Attentat , position de CR

Le 08 Août 2009, pour la première fois dans l’histoire de la Mauritanie, un attentat-suicide est perpétré à Nouakchott. L’acte visait l’Ambassade de France où deux Gendarmes et quelques passants à proximité.

Au-delà de la cible, le drame vient rappeler que la menace terroriste en Mauritanie a franchi une étape qualitative dans son mode opératoire. Ses auteurs, des jeunes étudiants d’écoles coraniques, s’entraînent de plus en plus au-delà des frontières et reviennent réaliser le credo du salafisme.

Dans une précédente mise en garde, au lendemain de l’attaque du poste militaire de Ghallaouia à la fin de décembre 2007, Conscience et Résistance insistait sur la « mise en perspective d’un péril annoncé » et intitulait son avertissement, « Attention, ce n’est que le début ! »

Nous constations alors : « La majorité d’entre eux partage, avec les prosélytes d’inspiration wahhabite, un univers de sens tribal, esclavagiste, discriminatoire et de xénophobie confessionnelle; la mentalité découle, par ignorance et repli sur soi, de certaines écoles d’enseignement religieux en milieu nomade ou enclavé. Des doutes pèsent aussi sur l’efficacité de l’appareil de sécurité et de l’administration territoriale où pullulent des centaines de tortionnaires, jamais inquiétés. La Mauritanie ne dispose pas d’un organisme de protection des touristes ni d’unités anti terreur, encore moins d’une instance de prospective en matière de violence transfrontalière. Enfin, nombre de ses officiers de police, toujours actifs, sont connus pour leur implication dans le transit de la drogue et des immigrants clandestins vers l’Europe.

Sur le registre plus général des mœurs, les étrangers non musulmans reçoivent quelquefois, sur la base du délit de faciès, un accueil hostile, dans certaines régions de l’intérieur d’où la réputation, croissante, d’inhospitalité. Dans le climat général de laisser-aller et d’imprévoyance, nul programme de sensibilisation civique ne vient inciter les gens à la retenue ni leur expliquer les retombées positives de l’empathie envers les visiteurs. »

Aujourd’hui, nous réitérons le caractère endogène de la menace ; elle plonge ses racines aux tréfonds de la mentalité maure et structure un environnement de paix superficielle où perdure, depuis toujours, la vision apocalyptique du monde au sein de quoi toute expression hors de l’islam puritain relève d’une hérésie à éradiquer. L’islamisme intolérant ne relève pas de l’exception à l’anthropologie de l’espace mauritanien. La haine du « mécréant » s’inscrit, naturellement, dans la réalité hebdomadaire du prêche ; le martellement de cette logique manichéenne envahit toute la société et s’expose en pleine rue, par les hauts parleurs, produisant une cacophonie d’anathème et d’appels au Jihad, jusqu’au centre des marchés, dans les taxis et sur les aires de vente de bétail. Aucune régulation ne vient contrecarrer la banalité de ce délire collectif. Faute de prévention, le mal, insidieux, irrigue tous les milieux ; les chaines satellitaires Arabes en amplifient la vitesse de propagation. Le meurtre de soi pour décupler la statistique macabre parmi les «ennemis de Dieu » découle alors de la dynamique du martyr. Nous n’en sommes, aujourd’hui, qu’au balbutiement de ce volontarisme sanglant.

Conscience et Résistance, association à caractère politique en vertu de son ancrage séculier et non violent:

- Invite les autorités de la République Islamique de Mauritanie à reprendre le contrôle de l’espace public, pour y garantir le pluralisme, à l’abri du monopole religieux et de l’appel au meurtre ;

- Réclame une nouvelle orientation de l’enseignement secondaire et supérieur afin de réhabiliter l’ouverture sur le monde, la philosophie, la tolérance, les droits fondamentaux de la personne et la sacralité de la vie.

- Engage la communauté internationale à éviter l’instrumentalisation de la lutte contre le terrorisme en Mauritanie qui encouragerait la confiscation du pouvoir, la dissolution d’un parti ou la restauration de la torture.


Conscience et Résistance
Nouakchott, le 10 août 2009