par des officiers de l'armée (juin 2003).
En effet, face à cette situation aux dangers incalculables pour le pays, le Rassemblement pour la Démocratie et l'Unité (R.D.U) a pris l'initiative de regrouper pour la première fois en avril 2005, depuis le lancement du processus démocratique en 1991, la majorité présidentielle et l'opposition sur la même table ,pour discuter de la situation et trouver une sortie de la crise . Le document final de la rencontre a proposé des réformes importantes, mais leur mise en œuvre dépendait du pouvoir ,qui s'est montré dubitatif. Le système institué à travers la loi fondamentale de juillet 1991, a engendré au niveau du pouvoir le rejet systématique de l'alternance, seul gage d'une vie politique équilibrée et apaisée. Cette situation gravissime pour une démocratie pluraliste, a provoqué chez les acteurs de la vie nationale une demande, du moins naturelle, de changement s'exprimant tantôt pacifiquement et parfois violemment.
Le 3 Août 2005, le pouvoir politique a été renversé par les forces armées et de sécurité, dans l'optique, disent-elles, de mettre en place des institutions démocratiques dignes de ce nom.
Mais l'un des défis majeurs auquel faisait face le Conseil Militaire, résidait dans sa capacité à proposer au peuple un projet convaincant et réalisable durant la période fixée.
Un amendement constitutionnel, limitant les mandats présidentiels à deux, fut voté et des élections plus ou moins libres organisées. Mais pour ne pas travestir l'histoire, il est important de souligner, que n'eut été l'engagement ferme de quelques officiers du Cmjd pour le respect des engagements, on ne serait pas arrivé à un régime civil. Mais après plus d'une année de démocratie formelle, force est de constater que le pays, n'a avancé qu'en direction de la gabegie, de la déliquescence et partant l'anarchie. Le pouvoir central n'arrive pas à s'imposer aux différentes institutions de la république et aux populations. L'exemple le plus récent, est la prise de position du président de l'assemblée nationale, sur un sujet sensible de politique étrangère. Le train de vie de l'Etat augmente de manière fulgurante, alors que les populations baignent dans la pauvreté.
Le parti ADIL, en dépit de l'espoir de plusieurs forces novatrices qui l'ont ralliées, a pris le même chemin que le PRDS. La confiance entre les dirigeants et le peuple s'effrite. C'est pour cette raison que plusieurs groupes commencent à le quitter. Le gouvernement que vient de former Ould El Waghef, représente un recul pour tous ceux qui veulent une rupture avec la gestion néo-patrimoniale du pouvoir. Face à cette situation gravissime, les parlementaires, les partis politiques, les syndicats, les personnalités et toutes les forces patriotiques, sont interpellés par la nation, pour mettre un terme à la dérive que vit la patrie. Sauvons la Mauritanie.
Cheikhna Ould Nenni
Cheikhna Ould Nenni
SOURCE/ ANI