
Ould Abdel Aziz ne veut pas quitter le pouvoir. Ould Cheikh Abdallahi veut recouvrer sa «légitimité», conquise par les militaires puis bafouée par eux. Il veut reprendre le pouvoir. Ould Daddah veut dégager tous les écueils de sa route vers le pouvoir.
Les autres veulent chacun la part qu’il croit lui revenir de droit… Kadhafi arrive à Nouakchott sans visiblement prendre en compte les directives et recommandations du groupe de contact du 20 février dernier. Que peut-on attendre de cette médiation ?
Aujourd’hui, lundi 9 mars, arrive à Nouakchott le colonel Moammar Kadhafi, Guide de la Révolution libyenne, présentement président de l’Union Africaine. Il vient officiellement diriger les prières du Maghrib et du ‘Ichaa, mardi, au stade olympique. Un rite qu’il tente d’instituer depuis quelques années en Afrique noire.
L’occasion pour lui de parader à travers les contrées africaines et d’ancrer sa nouvelle appartenance au continent noir qu’il porte plus et mieux dans son cœur que le monde arabe. C’est là une conséquence directe du comportement des uns et des autres lors des années de mise sous embargo de la Libye.
Médiation et non mandat
Kadhafi qui a vu le groupe de contact de Paris lui confier la mission de supervision d’une intercession entre les protagonistes de la crise mauritanienne. C’est pourquoi sa mission réelle est d’abord de trouver une solution.
Il s’agira pour lui d’amener les différents protagonistes à se retrouver autour d’une feuille de route qui soit la mise en œuvre d’une transition consensuelle, le principe d’une élection présidentielle ayant été retenu par tous.
Dans ses démarches préliminaires, le leader libyen a reçu le Général Mohamed Ould Abdel Aziz, chef de l’Etat, Ahmed Ould Daddah, chef de file de l’opposition, une délégation du FNDD et enfin Sidi Ould Cheikh Abdallahi accompagné d’une grande délégation.
Le Guide a demandé à tous l’aide en vue de trouver une solution «acceptable». Il a averti aussi les uns et les autres qu’ils devront faire des concessions, sans préciser lesquelles. Il est clair cependant que la partie libyenne n’a pas vraiment une vision claire de ce que peut être la solution.
Nous sommes dans un pays dirigé suivant un schéma unique : pas de Constitution, pas de gouvernement à proprement parlé, pouvoir au peuple qui l’exerce directement à travers les congrès populaires…
Un pays dont le Guide est le premier pourfendeur de la démocratie qu’il considère «un produit occidental inadapté aux réalités africaines». Il a d’ailleurs fait des sorties mémorables particulièrement contre l’expérience mauritanienne en 2006-2007. Ceux qui l’arrosent aujourd’hui de beaux discours sont les auteurs de pamphlets inqualifiables dans les colonnes de la presse officielle à ce moment-là.
L’atout de Kadhafi en tant que médiateur, est que la communauté internationale lui a balisé le chemin : il s’agit de construire autour des trois principales propositions de Ould Cheikh Abdallahi, Ould Daddah et Ould Abdel Aziz. De chacune des propositions, le groupe a retenu un ou deux aspects. Jugeant quand même insuffisantes les propositions du HCE.
C’est pourquoi l’essentiel de l’effort du négociateur devraient se porter sur le président du HCE. Soit pour l’amener à accepter le principe de sa non éligibilité – par retrait volontaire de sa candidature. Auquel cas, il faudra se mettre d’accord les parties sur la gestion de l’avant élection et surtout sur le recul de l’échéance pour permettre la mise en place des outils garantissant la participation de tous et l’organisation d’un scrutin crédible et transparent.
Deuxième possibilité : le Général tient à se porter candidat. Auquel cas il faudra faire des concessions en contrepartie. Notamment la mise en place d’un gouvernement de consensus, d’une CENI acceptée, en plus de la démission de toute fonction politique au moins deux mois avant l’échéance. Difficile à envisager parce que le Général est le premier à savoir que sa sortie des rouages de l’Etat ne rassurera pas ses soutiens et compromettra sérieusement son avenir politique.
