
Madame Reine ALIPINI GANSOU, commissaire depuis 2005 de la Commission Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples (CADHP) quitte Nouakchott aujourd'hui (17 février 2010) non sans avoir exprimé un peu trop vite, la veille lors d'une conférence de presse, sa satisfaction sur la situation des droits humains en Mauritanie.
SOS DISCRIMINES interprète son empressement à féliciter comme une courtoisie diplomatique après sa réponse positive à l'invitation des autorités mauritaniennes pour une visite guidée du pays.
Car la réalité est toute autre après les tentatives sur la voie d'aboutir d'expropriations dans la vallée de pauvres paysans qui n'ont que leurs lopins de terre pour survivre - le dernier nouveau cas remonté à SOS DISCRIMINES date du 10 février et concerne les environs de Kankossa - le tour est venu aux protégés d'influentes personnes d'expulser de leurs maisons des femmes chefs de famille durant cet hiver particulièrement rude à Nouakchott.
Ne fais pas l'éloge de la nuit avant qu'il ne fasse jour dit un proverbe peuhl. Et en matière de droits humains, il ne fera jamais jour. Même les grandes nations, modèles de démocratie et de liberté, se font épingler. Citons les Etats Unis avec la prison de haute sécurité Guantanamo, la France avec ses camps d'internement des clandestins,...
Alors, est-ce raisonnable d'attribuer une excellente note à un pays qui a encore tout à apprendre sur le respect des droits fondamentaux de la personne ?
Pourtant, ces atteintes à la dignité humaine n'auraient pas échappé à la respectée madame ALIPINI GANSOU, l'ancienne grande militante des droits de la femme au Bénin, si l'encadrement de sa mission avait été moins officiel.
N'importe quel acteur de la société civile mauritanienne, fut-il politisé, l'aurait renseignée sur le vieux cas très médiatisé de madame SY née Youmma Aïssata Ndiaye. Selon l'hebdomaire Le Calame, cette brave femme a été expulsée de sa demeure le 11 février sur ordre du commissaire Mohamed Ould Mokhtar, consigne exécutée manu militari par ses effectifs pléthoriques et surarmés. Les occupants de la maison ont été brutalisés, et certains humiliés. N'eut été sa sœur qui l'a recueillie avec ses enfants, madame SY serait aujourd'hui une sans domicile fixe, sans vêtements ni rien du tout.
Et, le jour même où la CADHP s'envolait pour Addis Abeba, c'est madame FALL née Fatou Gueye, une paisible citoyenne, qui se fait sommer de quitter sa maison, construite par elle et son mari après plusieurs années de labeur, par un autre commissaire de police arrivé selon des sources concordantes sans aucun mandat, accompagné comme son collègue cité plus haut par son impressionnant personnel embarqué dans une Toyota. Fatou découvre sa maison saccagée et certains murs détruits par une personne prétendant être le propriétaire des lieux.
Ne se démarquant pas de son calme - il y a de quoi devenir fou- elle fait obstacle de son corps sans défense face à ces hommes armés, prêts à dégoupiller une grenade pour neutraliser toute personne opposée à l'application des ordres de leur chef. Depuis, la courageuse Fatou refuse de quitter sa villa objet de toutes les convoitises.
Ce dernier acte est comme si les autorités avaient bien reçu l'autorisation de la CADHP à persister dans certaines de leurs erreurs.
En plus, SOS DISCRIMINES, bien que partageant avec la CADHP le constat de la politisation d'une partie de la société civile mauritanienne, ne comprend pas pour autant l'impasse faite sur la détention arbitraire de Hanevi Ould Dehah, le Directeur de Publication du site TAQADOUMY a pourtant fini de purger sa peine depuis le 24 décembre 2009. Est-ce à cause de la présence dans la délégation d'un représentant de la Tunisie, un pays emprisonnant aussi les journalistes? Ou est-ce tout simplement une condition imposée par la Mauritanie ?
L'Union Africaine et ses structures échappent rarement aux pressions des pays membres et un travail colossal est à abattre par les panafricanistes pour doter le continent d'un instrument efficace de prévention et de règlement des conflits.
