
Biladi : Le FLERE (Front de lutte contre le racisme, l’esclavage et l’exclusion en Mauritanie) vient de naître. Ceux qui souhaitaient une jonction entre des harratines et negro-mauritaniens, ont atteint leur objectif n’est-ce pas?
Birane Dah Abeïd (B.D.A) : Je tiens à apporter une nuance dans les propos de votre question. Tout d’abord il ne s’agit en aucun cas d’une jonction entre les H’ratine et les Négro-africains, ce n’est pas ma vision des choses. Et ce que je peux espérer, c’est une jonction entre tous les justes. Il importe donc de sortir de ce cliché, de ce fantasme entretenu et conforté par nos adversaires. Aussi, je tiens à dire qu’il est du devoir déontologique d’une certaine presse mauritanienne d’éviter la caricature, les raccourcis qui consistent à présenter nos actions comme un front contre nos concitoyens arabo-berbére (beydhane). L’histoire de notre pays est empreinte d’un système politique par lequel une minorité arabophone n’a pas accepté la diversité ethnique et culturelle de la Mauritanie dans son projet politique. C’est contre cette minorité là et le système de domination qu’elle a entretenu que nous nous battons de façon active et il ne s’agit pas d’y faire face seulement dans la passivité. L’objectif, par ailleurs étant la revendication d’une justice sociale pour toutes les composantes de la Mauritanie quelques soient leurs origines.
Biladi : Quelle sera votre stratégie de lutte contre les maux que vous dénoncez? Le droit? Et si cela ne fonctionne, qu’allez-vous quels sont les moyens que vous envisagiez de mettre en œuvre?
B.D.A : Là aussi, il est essentiel de préciser une fois de plus ma pensée, car à mes amis et moi, certains milieux nous prêtent une image qui est en contradiction avec ce que nous pensons pour la Mauritanie. Notre engagement n’est pas communautaire et il ne le sera pas, quand bien même que nous pensons que tout combat ayant pour ressorts idéologiques le communautarisme est illusoire, voué à l’échec et est sans lendemain pour la Mauritanie. Le communautarisme n’est pas une réponse aux problèmes de notre pays. A cet effet, il importe de souligner que nos moyens de combats s’inscrivent dans les canaux de la légalité nationale et internationale loin de la violence physique qu’on nous prête à tort de vouloir mettre en œuvre. Nous revendiquons une certaine radicalité pour rompre avec la complaisance et la compromission. C’est pour cela que nos adversaires nous dépeints sous l’image de communautaristes et autres attributs qui y sont subséquents. Sur un plan juridique, l’Etat de droit en Mauritanie est à construire et personne ne conteste ce besoin d’Etat qui se fait sentir à tous les niveaux. Son corpus juridictionnel n’apporte pas de réponses à la question de l’Esclavage, au passif et actif lourds de la Ségrégation raciale et de l’Exclusion. Il importe pour nous de se battre aussi sur ce terrain qui, selon nous a besoin d’une refondation complète.
Biladi : L’ensemble de composantes ethniques ne doivent-elles pas être tenues pour responsables en ce qui concerne l’exclusion que vous dénoncez. Après tout des pans entiers de différentes communautés du pays ont soutenu le putsch du 6 août, dénoncé par certains intellectuels comme un coup d’Etat raciste qui vise à contrecarrer le changement ?
B.D.A : Une fois de plus vos propos méritent des rectifications. Loin de moi de se poser en donneur de leçon aux journalistes et aux médias, mais je suis toujours surpris du niveau extrêmement bas dans lequel vous situez nos actions. Il y a une réalité incontestable dans ce pays : la domination politique, économique et sociale de nos concitoyens beydanes comme vous dites est une réalité, elle n’est pas une vision simpliste de l’esprit ! Aussi, il n’échappe à personne l’agencement sociologique qui détermine en dernière instance le pouvoir politique et ses tenants en Mauritanie du fait justement de la prégnance des repères culturels dans les rôles politiques de tout mauritanien. En cela toutes les communautés en présence dans notre pays sont réfractaires à tout ce qui heurte l’agencement de leurs structures sociales avec des différences ici et là. Mais cela ne doit pas être une justification pour s’accommoder de réalités sociales qui réduisent l’individu à l’état animal. La présence de certains de nos concitoyens toutes communautés confondues au sein du système de domination s’inscrit dans une posture qui consiste à préserver des privilèges acquis par la promotion de la médiocrité. Ils en deviennent les otages et les instruments à la fois en ce sens que leurs rôles et leurs poids sont nuls. Cela ne date pas du régime issu du coup d’Etat du 6 Août, disons que les auteurs de ce coup, se sont accommodés de stratégies expérimentées et mises en œuvre par leurs prédécesseurs dont ils sont d’ailleurs le produit fini…
Biladi : Vous êtes opposés «par principe aux coups d’Etats» mais vous n’avez pris part aux manifestations qui suivirent le putsch du 6 août 2008, parce que «le régime de Sidi vous a donné beaucoup de fil à retordre» en ce qui concerne le combat contre l’esclavage. Ne regrettez vous pas cela. Après tout sous le magistère de Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdellahi, la Mauritanie a adopté une loi criminalisant l’esclavage, tandis que le régime qui se dit issu du putsch qui l’a renversé a tout simplement enterré cette question?
