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Le bureau exécutif de l'AVOMM

"L'important n'est pas ce qu'on fait de nous, mais ce que nous faisons nous-mêmes de ce qu'on a fait de nous." Jean-Paul Sartre

"L'Association d'aides aux veuves et aux orphelins de mauritanie (AVOMM) qui nous rassemble, a été créée le 25/12/95 à PARIS par d'ex-militaires mauritaniens ayant fui la terreur, l'oppression, la barbarie du colonel Mawiya o/ sid'ahmed Taya ......
Ces rescapés des geôles de ould Taya, et de l'arbitraire, décidèrent, pour ne jamais oublier ce qui leur est arrivé, pour garder aussi la mémoire des centaines de martyrs, de venir en aide aux veuves, aux orphelins mais aussi d'engager le combat contre l'impunité décrétée par le pouvoir de Mauritanie."
E-mail : avommavomm@yahoo.fr

Bureau exécutif

*Ousmane SARR, président
*Demba Niang, secrétaire général
*Secrétaire général Adjt; Demba Fall
*Alousseyni SY, Chargé des relations extérieures
*Mme Rougui Dia, trésorière
*Chargé de l’organisation Mariame Diop
*adjoint Ngolo Diarra
*Mme Mireille Hamelin, chargée de la communication
*Chargé de mission Bathily Amadou Birama
Conseillers:
*Kane Harouna
*Hamdou Rabby SY










AVOMM

Pourquoi le vent de la démocratie ne souffle pas au pays de Ould Vall


Pourquoi le vent de la démocratie ne souffle pas au pays de Ould Vall
Notes de lecture : La Mauritanie à l'épreuve du millénaire
Ma foi de «Citoyen » Par Abderrahmane N’Gaïde
L’Harmattan 2006-10-20 142 pages


Ce livre d’Abderrahmane N’Gaïde, assistant au département d’histoire de la Faculté des Lettres et Sciences Humaines de l’Université Cheikh Anta DIOP de Dakar, est un témoignage. Il retrace une tragédie vécue par l’ensemble du peuple mauritanien au milieu des années 1980 et à la fin des années 1990. Malgré l’ouverture démocratique initiée en 1991, la Mauritanie reste traversée par des clivages internes porteurs de signes de troubles. Les acteurs politiques en place, les organisations de la société civile, l’élite intellectuelle ne trouvent pas encore les moyens de les formaliser, afin de permettre, au pays, d’entrer dans le millénaire avec plus de quiétude. Le livre ne dresse pas de bilan, mais tente de faire un tour d’horizon des problèmes qui entravent une réelle ouverture démocratique et une véritable symbiose sociale. Son contenu doit être interprété comme une critique, mais aussi comme une contribution aux débats actuels en Mauritanie et dans la diaspora.