Ça passe ou ça casse
Il restera alors au Général de foncer tête baissée et de faire fi de toutes les menaces. Extérieures et intérieures. C’est ce qu’il risque de faire visiblement. En attendant, le Général Ould Abdel Aziz tente vainement de parfaire la maîtrise de ses troupes. Ce qui lui est très difficile.
Il doit aussi chercher de l’argent pour le Trésor du pays au moment où les sources tarissent les unes après les autres. Et en même temps assurer la sécurité du pays. Cette gestion personnelle a toujours été le prétexte pour les putschistes pour écarter tel ou tel président. Elle a en tout cas été le point faible des prédécesseurs du Général Ould Abdel Aziz.
Comme pour pallier à toutes les insuffisances dans l’accomplissement de ses desseins politiques, le Général a «inspiré» la création d’un parti politique qui devra le servir. C’est justement cette initiative qui a été à l’origine de la fissure qui semble prendre forme au sein de la majorité des premières heures.
Un groupe de parlementaires, d’anciens ministres et hauts responsables ont jugé utile de faire une démarche dans le sens de créer un parti. «Conscients de l’inanité des partis-Etats et ayant vécu les expériences néfastes du PRDS, puis de ADIL, nous avons décidé de rompre avec cette logique qui veut arrimer un parti à celui qui est au pouvoir», nous explique l’un des promoteurs de l’idée. Pour lui tous les échecs politiques et toute la réussite de la refondation de la démocratie passent par le refus de laisser se constituer un Parti-Etat.
Opinion qui est loin d’être partagée par les soutiens immédiats du Général. Lesquels soutiens tiennent d’une part à avoir un parti qui soit «le parti du Général», et d’autre part à le porter candidat de là où il est pour assurer son élection à l’échéance prochaine.
Cette tendance est dirigée par les députés Sidi Mohamed Ould Maham, Mohamd el Mokhtar Ould Zamel, Mohamed Yahya Ould Kherchi… un alliage de famille et d’alliés qui forment ce qu’on appelle malicieusement «la cellule d’Aoujeft» pour les relations qu’ils ont avec leurs inspirateurs directs : le Général Mohamed Ould Hady (DGSN), le Sénateur Yahya Ould Abdel Qahar, le député Mohamed el Mokhtar Ould Zamel… cousins et proches de l’ancien président Ould Taya et premiers soutiens de Ould Abdel Aziz dans la fronde contre Ould Cheikh Abdallahi.
Le deuxième groupe s’est formé autour des députés Louleid Ould Wedad, Kaba Ould Elewa, Baba Ould Sidi, d’anciens ministres comme Camara Ali Guéladio, Rachid Ould Saleh et d’autres personnalités qui ont pesé jusque-là de leurs poids.
Prémisses de déconfiture ?
Dans un premier temps, ce groupe recevra le feu vert du HCE, à travers son président qui ne fera aucune objection quand les promoteurs lui font part de leur projet, et le secrétaire général du HCE, colonel Ould Baya qui les encouragera plus ou moins. L’essentiel étant que le soutien au HCE et à son chef reste acquis. Et il est justement acquis.
En fait la plus grande ambition des politiques est de créer un nouveau pôle capable de se poser en «pôle-médian» en vue de pouvoir agir, le moment venu, pour rapprocher les points de vue.
Il est vrai que le projet est sous-tendu par une velléité d’indépendance vis-à-vis de cette devanture politique promue par les généraux depuis la fronde contre Ould Cheikh Abdallahi. Et dont justement la promotion est un élément d’une action qui vise leur mise à l’écart au nom du «renouvellement de la classe politique». D’ailleurs le Général ne s’en cachera pas.
Quand il rencontre les 18 sénateurs ayant créé le «groupe des libres», il leur parle des promoteurs de l’initiative comme faisant partie de ce qu’il appelle les «moufsidine» (auteurs de gabegie et de mauvaise gestion). Tout en leur déconseillant de s’associer à eux. Du coup, le malaise s’installe.
Jeudi dernier, le groupe des initiateurs – une dizaine de personnalités environ – est convoqué par le Général. Il veut les dissuader de continuer leur démarche. Ils lui réitèrent ce que quelques-uns lui avaient déjà dit en aparté : l’objectif n’est pas de renier les positions de soutien, mais de créer une formation permettant une meilleure expression de la pluralité politique au sein de la majorité. Ils lui rappelèrent le feu vert préalable et confirmèrent l’impossibilité pour eux de faire marche arrière.
