
Dans un communiqué diffusé hier, le Collectif de défense des opposants au Coup d'Etat détenus dans le cadre du prétendu dossier "Air Mauritanie", dénonce des irrégularités flagrantes dans le traitement de ce dossier mettant en exergue sa vraie nature qui se réduit à une opération de règlement de compte pure et simple, très loin de toute procédure judiciaire digne de ce nom.
En effet, le Collectif démontre que les prévenus ont été arrêtés et livrés à la vindicte populaire et au lynchage médiatique le 20-11-2008 alors que leur dossier n'avait été réceptionné par le Juge d'Instruction que le 25-11-2008, soit cinq jours après!
De quels mandat d'arrêt disposaient donc les policiers qui avaient opéré l'arrestation des prévenus? Le pouvoir exécutif pourrait-il passer autre l'autorisation de la Justice pour mettre des citoyens en prison? Il est donc clair que la nature judiciaire de cette affaire reste à démontrer. Il ne s'agit donc que d'une opération de règlement de compte politique se déroulant de façon absolument extrajudiciaire et illégale et commanditée par un Général limogé qui n'a cure des procédures et autres considérations liées à l'Etat de droit.
N'avait-il pas di,t récemment, dans un élan de délicatesse et de bienséance qui lui sont propres, qu'il libérerait le Premier Ministre si ce dernier acceptait de manger un bol de riz avarié! Il peut donc libérer des prisonniers et emprisonner des citoyens libres sans s'encombrer de l'arsenal judiciaire. L'exécutif, le législatif et maintenant le judiciaire incarnés par la même homme, le Général limogé, Mohamed Ould Abdel Aziz, qui, cerise sur le gâteau, veut résoudre tous les problèmes des Mauritaniens...Si Aziz n'existait pas, quelqu'un l'aurait bien inventé!
Le Collectif a rappelé la règle de la présomption d'innocence qui voudrait qu'un accusé reste innocent tant qu'il n'a pas été jugé coupable. Il précise que si le fonctionnement de la justice était normal, l'établissement de l'innocence de ses clients aurait été d'une facilité déconcertante. Il se trouve que nous sommes loin d'un fonctionnement normal et que nous sommes en face d'une opération de règlement de compte dont le but est d'affaiblir des adversaires politiques de façon complètement déloyale. Mais pourrait-on s'attendre à mieux d'un Général qui érige la félonie en mode de fonctionnement mental?
Collectif des Avocats de la Défense (Dossier N°1103/RP/08) : COMMUNIQUE DE PRESSE
Le Collectif des Avocats de la Défense dans le dossier N°1103/RP/08 communément connu sous le nom dossier Air Mauritanie, dans l’exercice de son droit à la défense et pour une information juste de l’opinion, se trouve dans l’obligation d’émettre certaines observations relativement à la campagne médiatique qui vise les personnes objet de ce dossier. Cette campagne médiatique se traduit par :
- l’immixtion du pouvoir exécutif qui annonce déjà la culpabilité des personnes poursuivies dans ce dossier, en violation de la présomption d’innocence et du principe de la séparation des pouvoirs, garantis tous les deux par la Constitution dans ses articles 13, 89, 90, 91… et ignorant à ce titre l’obligation de garantir ces principes ainsi que les institutions républicaines. Les droits de la défense se trouvent, en conséquence, atteints dans la mesure où l’exécutif tente de faire croire à l’opinion que les personnes poursuivies sont coupables, alors même que l’instruction, qui est en principe à charge et à décharge, est en cours ;
- la volonté absolue de l’Exécutif de restreindre ou non les libertés, exprimée en public et par les médias officiels par celui qui doit en être le garant, réduit ainsi à néant l’indépendance de la Justice et jette un doute, au moins dans l’esprit des observateurs, sur l’éventualité d’un procès juste et équitable dans lequel les garanties d’indépendance, de neutralité de la Justice sont respectées… ;
- les accusations abusives portées dans ce dossier ne sont pas fondées et l’illustration en est que le juge d’instruction n’a reçu les pièces du dossier que le 25/11/2008 ; cependant, le dépôt des personnes poursuivies, ordonné par le juge d’instruction le 20/11/2008, s’est fait uniquement sur demande du Parquet en violation des conditions légales prévues par l’article 138 du Code de procédure pénale.
- En plus, l’instruction prouvera, sans nul doute, que les auteurs réels de la faillite regrettable de Air/Mauritanie ne sont pas actuellement concernés par la procédure en cour et que la Justice ainsi que l’opinion finiront rapidement par découvrir les vrais responsables.
Partant de ces considérations, le Collectif de la défense attire l’attention de l’opinion :
- d’abord sur l’innocence des personnes poursuivies ;
- sur leur attachement à leur droit naturel et absolu à un procès juste et équitable conforme aux critères retenus par les Conventions internationales et la Constitution de la République ;
Le collectif exprime, ensuite, sa condamnation ferme de toute immixtion, quelle que soit sa nature, de l’Exécutif dans le bon fonctionnement de la justice.
Enfin, il exige de toutes les autorités concernées une attitude de neutralité, et de s’abstenir de toute action de nature à influencer le cours de la justice ou affecter les droits de la défense.
Fait à Nouakchott, le 27/11/2008 Le Collectif de Défense
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