La CADHP devait être la première à lever les boucliers pour exiger, en même temps que le dépeuplement des prisons africaines, la libération immédiate de Hanevi Ould Dehah et du journaliste tunisien Taoufik Ben Brik.
Notre Union Africaine sera efficace le jour où les africains voteront pour choisir leurs représentants. Le cas échéant, il n'est pas exclu qu'un Biram Ould Abeid soit membre de la CADHP pour son combat contre l'esclavage en Mauritanie, au Soudan, en Inde,...
Madame ALIPINI GANSOU, pas besoin d'aller jusqu'à Moungel pour trouver des esclaves, ils pullulent ici à Nouakchott. Les Hratin sont les plus nombreux, mais ils existent aussi dans les autres composantes des noirs de Mauritanie. Vous ne trouverez plus de marché aux esclaves ou des traces de coup sur les peaux. Non, le système esclavagiste s'adapte rapidement à la législation nationale et internationale pour conserver sa domination, voire l'accentuer en consolidant son assise sur les pouvoirs économique et politique.
Connaissant votre parcours héroïque, vos propos qui sont au bord du négationnisme du fait esclavagiste en Mauritanie sont regrettables. Comment allez-vous gommer de la liste des lauréats du prix Anti Slavery International ces deux mauritaniens :
- 1998 : Pr Cheikh Saad Bouh Camara , ancien Président de l'AMDH
- 2009 : Boubacar Messoud, Président de SOS ESCLAVES
Comment allez-vous justifier le vote en août 2007 d'une loi criminalisant l'esclavage ? Allez-vous recommander son abrogation pour gagner en cohérence ?
Vous risqueriez alors d'être en sérieuse contradiction avec madame Gulnara Shahinian, le rapporteur spécial des Nations Unies qui était ici après avoir supplié les autorités mauritaniennes de la laisser venir faire son travail.
"Cette loi constitue un message clair que l'esclavage ne peut plus être toléré en Mauritanie. De plus, il m'a été rapporté que des cas pendants sont en train d'être instruits en vertu de cette loi" disait-elle.
Si l'union africaine se concertait réellement avec les nations Unies, on aurait su à l'issue de la mission de la CADHP combien de cas ont été instruits par cette loi. N'est-ce pas ?
Madame ALIPINI GANSOU, il serait plus sage de présenter vos excuses aux militants anti esclavagistes et dites le droit depuis Addis Abeba, ainsi vous serez moins gênée par une invitation officielle. Vous êtes une excellente avocate, gardez l'attitude de la femme combattante au Bénin qui vous a valu d'être nommée commissaire de la CADHP en 2005 et ignorez les pressions étatiques.
C'est ce que fit un certain Louis Moreno OCAMPO. Le mandat d'arrêt international qu'il a délivré contre le Président soudanais pour crimes contre l'humanité, c'est la CADHP qui aurait du l'émettre. Si ses textes africains ne lui permettent pas - c'est souvent l'argument pour le statu quo - qu'elle les revoit vite ou se dissolve d'elle-même. En attendant, la CADHP doit éviter de soutenir ses donneurs d'ordre, à savoir les états membres de l'Union Africaine.
Il est vrai que la Mauritanie vient tout juste d'intégrer le Conseil de Paix et de Sécurité de l'union africaine mais il y a d'autres moyens de lui réserver un accueil chaleureux dans cette structure sans remettre en cause la crédibilité de la CADHP.
Nous souhaitons un bon retour à votre délégation tout en espérant une nouvelle visite moins préparée de la Mauritanie.
Nous encourageons aussi les autorités mauritaniennes à multiplier les invitations d'organisations internationales de droits humains, tout en écoutant les appels de la FIDH pour une libération immédiate de Hanevi Ould Dehah et l'arrêt du harcèlement du Président de IRA Mauritanie.
Les Ong internationales crédibles sont le bras prolongé de la société civile mauritanienne. Leur immixtion dans les problèmes de droits humains en Mauritanie est souvent le révélateur d'une rupture du dialogue entre le gouvernement et la vraie société civile débarrassée des associations cartables laudatrices de tout nouveau pouvoir.