Les arguments politiques n’ébranlèrent en rien la position du Général : il veut un parti où tous ses soutiens se retrouveront nonobstant leurs divergences et même leurs différences d’approches et de visions.
Dès la sortie de la réunion, les pressions commencèrent. Certains ont été nommés à la présidence de conseils d’administration de société lors du dernier conseil des ministres, d’autres ont été menacés. Cela suffira-t-il pour faire plier les principaux inspirateurs ? Difficile à croire quand il s’agit de ceux-là.
Autre préoccupation du Général Ould Abdel Aziz : casser Ahmed Ould Daddah avant même de l’engager dans le processus électoral qu’il entend diligenter. En effet il est maintenant attesté – parce que venant de sources différentes et concordantes – que le Général ne se prive jamais d’ouvrir le dossier de ses relations avec Ould Daddah avec ses invités. Pour lui, Ould Daddah fait partie du passé et si son parti existe encore, c’est parce que lui n’a pas voulu le détruire lors de ses dernières assises.
L’inquiétant dans ces propos, c’est que Ould Daddah a été l’unique grand partenaire du HCE. C’est lui qui l’a aidé à franchir le difficile cap des premières semaines en soutenant la légitimité de son acte du 6 août.
Puis en accompagnant son processus de normalisation. Le statut de chef de file de l’opposition faisant de Ould Daddah la quatrième personnalité politique après le président, les chefs des deux Chambres, y a beaucoup aidé. Se retourner contre lui révèle une inconstance dans les rapports. De quoi inquiéter les politiques.
Visibilité réduite à très réduite
Déjà, l’arrestation sinon les complications auxquelles ont fait face certains des soutiens «indéfectibles», a inquiété plus d’un. On se souvient des déconvenues de Lemrabott Ould Bennahi, ancien directeur de l’ENER, qui en arrivait aux mains pendant les Etats généraux de la démocratie pour défendre la candidature du Général, et qui, au moment où il était à Kiffa pour mobiliser pour le soutien de «son» candidat, était limogé pour une affaire d’achat de voitures. Ahmed Ould Khattri qui a tout fait pour le Général, et qui se trouve actuellement en prison sans raison évidente de mauvaise gestion.
Mohamed Lemine Ould Moulaye Zeine dont le départ de la Wilaya de Nouakchott est volontairement entouré d’un mélimélo obscur, juste pour laisser planer un doute sur ses pratiques. Idoumou Ould Abdi, qui paye pour une malversation commise au développement rural et dont il n’est pas forcément responsable, et qui est limogé avant même les conclusions de l’inspection…
La liste commence à être longue. Il faut peut-être y ajouter toutes les nominations et dénominations jamais expliquées, le règne de la médiocrité qui se renforce et le manque de visibilité qui s’intensifie.
C’est d’autant plus inquiétant qu’on ne voit pas sur qui le Général peut compter pour imposer sa feuille de route. En effet la carence de son appareil est aujourd’hui évidente. On n’en veut pour preuve que l’obligation pour lui d’intervenir à tous les niveaux et à toutes les occasions : c’est lui qui a annulé en personne le dernier mouvement au CSA ; c’est lui en personne qui a «déplacé» Ould Moulaye Zeine lui préférant Sidi Maouloud Ould Brahim, Wali du Brakna au moment de l’assassinat des touristes français à Aleg, premier responsable des insuffisances sécuritaires relevés à l’époque…
Autre preuve de l’insuffisante vision du Général : alors que le pays attend des propositions de sortie de crise, alors qu’il attend la visite – quelque peu inquiétante – de Kadhafi, président de l’UA, le Général a le temps et l’esprit de réunir des parlementaires, des personnalités indépendantes, pour leur demander de «créer un parti au plus vite».
Pour le Général, «il n’y a aucun problème à part l’absence d’un président qui sera élu le 6 juin». Pour lui, «il n’y aura pas de sanctions et tout entrera dans l’ordre dès le lendemain de l’élection». Pas d’opposition intérieure, pas d’autre avis qui compte, pas d’unité de la communauté internationale.
Rien ne peut donc arrêter la machine qui tourne déjà. A plein régime ou à vide ? Parce que le même bruit est produit dans les deux cas, c’est là une question à laquelle il faudra répondre au plus tôt. Au moins avant qu’il ne soit trop tard.