B.D.A : C’est votre interprétation et je vous en laisse la liberté ! Mon opposition au Coup d’Etat du 6 Août 2008 n’a pas été naturellement médiatisée comme celle d’autres personnes dont le poids politique est supérieur au mien je l’avoue. Cependant, je tiens à souligner que je n’ai pas accepté d’être l’instrument de certains milieux autour du FNDD et cela je l’assume. Ceci étant, je tiens à préciser tout de même qu’au vu et au su de tous, j’ai refusé de marcher avec le putsch malgré les sollicitations et les avances de ses dirigeants, cela doit vous prouver qu’il n’ya pas accointance entre le pouvoir et moi en termes de dividendes…Mon engagement ne peut faire l’objet d’un marchandage quelqu’en soit la nature…En ce qui concerne la loi criminalisant l’esclavage en Mauritanie on ne peut que la saluer, mais en tant que conquête historique et de haute lutte du mouvement abolitionniste et surtout de son dirigeant et symbole le président Messaoud Ould Boulkheïr. Par contre, je reproche au président Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi comme à son successeur, qu’adopter une loi contre l’esclavage ne suffit pas à son éradication, il faut l’appliquer. D’ailleurs cette loi comme les précédentes souffrent de leur non application, la faute à une administration complice, à un pouvoir frileux et un manque de volonté politique certaine. Le fait que le régime issu du coup d’Etat ait enterré cette loi en est la preuve s’il en fallait une !
Propos recueillis par Samba Camara
Source: Biladi
Birane Dah Abeïd (B.D.A) : Je tiens à apporter une nuance dans les propos de votre question. Tout d’abord il ne s’agit en aucun cas d’une jonction entre les H’ratine et les Négro-africains, ce n’est pas ma vision des choses. Et ce que je peux espérer, c’est une jonction entre tous les justes. Il importe donc de sortir de ce cliché, de ce fantasme entretenu et conforté par nos adversaires. Aussi, je tiens à dire qu’il est du devoir déontologique d’une certaine presse mauritanienne d’éviter la caricature, les raccourcis qui consistent à présenter nos actions comme un front contre nos concitoyens arabo-berbére (beydhane). L’histoire de notre pays est empreinte d’un système politique par lequel une minorité arabophone n’a pas accepté la diversité ethnique et culturelle de la Mauritanie dans son projet politique. C’est contre cette minorité là et le système de domination qu’elle a entretenu que nous nous battons de façon active et il ne s’agit pas d’y faire face seulement dans la passivité. L’objectif, par ailleurs étant la revendication d’une justice sociale pour toutes les composantes de la Mauritanie quelques soient leurs origines.
Biladi : Quelle sera votre stratégie de lutte contre les maux que vous dénoncez? Le droit? Et si cela ne fonctionne, qu’allez-vous quels sont les moyens que vous envisagiez de mettre en œuvre?
B.D.A : Là aussi, il est essentiel de préciser une fois de plus ma pensée, car à mes amis et moi, certains milieux nous prêtent une image qui est en contradiction avec ce que nous pensons pour la Mauritanie. Notre engagement n’est pas communautaire et il ne le sera pas, quand bien même que nous pensons que tout combat ayant pour ressorts idéologiques le communautarisme est illusoire, voué à l’échec et est sans lendemain pour la Mauritanie. Le communautarisme n’est pas une réponse aux problèmes de notre pays. A cet effet, il importe de souligner que nos moyens de combats s’inscrivent dans les canaux de la légalité nationale et internationale loin de la violence physique qu’on nous prête à tort de vouloir mettre en œuvre. Nous revendiquons une certaine radicalité pour rompre avec la complaisance et la compromission. C’est pour cela que nos adversaires nous dépeints sous l’image de communautaristes et autres attributs qui y sont subséquents. Sur un plan juridique, l’Etat de droit en Mauritanie est à construire et personne ne conteste ce besoin d’Etat qui se fait sentir à tous les niveaux. Son corpus juridictionnel n’apporte pas de réponses à la question de l’Esclavage, au passif et actif lourds de la Ségrégation raciale et de l’Exclusion. Il importe pour nous de se battre aussi sur ce terrain qui, selon nous a besoin d’une refondation complète.