Nouakchott le 17 février 2010
Pour Le Bureau Provisoire de SOS DISCRIMINES
Son Président
Ciré KANE
Source: sosdiscrimines-mauritanie
SOS DISCRIMINES interprète son empressement à féliciter comme une courtoisie diplomatique après sa réponse positive à l'invitation des autorités mauritaniennes pour une visite guidée du pays.
Car la réalité est toute autre après les tentatives sur la voie d'aboutir d'expropriations dans la vallée de pauvres paysans qui n'ont que leurs lopins de terre pour survivre - le dernier nouveau cas remonté à SOS DISCRIMINES date du 10 février et concerne les environs de Kankossa - le tour est venu aux protégés d'influentes personnes d'expulser de leurs maisons des femmes chefs de famille durant cet hiver particulièrement rude à Nouakchott.
Ne fais pas l'éloge de la nuit avant qu'il ne fasse jour dit un proverbe peuhl. Et en matière de droits humains, il ne fera jamais jour. Même les grandes nations, modèles de démocratie et de liberté, se font épingler. Citons les Etats Unis avec la prison de haute sécurité Guantanamo, la France avec ses camps d'internement des clandestins,...
Alors, est-ce raisonnable d'attribuer une excellente note à un pays qui a encore tout à apprendre sur le respect des droits fondamentaux de la personne ?
Pourtant, ces atteintes à la dignité humaine n'auraient pas échappé à la respectée madame ALIPINI GANSOU, l'ancienne grande militante des droits de la femme au Bénin, si l'encadrement de sa mission avait été moins officiel.
N'importe quel acteur de la société civile mauritanienne, fut-il politisé, l'aurait renseignée sur le vieux cas très médiatisé de madame SY née Youmma Aïssata Ndiaye. Selon l'hebdomaire Le Calame, cette brave femme a été expulsée de sa demeure le 11 février sur ordre du commissaire Mohamed Ould Mokhtar, consigne exécutée manu militari par ses effectifs pléthoriques et surarmés. Les occupants de la maison ont été brutalisés, et certains humiliés. N'eut été sa sœur qui l'a recueillie avec ses enfants, madame SY serait aujourd'hui une sans domicile fixe, sans vêtements ni rien du tout.
Et, le jour même où la CADHP s'envolait pour Addis Abeba, c'est madame FALL née Fatou Gueye, une paisible citoyenne, qui se fait sommer de quitter sa maison, construite par elle et son mari après plusieurs années de labeur, par un autre commissaire de police arrivé selon des sources concordantes sans aucun mandat, accompagné comme son collègue cité plus haut par son impressionnant personnel embarqué dans une Toyota. Fatou découvre sa maison saccagée et certains murs détruits par une personne prétendant être le propriétaire des lieux.
Ne se démarquant pas de son calme - il y a de quoi devenir fou- elle fait obstacle de son corps sans défense face à ces hommes armés, prêts à dégoupiller une grenade pour neutraliser toute personne opposée à l'application des ordres de leur chef. Depuis, la courageuse Fatou refuse de quitter sa villa objet de toutes les convoitises.
Ce dernier acte est comme si les autorités avaient bien reçu l'autorisation de la CADHP à persister dans certaines de leurs erreurs.
En plus, SOS DISCRIMINES, bien que partageant avec la CADHP le constat de la politisation d'une partie de la société civile mauritanienne, ne comprend pas pour autant l'impasse faite sur la détention arbitraire de Hanevi Ould Dehah, le Directeur de Publication du site TAQADOUMY a pourtant fini de purger sa peine depuis le 24 décembre 2009. Est-ce à cause de la présence dans la délégation d'un représentant de la Tunisie, un pays emprisonnant aussi les journalistes? Ou est-ce tout simplement une condition imposée par la Mauritanie ?
L'Union Africaine et ses structures échappent rarement aux pressions des pays membres et un travail colossal est à abattre par les panafricanistes pour doter le continent d'un instrument efficace de prévention et de règlement des conflits.
La CADHP devait être la première à lever les boucliers pour exiger, en même temps que le dépeuplement des prisons africaines, la libération immédiate de Hanevi Ould Dehah et du journaliste tunisien Taoufik Ben Brik.