MFO
source : La Tribune
Les autres veulent chacun la part qu’il croit lui revenir de droit… Kadhafi arrive à Nouakchott sans visiblement prendre en compte les directives et recommandations du groupe de contact du 20 février dernier. Que peut-on attendre de cette médiation ?
Aujourd’hui, lundi 9 mars, arrive à Nouakchott le colonel Moammar Kadhafi, Guide de la Révolution libyenne, présentement président de l’Union Africaine. Il vient officiellement diriger les prières du Maghrib et du ‘Ichaa, mardi, au stade olympique. Un rite qu’il tente d’instituer depuis quelques années en Afrique noire.
L’occasion pour lui de parader à travers les contrées africaines et d’ancrer sa nouvelle appartenance au continent noir qu’il porte plus et mieux dans son cœur que le monde arabe. C’est là une conséquence directe du comportement des uns et des autres lors des années de mise sous embargo de la Libye.
Médiation et non mandat
Kadhafi qui a vu le groupe de contact de Paris lui confier la mission de supervision d’une intercession entre les protagonistes de la crise mauritanienne. C’est pourquoi sa mission réelle est d’abord de trouver une solution.
Il s’agira pour lui d’amener les différents protagonistes à se retrouver autour d’une feuille de route qui soit la mise en œuvre d’une transition consensuelle, le principe d’une élection présidentielle ayant été retenu par tous.
Dans ses démarches préliminaires, le leader libyen a reçu le Général Mohamed Ould Abdel Aziz, chef de l’Etat, Ahmed Ould Daddah, chef de file de l’opposition, une délégation du FNDD et enfin Sidi Ould Cheikh Abdallahi accompagné d’une grande délégation.
Le Guide a demandé à tous l’aide en vue de trouver une solution «acceptable». Il a averti aussi les uns et les autres qu’ils devront faire des concessions, sans préciser lesquelles. Il est clair cependant que la partie libyenne n’a pas vraiment une vision claire de ce que peut être la solution.
Nous sommes dans un pays dirigé suivant un schéma unique : pas de Constitution, pas de gouvernement à proprement parlé, pouvoir au peuple qui l’exerce directement à travers les congrès populaires…
Un pays dont le Guide est le premier pourfendeur de la démocratie qu’il considère «un produit occidental inadapté aux réalités africaines». Il a d’ailleurs fait des sorties mémorables particulièrement contre l’expérience mauritanienne en 2006-2007. Ceux qui l’arrosent aujourd’hui de beaux discours sont les auteurs de pamphlets inqualifiables dans les colonnes de la presse officielle à ce moment-là.
L’atout de Kadhafi en tant que médiateur, est que la communauté internationale lui a balisé le chemin : il s’agit de construire autour des trois principales propositions de Ould Cheikh Abdallahi, Ould Daddah et Ould Abdel Aziz. De chacune des propositions, le groupe a retenu un ou deux aspects. Jugeant quand même insuffisantes les propositions du HCE.
C’est pourquoi l’essentiel de l’effort du négociateur devraient se porter sur le président du HCE. Soit pour l’amener à accepter le principe de sa non éligibilité – par retrait volontaire de sa candidature. Auquel cas, il faudra se mettre d’accord les parties sur la gestion de l’avant élection et surtout sur le recul de l’échéance pour permettre la mise en place des outils garantissant la participation de tous et l’organisation d’un scrutin crédible et transparent.
Deuxième possibilité : le Général tient à se porter candidat. Auquel cas il faudra faire des concessions en contrepartie. Notamment la mise en place d’un gouvernement de consensus, d’une CENI acceptée, en plus de la démission de toute fonction politique au moins deux mois avant l’échéance. Difficile à envisager parce que le Général est le premier à savoir que sa sortie des rouages de l’Etat ne rassurera pas ses soutiens et compromettra sérieusement son avenir politique.
Ça passe ou ça casse
Il restera alors au Général de foncer tête baissée et de faire fi de toutes les menaces. Extérieures et intérieures. C’est ce qu’il risque de faire visiblement. En attendant, le Général Ould Abdel Aziz tente vainement de parfaire la maîtrise de ses troupes. Ce qui lui est très difficile.