L’avènement du Colonel Ould Taya à la présidence de la République, le 12 Décembre 1984, fut salué par un enthousiasme populaire caractéristique des lendemains de coup d’Etat. Depuis 1978, le coup d’Etat militaire était devenu la voie indiquée et légitime pour accéder au pouvoir en Mauritanie post-coloniale. C’est la démokatie. Dès 1985, une ouverture démocratique doit prendre effet. Cela renforce le poids et la popularité du Colonel, qui réussit, sur le plan extérieur, à apaiser les inquiétudes du Maroc et celles des Occidentaux : la France notamment. Au cours de l’année 1985 des intellectuels négro-mauritaniens rédigent le Manifeste du Négro-mauritanien opprimé, dans lequel ils dénoncent la discrimination raciale érigée en règle entre les communautés négro-mauritanienne et arabo-berbère. Le mouvement est décapité.
L’accomplissement de l’intégration de la Mauritanie au sein de la Umma arabe passe par une assimilation forcée des ethnies négro-africaines à la culture arabe, leur marginalisation progressive des instances administratives, leur déportation vers le Sénégal et/ou par leur extermination pure et simple. Eliminer le Noir devient le seul et unique objectif. La vague de répression continue et frappe aussi l’armée. L’Etat devient un anthropophage. L’Etat anthropophage désigne la face hideuse que peuvent présenter l’autoritarisme, la violence et le déploiement d’une politique morbide dont l’objectif est d’humilier ou tout simplement de faire mourir les citoyens sans aucune forme de procès et sans raison valable. Si tuer peut se justifier. Pour paraphraser l’historien camerounais Achille Mbembe décrivant l’Etat post-colonial (l’Etat mauritanien) a tenu «à dramatiser sa majesté et à s’auto-définir dans le geste même de s’approprier la vie et la mort». (A. Mbembe. De la post-colonie. Essai sur l’imagination politique dans l’Afrique contemporaine. Karthala 2000 P. 159)
En définitive, l’Etat anthropophage est celui qui «s’attaque (à) la diversité humaine en tant qu’elle, ou plutôt, un aspect du «statut d’être humain» sans lequel le mot même «d’humanité» n’aurait plus de sens» (cf Hannah Arendt Eichmann à Jérusalem, Folio Histoire 1998). L’Etat mauritanien indépendant et souverain a revêtu ce masque hideux entre 1986 et 1991. Que l’histoire collective de la Mauritanie ne soit pas seulement le «malheur singulier» des Noirs. C’est toute la communauté nationale qui doit exiger la justice et le pardon de manière à ce que les citoyens d’Inal, de Koboni, de Oualata et Sori Male puissent en communion, se sentir concernés par cette tragédie. Tous les citoyens mauritaniens doivent œuvrer ensemble pour lutter «contre l’oubli qui préserve», pour reprendre une idée de Paul Ricœur (Mémoire, l’histoire, l’oubli.)
La passivité dénote une véritable perversion morale, une incapacité cynique de situer le mal qu’on voit et qu’on confond avec le bien. La passivité, c’est le pouvoir de se cacher derrière la fatalité. La majeure partie des citoyens mauritaniens ont été passifs devant les événements (même les victimes) et continuent malheureusement de l’être. Lutter contre le pouvoir équivaut au suicide comme le dit un adage populaire. Le silence du passif est mortifiant. Une «ouverture démocratique» fut initiée en 1991 sous l’injonction des puissances internationales. En 1992 le Colonel remporte les premières «vraies élections multipartisanes» en Mauritanie. Mais l’opposition crie à la fraude massive et une manifestation organisée à Nouadhibou est réprimée dans le sang (on compte deux morts). Cette ‘démocratie’ réveille, dans la Mauritanie profonde la famille, l’ethnie, le village, la tribu, la tente et la région. Ainsi la démocratie est simulée. Il n’est pas exagéré de soutenir que la majeure partie du peuple mauritanien reste insensible au discours démocratique par manque de compréhension de son influence sur son quotidien. Le Colonel ne parlait pas, il agissait. Depuis vingt ans, les Mauritaniens vivent cette réalité ; Et les élections de 2003 en ont donné une véritable illustration. L’accusation de Haidalla et de son staff démontre à quel point le régime tenait à museler tous ceux qui peuvent lui porter un quelconque ombrage. L’alternance n’a pas eu lieu et la «récréation» politique est terminée en Mauritanie.
L’auteur se pose la question de savoir comment agir et si la différence est le lit de l’espoir. La culture se résumerait à ce possible difficilement avouable : la différence. C’est dans le champ de la différence qu’on rencontre les autres et sur son espace que s’inscrivent les possibilités de convergence, d’échange et de négociation pour le devenir de tous. Elle est aussi cette possibilité d’être sans souci de se préoccuper de la diversité concurrente et aggressante. Elle offense par sa variance, sa furtivité et sa capacité de négocier son être et son devenir dans un monde façonné dans la pluralité. Le ventre attire la culture. La culture accepte le vide ventral. On ne comprend plus qui de l’esprit et du ventre commande. L’essentiel étant ici d’appréhender que l’_expression de la culture est multiple et que les moyens convoqués pour sa présence tolérable, varient. La culture a cela d’insondable. En Mauritanie, les cultures sont en concurrence sur le terrain du désir de visibilité et la violence marque de son sceau leur rencontre.