Notre Union Africaine sera efficace le jour où les africains voteront pour choisir leurs représentants. Le cas échéant, il n'est pas exclu qu'un Biram Ould Abeid soit membre de la CADHP pour son combat contre l'esclavage en Mauritanie, au Soudan, en Inde,...
Madame ALIPINI GANSOU, pas besoin d'aller jusqu'à Moungel pour trouver des esclaves, ils pullulent ici à Nouakchott. Les Hratin sont les plus nombreux, mais ils existent aussi dans les autres composantes des noirs de Mauritanie. Vous ne trouverez plus de marché aux esclaves ou des traces de coup sur les peaux. Non, le système esclavagiste s'adapte rapidement à la législation nationale et internationale pour conserver sa domination, voire l'accentuer en consolidant son assise sur les pouvoirs économique et politique.
Connaissant votre parcours héroïque, vos propos qui sont au bord du négationnisme du fait esclavagiste en Mauritanie sont regrettables. Comment allez-vous gommer de la liste des lauréats du prix Anti Slavery International ces deux mauritaniens :
- 1998 : Pr Cheikh Saad Bouh Camara , ancien Président de l'AMDH
- 2009 : Boubacar Messoud, Président de SOS ESCLAVES
Comment allez-vous justifier le vote en août 2007 d'une loi criminalisant l'esclavage ? Allez-vous recommander son abrogation pour gagner en cohérence ?
Vous risqueriez alors d'être en sérieuse contradiction avec madame Gulnara Shahinian, le rapporteur spécial des Nations Unies qui était ici après avoir supplié les autorités mauritaniennes de la laisser venir faire son travail.
"Cette loi constitue un message clair que l'esclavage ne peut plus être toléré en Mauritanie. De plus, il m'a été rapporté que des cas pendants sont en train d'être instruits en vertu de cette loi" disait-elle.
Si l'union africaine se concertait réellement avec les nations Unies, on aurait su à l'issue de la mission de la CADHP combien de cas ont été instruits par cette loi. N'est-ce pas ?
Madame ALIPINI GANSOU, il serait plus sage de présenter vos excuses aux militants anti esclavagistes et dites le droit depuis Addis Abeba, ainsi vous serez moins gênée par une invitation officielle. Vous êtes une excellente avocate, gardez l'attitude de la femme combattante au Bénin qui vous a valu d'être nommée commissaire de la CADHP en 2005 et ignorez les pressions étatiques.
C'est ce que fit un certain Louis Moreno OCAMPO. Le mandat d'arrêt international qu'il a délivré contre le Président soudanais pour crimes contre l'humanité, c'est la CADHP qui aurait du l'émettre. Si ses textes africains ne lui permettent pas - c'est souvent l'argument pour le statu quo - qu'elle les revoit vite ou se dissolve d'elle-même. En attendant, la CADHP doit éviter de soutenir ses donneurs d'ordre, à savoir les états membres de l'Union Africaine.
Il est vrai que la Mauritanie vient tout juste d'intégrer le Conseil de Paix et de Sécurité de l'union africaine mais il y a d'autres moyens de lui réserver un accueil chaleureux dans cette structure sans remettre en cause la crédibilité de la CADHP.
Nous souhaitons un bon retour à votre délégation tout en espérant une nouvelle visite moins préparée de la Mauritanie.
Nous encourageons aussi les autorités mauritaniennes à multiplier les invitations d'organisations internationales de droits humains, tout en écoutant les appels de la FIDH pour une libération immédiate de Hanevi Ould Dehah et l'arrêt du harcèlement du Président de IRA Mauritanie.
Les Ong internationales crédibles sont le bras prolongé de la société civile mauritanienne. Leur immixtion dans les problèmes de droits humains en Mauritanie est souvent le révélateur d'une rupture du dialogue entre le gouvernement et la vraie société civile débarrassée des associations cartables laudatrices de tout nouveau pouvoir.
Nouakchott le 17 février 2010
Pour Le Bureau Provisoire de SOS DISCRIMINES
Son Président
Ciré KANE
Source: sosdiscrimines-mauritanie