Il doit aussi chercher de l’argent pour le Trésor du pays au moment où les sources tarissent les unes après les autres. Et en même temps assurer la sécurité du pays. Cette gestion personnelle a toujours été le prétexte pour les putschistes pour écarter tel ou tel président. Elle a en tout cas été le point faible des prédécesseurs du Général Ould Abdel Aziz.
Comme pour pallier à toutes les insuffisances dans l’accomplissement de ses desseins politiques, le Général a «inspiré» la création d’un parti politique qui devra le servir. C’est justement cette initiative qui a été à l’origine de la fissure qui semble prendre forme au sein de la majorité des premières heures.
Un groupe de parlementaires, d’anciens ministres et hauts responsables ont jugé utile de faire une démarche dans le sens de créer un parti. «Conscients de l’inanité des partis-Etats et ayant vécu les expériences néfastes du PRDS, puis de ADIL, nous avons décidé de rompre avec cette logique qui veut arrimer un parti à celui qui est au pouvoir», nous explique l’un des promoteurs de l’idée. Pour lui tous les échecs politiques et toute la réussite de la refondation de la démocratie passent par le refus de laisser se constituer un Parti-Etat.
Opinion qui est loin d’être partagée par les soutiens immédiats du Général. Lesquels soutiens tiennent d’une part à avoir un parti qui soit «le parti du Général», et d’autre part à le porter candidat de là où il est pour assurer son élection à l’échéance prochaine.
Cette tendance est dirigée par les députés Sidi Mohamed Ould Maham, Mohamd el Mokhtar Ould Zamel, Mohamed Yahya Ould Kherchi… un alliage de famille et d’alliés qui forment ce qu’on appelle malicieusement «la cellule d’Aoujeft» pour les relations qu’ils ont avec leurs inspirateurs directs : le Général Mohamed Ould Hady (DGSN), le Sénateur Yahya Ould Abdel Qahar, le député Mohamed el Mokhtar Ould Zamel… cousins et proches de l’ancien président Ould Taya et premiers soutiens de Ould Abdel Aziz dans la fronde contre Ould Cheikh Abdallahi.
Le deuxième groupe s’est formé autour des députés Louleid Ould Wedad, Kaba Ould Elewa, Baba Ould Sidi, d’anciens ministres comme Camara Ali Guéladio, Rachid Ould Saleh et d’autres personnalités qui ont pesé jusque-là de leurs poids.
Prémisses de déconfiture ?
Dans un premier temps, ce groupe recevra le feu vert du HCE, à travers son président qui ne fera aucune objection quand les promoteurs lui font part de leur projet, et le secrétaire général du HCE, colonel Ould Baya qui les encouragera plus ou moins. L’essentiel étant que le soutien au HCE et à son chef reste acquis. Et il est justement acquis.
En fait la plus grande ambition des politiques est de créer un nouveau pôle capable de se poser en «pôle-médian» en vue de pouvoir agir, le moment venu, pour rapprocher les points de vue.
Il est vrai que le projet est sous-tendu par une velléité d’indépendance vis-à-vis de cette devanture politique promue par les généraux depuis la fronde contre Ould Cheikh Abdallahi. Et dont justement la promotion est un élément d’une action qui vise leur mise à l’écart au nom du «renouvellement de la classe politique». D’ailleurs le Général ne s’en cachera pas.
Quand il rencontre les 18 sénateurs ayant créé le «groupe des libres», il leur parle des promoteurs de l’initiative comme faisant partie de ce qu’il appelle les «moufsidine» (auteurs de gabegie et de mauvaise gestion). Tout en leur déconseillant de s’associer à eux. Du coup, le malaise s’installe.
Jeudi dernier, le groupe des initiateurs – une dizaine de personnalités environ – est convoqué par le Général. Il veut les dissuader de continuer leur démarche. Ils lui réitèrent ce que quelques-uns lui avaient déjà dit en aparté : l’objectif n’est pas de renier les positions de soutien, mais de créer une formation permettant une meilleure expression de la pluralité politique au sein de la majorité. Ils lui rappelèrent le feu vert préalable et confirmèrent l’impossibilité pour eux de faire marche arrière.