L’autarcie culturelle tue. Il en est autant de l’absorption de tout sans discernement possible. Les gouvernements ont tenté, par la force des décrets et des lois, d’imposer l’enseignement de la langue et de la culture arabe. Le soupçon et la force de refus prennent leur source dans la volonté de l’Etat d’assimiler les Noirs aux Maures, de les haratiner. Les Haalpular ont été les relais permanents de l’islamisation des païens décrétés et ils ont combattu leurs semblables qui ne voulaient pas de cette parole. Ces derniers redoutaient d’être phagocytés par cette culture qui s’impose par la force et les idiomes. Tous les peuples ont, à un moment donné, causé des torts à d’autres peuples, mais cela ne justifie en rien les souffrances infligées aux Noirs en Mauritanie. Les Haalpular ont pris pour leur compte le sabre du Prophète et le Livre de Dieu. A. N'Gaïde a consacré de longs développements au type d’Etat à bâtir.
Le fédéralisme peut-il garantir l’_expression plurielle et l’épanouissement des cultures dans le respect des normes républicaines. C’est une grande question à laquelle ceux qui pratiquent la politique doivent répondre sans emprunter les chemins de la passion et les raccourcis du sentimentalisme. Le choix de la démocratie (de la démocratisation) est le seul moyen pour accéder à ce qui semble être le but ultime selon A. N'Gaïde. Pour lui, les fondements économiques d’un Etat fédéral, en Mauritanie, ne sont pas réunis.
Les Mauritaniens sont dans le champ de l’inconscient et de l’absurde. Ce champ semble être l’un des piliers de leur existence, malgré toute la vanité qu’il engendre et les malheurs qu’il déclenche. Cette façon de réfléchir permet «d’utiliser», de «manipuler» et de «détourner» l’ensemble de la société de la réalité du moment. (cf M de Certeau, L’invention du quotidien. I Arts de faire Folio 1998). Le gouvernement de transition ou de l’alternance doit, c’est évident, convier tout le monde à la réflexion, à une large concertation et à une sensibilisation de tous les citoyens avant la mise en place d’une nouvelle Constitution, d’un gouvernement légitime (élu) qui prendra les décisions intérieures, l’orientation de l’Etat en fonction de ses intérêts propres et surtout ceux de la nation. Mais l’exemple de l’alternance au Sénégal doit faire réfléchir. Il faut lire à ce propos le livre de Abdou Latif Coulibaly, (WADE un opposant au pouvoir. L’alternance piégée) (Dakar, sentinelles 2003).
Les échos qui parviennent du lointain Kenya ne sont pas très rassurants. Le militantisme est chose sacrée. L’une des solutions consiste à penser au cœur du pays et ne pas concentrer les efforts sur la capitale. Celle-ci est une force symbolique sans faille, mais le monde rural reste la source possible et le domaine à conquérir. A notre avis, il faut déplacer les capitales à l’intérieur des pays. Le peuple a bien compris que beaucoup ne marchent que pour, soit leur seul bien-être et celui de leur parentèle soit pour maintenir vivant ce réseau de clients qui leur permet de reproduire ce système de prébendes. Mieux vaut brouter dans la tranquillité. Le peuple vit dans ce qu’Achille Mbembe appelle «le contexte général de pénurie et de la disette». Le manger prime sur le militantisme réel. Pour persuader le peuple, les opposants doivent mettre en place un programme leur permettant d’agir par le bas. Mais les intellectuels et autres politiciens souffrant dans les bas-fonds de la misère acceptent difficilement de se retourner et continuent de tenter de grimper et de s’agripper à ce train qui file vers les rivages de l’avoir.
L’identité harratine est l’enjeu d’hier à aujourd’hui. Les desseins des communautés négro-mauritaniennes et maures de phagocyter et/ou d’instrumentaliser les Haratins, ne sont plus réalisables dans le contexte actuel. Ce livre est une très riche moisson de réflexion sur la situation politique, économique, sociale et culturelle de la Mauritanie actuelle. Il est écrit dans une belle langue. Mais l’auteur n’esquisse aucun projet de société. Il s’en tient à une analyse phénoménale brillante des faits liés à la situation néocoloniale des pays africains comme savent le faire Achille Mbembe et l’Ecole française de politologues qui gravitent autour de Jean-François Bayart.

Amady Aly DIENG


Dimanche 22 Octobre 2006 - 00:32
Dimanche 22 Octobre 2006 - 00:36
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