Biladi : L’ensemble de composantes ethniques ne doivent-elles pas être tenues pour responsables en ce qui concerne l’exclusion que vous dénoncez. Après tout des pans entiers de différentes communautés du pays ont soutenu le putsch du 6 août, dénoncé par certains intellectuels comme un coup d’Etat raciste qui vise à contrecarrer le changement ?
B.D.A : Une fois de plus vos propos méritent des rectifications. Loin de moi de se poser en donneur de leçon aux journalistes et aux médias, mais je suis toujours surpris du niveau extrêmement bas dans lequel vous situez nos actions. Il y a une réalité incontestable dans ce pays : la domination politique, économique et sociale de nos concitoyens beydanes comme vous dites est une réalité, elle n’est pas une vision simpliste de l’esprit ! Aussi, il n’échappe à personne l’agencement sociologique qui détermine en dernière instance le pouvoir politique et ses tenants en Mauritanie du fait justement de la prégnance des repères culturels dans les rôles politiques de tout mauritanien. En cela toutes les communautés en présence dans notre pays sont réfractaires à tout ce qui heurte l’agencement de leurs structures sociales avec des différences ici et là. Mais cela ne doit pas être une justification pour s’accommoder de réalités sociales qui réduisent l’individu à l’état animal. La présence de certains de nos concitoyens toutes communautés confondues au sein du système de domination s’inscrit dans une posture qui consiste à préserver des privilèges acquis par la promotion de la médiocrité. Ils en deviennent les otages et les instruments à la fois en ce sens que leurs rôles et leurs poids sont nuls. Cela ne date pas du régime issu du coup d’Etat du 6 Août, disons que les auteurs de ce coup, se sont accommodés de stratégies expérimentées et mises en œuvre par leurs prédécesseurs dont ils sont d’ailleurs le produit fini…
Biladi : Vous êtes opposés «par principe aux coups d’Etats» mais vous n’avez pris part aux manifestations qui suivirent le putsch du 6 août 2008, parce que «le régime de Sidi vous a donné beaucoup de fil à retordre» en ce qui concerne le combat contre l’esclavage. Ne regrettez vous pas cela. Après tout sous le magistère de Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdellahi, la Mauritanie a adopté une loi criminalisant l’esclavage, tandis que le régime qui se dit issu du putsch qui l’a renversé a tout simplement enterré cette question?
B.D.A : C’est votre interprétation et je vous en laisse la liberté ! Mon opposition au Coup d’Etat du 6 Août 2008 n’a pas été naturellement médiatisée comme celle d’autres personnes dont le poids politique est supérieur au mien je l’avoue. Cependant, je tiens à souligner que je n’ai pas accepté d’être l’instrument de certains milieux autour du FNDD et cela je l’assume. Ceci étant, je tiens à préciser tout de même qu’au vu et au su de tous, j’ai refusé de marcher avec le putsch malgré les sollicitations et les avances de ses dirigeants, cela doit vous prouver qu’il n’ya pas accointance entre le pouvoir et moi en termes de dividendes…Mon engagement ne peut faire l’objet d’un marchandage quelqu’en soit la nature…En ce qui concerne la loi criminalisant l’esclavage en Mauritanie on ne peut que la saluer, mais en tant que conquête historique et de haute lutte du mouvement abolitionniste et surtout de son dirigeant et symbole le président Messaoud Ould Boulkheïr. Par contre, je reproche au président Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi comme à son successeur, qu’adopter une loi contre l’esclavage ne suffit pas à son éradication, il faut l’appliquer. D’ailleurs cette loi comme les précédentes souffrent de leur non application, la faute à une administration complice, à un pouvoir frileux et un manque de volonté politique certaine. Le fait que le régime issu du coup d’Etat ait enterré cette loi en est la preuve s’il en fallait une !
Propos recueillis par Samba Camara
Source: Biladi