Les arguments politiques n’ébranlèrent en rien la position du Général : il veut un parti où tous ses soutiens se retrouveront nonobstant leurs divergences et même leurs différences d’approches et de visions.
Dès la sortie de la réunion, les pressions commencèrent. Certains ont été nommés à la présidence de conseils d’administration de société lors du dernier conseil des ministres, d’autres ont été menacés. Cela suffira-t-il pour faire plier les principaux inspirateurs ? Difficile à croire quand il s’agit de ceux-là.
Autre préoccupation du Général Ould Abdel Aziz : casser Ahmed Ould Daddah avant même de l’engager dans le processus électoral qu’il entend diligenter. En effet il est maintenant attesté – parce que venant de sources différentes et concordantes – que le Général ne se prive jamais d’ouvrir le dossier de ses relations avec Ould Daddah avec ses invités. Pour lui, Ould Daddah fait partie du passé et si son parti existe encore, c’est parce que lui n’a pas voulu le détruire lors de ses dernières assises.
L’inquiétant dans ces propos, c’est que Ould Daddah a été l’unique grand partenaire du HCE. C’est lui qui l’a aidé à franchir le difficile cap des premières semaines en soutenant la légitimité de son acte du 6 août.
Puis en accompagnant son processus de normalisation. Le statut de chef de file de l’opposition faisant de Ould Daddah la quatrième personnalité politique après le président, les chefs des deux Chambres, y a beaucoup aidé. Se retourner contre lui révèle une inconstance dans les rapports. De quoi inquiéter les politiques.
Visibilité réduite à très réduite
Déjà, l’arrestation sinon les complications auxquelles ont fait face certains des soutiens «indéfectibles», a inquiété plus d’un. On se souvient des déconvenues de Lemrabott Ould Bennahi, ancien directeur de l’ENER, qui en arrivait aux mains pendant les Etats généraux de la démocratie pour défendre la candidature du Général, et qui, au moment où il était à Kiffa pour mobiliser pour le soutien de «son» candidat, était limogé pour une affaire d’achat de voitures. Ahmed Ould Khattri qui a tout fait pour le Général, et qui se trouve actuellement en prison sans raison évidente de mauvaise gestion.
Mohamed Lemine Ould Moulaye Zeine dont le départ de la Wilaya de Nouakchott est volontairement entouré d’un mélimélo obscur, juste pour laisser planer un doute sur ses pratiques. Idoumou Ould Abdi, qui paye pour une malversation commise au développement rural et dont il n’est pas forcément responsable, et qui est limogé avant même les conclusions de l’inspection…
La liste commence à être longue. Il faut peut-être y ajouter toutes les nominations et dénominations jamais expliquées, le règne de la médiocrité qui se renforce et le manque de visibilité qui s’intensifie.
C’est d’autant plus inquiétant qu’on ne voit pas sur qui le Général peut compter pour imposer sa feuille de route. En effet la carence de son appareil est aujourd’hui évidente. On n’en veut pour preuve que l’obligation pour lui d’intervenir à tous les niveaux et à toutes les occasions : c’est lui qui a annulé en personne le dernier mouvement au CSA ; c’est lui en personne qui a «déplacé» Ould Moulaye Zeine lui préférant Sidi Maouloud Ould Brahim, Wali du Brakna au moment de l’assassinat des touristes français à Aleg, premier responsable des insuffisances sécuritaires relevés à l’époque…
Autre preuve de l’insuffisante vision du Général : alors que le pays attend des propositions de sortie de crise, alors qu’il attend la visite – quelque peu inquiétante – de Kadhafi, président de l’UA, le Général a le temps et l’esprit de réunir des parlementaires, des personnalités indépendantes, pour leur demander de «créer un parti au plus vite».
Pour le Général, «il n’y a aucun problème à part l’absence d’un président qui sera élu le 6 juin». Pour lui, «il n’y aura pas de sanctions et tout entrera dans l’ordre dès le lendemain de l’élection». Pas d’opposition intérieure, pas d’autre avis qui compte, pas d’unité de la communauté internationale.
Rien ne peut donc arrêter la machine qui tourne déjà. A plein régime ou à vide ? Parce que le même bruit est produit dans les deux cas, c’est là une question à laquelle il faudra répondre au plus tôt. Au moins avant qu’il ne soit trop tard.
MFO
source : La Tribune