![Le pouvoir des commerçants: Un secteur puissant. Le pouvoir des commerçants: Un secteur puissant.](https://www.avomm.com/photo/art/default/983320-1227458.jpg?v=1289455161)
Comme au temps des caravanes, le commerce constitue encore aujourd’hui le premier secteur d’activité économique du pays et de loin le plus puissant.
Au marché central de Nouakchott, des vieux, bon pied bon œil, racontent encore des histoires de ces caravanes qui, au Xe siècle déjà, sillonnaient le vaste territoire du pays. Survivance de ce commerce caravanier: la présence dans les rues de la capitale des chameaux et des ânes qui servent encore aujourd’hui pour les échanges commerciaux entre la Mauritanie, les pays voisins (Mali et Sénégal). Certes, les moyens de transport se sont largement modernisés, mais les Mauritaniens, dans leur grande majorité, continuent d’exercer le métier de commerçants tel qu’ils l’on appris de leur grands-parents.
Pour expliquer le penchant du mauritanien pour le commerce, on évoque le poids des traditions. On vous dit tout simplement: «ici, on ne devient pas commerçant, on naît commerçant». À la chambre de commerce, on avance, pour la seule ville de Nouakchott, le chiffre de plus de neuf mille (9.000) opérateurs inscrits au registre de commerce.
Pays enclavé
Mais ce chiffre est loin de représenter la réalité puisqu’il ne prend pas en compte tous les commerçants qui font dans l’informel et dont le poids est estimé, selon certaines évaluations, à 80% de l’activité du secteur commercial. Celui-ci constitue du reste le premier secteur de l’économie mauritanienne. Le plus puissant aussi, si l’on en croit certains analystes de la vie politique mauritanienne qui prêtent au lobby commerçant mauritanien des pouvoirs «occultes» dans les affaires politiques du pays. Sur une frontière longue, on échangeait déjà depuis des siècles.
Actuellement, ce sont toujours le bétail (ovins, bovins, caprins) et les produits agricoles (niébé, oignons, poivrons et blé). À cela s’ajoutent d’autres produits achetés sur le marché international et qui viennent alimenter un commerce, dit de réexportation et de transit, particulièrement lucratif: le tabac, le riz, la farine, le blé, le sucre. La Mauritanie tire le meilleur parti de sa vocation de pays de transit. Et les mauritaniens ont bien du mérite à continuer de perpétuer leurs activités de négoce et à réussir à faire fortune. Ce n’est pas un hasard si les commerçants figurent en bon rang parmi les milliardaires que compte le pays. «Heureusement qu’il nous reste le commerce», affirme un opérateur économique mauritanien pour expliquer l’extraordinaire capacité des mauritaniens à surmonter les difficultés dues à la récession économique et aux «ajustements structurels». Mais cette vision optimiste de la réalité n’est pas partagée par tout le monde. En fait, le secteur commercial dans le pays n’est pas aussi florissant pour tous. Pour certains «gros» du secteur informel, qui passent à travers les mailles des filets des services des douanes ou des impôts, les affaires marchent bien. Sans tenir une comptabilité digne de ce nom, sans créer d’emplois, un commerce ne nécessite pas toujours un personnel nombreux. En prenant le moins de risques possibles sur des créneaux très lucratifs, certains commerçants font très rapidement des profits juteux. La médaille a parfois son revers.
Dans certaines rues de Nouakchott, il n’est pas rare de voir des cimetières de voitures qui témoignent de la faillite récente de certains «professionnels» du marché de l’occasion.
L’informel ne fait pas toujours de prévision.
Zeine Yedali