
Mais où sont mes « amis » ?
Triste est mon sort ! Triste est la réalité ! Triste est cette situation ! Je me demande où sont passés mes « amis » alors que je sombre dans Djinthiou (ancien lit majeur du fleuve Sénégal, qui sépare Boghé-Dow de Boghé-Escale. Je suis né au bord de Djinthiou avec tout le symbolisme que revêt cet «acte de naissance») gorgé de l’eau de crue. Où sont-ils ? Ils voulaient changer les choses. J’ai toujours eu une confiance religieuse en l’amitié ou point de passer trop naïf. J’ai toujours cette main tendue, malgré la longue attente. Mais ces mois-ci, je me suis retrouvé tout seul pataugeant dans les eaux boueuses de Djinthiou avec des mourmouti (têtards). Ils étaient en train de me grignoter et mes amis sur la rive m’sarmkin (faisant sourde oreille en hassanya). Ils se dérobent toujours quand il s’agit de « moi ». Quand je cris, ils ne m’entendent pas et pensent peut être que je joue à la comédie. Mais cette comédie humaine à laquelle ils jouent ne me chagrine point, elle me rouvre les yeux encore et encore. Quand je suis désemparé ils s’empressent de partir au loin pour ne point entendre mes complaintes quotidiennes.
Où sont mes « amis » ?
Ma situation, ma réelle situation ne les interpellent pas. J’ai même l’impression qu’ils se frottent les mains à chaque fois qu’ils constatent que je suis empêtré dans la boue de Djinthiou au milieu de ces têtards qui raffolent de chair humaine. Je ne les nomme pas mes amis, ils se reconnaîtront dans ma complainte permanente, ma complainte pressante. Celle qui les somme à agir. Celle qui les interroge sur leur propre humanité. Celle qui les dérange sans les déranger. Celle qui les interpelle sans les interpeler. Je ne leur demande plus de m’aider directement à m’en sortir, mais de faire le constat devant la continuelle mutation de ces mourmouti, pour l’histoire. Qu’ils ne disent pas qu’ils n’ont rien vu et qu’ils n’ont rien entendu. Ce constat peut me soulager, me rendre le sourire et croire enfin qu’il m’est possible de surmonter le calvaire que je vis (à l’instant) dans les eaux boueuses de Djinthiou.
Où sont-ils mes « amis » ?
Question énigmatique à laquelle je n’ai réponse. Mais quand les eaux boueuses de Djinthiou se retireront ce n’est point mon cadavre qu’ils découvriront mais la force avec laquelle je n’ai jamais cessé de conjuguer pour résister à l’adversité. Je ne tituberais point, mais marcherais vers eux intrépide comme jamais, comme un revenant. Se confondront-ils en émerveillements ou en regrets qu’à cela ne tienne, mais ils ne pourront jamais opposer une force à ma bourrasque. Comme Ulysse, je reviendrais après avoir défié les Dieux des mers.
Où sont mes « amis » ?
Quand brûlera le feu de l’ultime résistance ils se plieront racornis par les flammes de ma liberté arrachée. A cet instant ils périront sans leurs armes habituelles de la dissimulation et du double langage. Ils ne pourront rien contre ma révolte née de l’insurrection généralisée.
Où sont mes « amis » ?
Pour me rendre l’espoir, je fais mien le vers tendre et tranchant de Holderlin : « Là où croît le péril, croît aussi ce qui sauve ». Jamais je n’insulterais l’à-venir.
Abderrahmane NGAÏDE (Bassel)
Dakar, le 24/07/2011
Source: A. NGaïde
Triste est mon sort ! Triste est la réalité ! Triste est cette situation ! Je me demande où sont passés mes « amis » alors que je sombre dans Djinthiou (ancien lit majeur du fleuve Sénégal, qui sépare Boghé-Dow de Boghé-Escale. Je suis né au bord de Djinthiou avec tout le symbolisme que revêt cet «acte de naissance») gorgé de l’eau de crue. Où sont-ils ? Ils voulaient changer les choses. J’ai toujours eu une confiance religieuse en l’amitié ou point de passer trop naïf. J’ai toujours cette main tendue, malgré la longue attente. Mais ces mois-ci, je me suis retrouvé tout seul pataugeant dans les eaux boueuses de Djinthiou avec des mourmouti (têtards). Ils étaient en train de me grignoter et mes amis sur la rive m’sarmkin (faisant sourde oreille en hassanya). Ils se dérobent toujours quand il s’agit de « moi ». Quand je cris, ils ne m’entendent pas et pensent peut être que je joue à la comédie. Mais cette comédie humaine à laquelle ils jouent ne me chagrine point, elle me rouvre les yeux encore et encore. Quand je suis désemparé ils s’empressent de partir au loin pour ne point entendre mes complaintes quotidiennes.
Où sont mes « amis » ?
Ma situation, ma réelle situation ne les interpellent pas. J’ai même l’impression qu’ils se frottent les mains à chaque fois qu’ils constatent que je suis empêtré dans la boue de Djinthiou au milieu de ces têtards qui raffolent de chair humaine. Je ne les nomme pas mes amis, ils se reconnaîtront dans ma complainte permanente, ma complainte pressante. Celle qui les somme à agir. Celle qui les interroge sur leur propre humanité. Celle qui les dérange sans les déranger. Celle qui les interpelle sans les interpeler. Je ne leur demande plus de m’aider directement à m’en sortir, mais de faire le constat devant la continuelle mutation de ces mourmouti, pour l’histoire. Qu’ils ne disent pas qu’ils n’ont rien vu et qu’ils n’ont rien entendu. Ce constat peut me soulager, me rendre le sourire et croire enfin qu’il m’est possible de surmonter le calvaire que je vis (à l’instant) dans les eaux boueuses de Djinthiou.
Où sont-ils mes « amis » ?
Question énigmatique à laquelle je n’ai réponse. Mais quand les eaux boueuses de Djinthiou se retireront ce n’est point mon cadavre qu’ils découvriront mais la force avec laquelle je n’ai jamais cessé de conjuguer pour résister à l’adversité. Je ne tituberais point, mais marcherais vers eux intrépide comme jamais, comme un revenant. Se confondront-ils en émerveillements ou en regrets qu’à cela ne tienne, mais ils ne pourront jamais opposer une force à ma bourrasque. Comme Ulysse, je reviendrais après avoir défié les Dieux des mers.
Où sont mes « amis » ?
Quand brûlera le feu de l’ultime résistance ils se plieront racornis par les flammes de ma liberté arrachée. A cet instant ils périront sans leurs armes habituelles de la dissimulation et du double langage. Ils ne pourront rien contre ma révolte née de l’insurrection généralisée.
Où sont mes « amis » ?
Pour me rendre l’espoir, je fais mien le vers tendre et tranchant de Holderlin : « Là où croît le péril, croît aussi ce qui sauve ». Jamais je n’insulterais l’à-venir.
Abderrahmane NGAÏDE (Bassel)
Dakar, le 24/07/2011
Source: A. NGaïde