
Le Conseil des ministres a décidé d’organiser les prochaines élections le 6 juin. La date est discutable. Pas qu’on ne s’y attendait pas, mais parce que cela ressemble à une réponse à la sortie de l’ancien président. Lequel, renversé en le 6 août dernier, dit tenir à son fauteuil.
Mieux : « Je ferai tout pour faire échouer ce coup d’état », a-t-il martelé lors d’une interview accordée à la correspondante de Rfi à Nouakchott. Une preuve que de l’espoir il en a encore. Même s’il a du rebrousser chemin, sous la contrainte, vers son village de Lemden après que des autorités de la police aient stoppé à Ouad Naga le cortège qui devait le faire entrer en grande pompe à Nouakchott.
Sans baisser les bras, ses amis ont tenu, eux, à exprimer ce qui les tenait à cœur. Et montrer ce qui fait l’objet de toute leur colère : « L’homme qu’on a empêché d’arriver ici pour vous parler, dit le président de l’Assemblée Nationale, Messaoud Ould Boulkheir, et membre du Front National pour la Démocratie et le Développement, FNDD, est bien et le seul président qu’il vaille soutenir.
C’est lui le président élu, et c’est à lui que nous devons nous identifier. Autrement dit, nous ne reconnaîtrons jamais ni le général Mohamed Ould Abdel Aziz, ni ses sujets. Sidi doit revenir à son fauteuil ».
Côté gouvernement, c’est une autre fin de non-recevoir cinglante qui siffle dans le brouillard de la capitale happée par des jours de poussière et de froid : « Il est hors de question, nous disait la semaine dernière Mohamed El Mokhtar Ould Zamel, député d’Aoujeft, que nous acceptions qu’on nous impose le retour d’un homme décrié et dont le peuple ne veut plus à cause de sa mauvaise gestion et de ses positions partisanes sur plein de choses ».
Dans le Face à… le député était allé jusqu’à dire qu’il trouvait incompréhensible l’attitude « de certains de nos compatriotes, responsables qui bénéficiaient de beaucoup de respect, qui se lancent dans des diatribes et condamnations contre leur propre peuple. Il s’agit de certains leaders du FNDD, qui savent pertinemment que les sanctions ont toujours touché le petit peuple. […]
Et l’homme de la situation c’est le général Mohamed Ould Abdel Aziz. Parce qu’il a décidé de s’attaquer à la lutte contre la gabegie, le régionalisme, le racisme, le népotisme qui sont les vrais maux du pays ».
On le voit, les propos sont tranchés d’un bord comme de l’autre. Mais dans cette lutte, à coup de dénigrements de toutes sortes jusque chez les meilleurs amis d’hier, on a l’impression que tout se joue hors du plan avenir de la Mauritanie. Peu de lisibilité sur ce qui pourrait déterminer l’avenir des générations futures.
Le regrettable : « Notre classe politique, dit cet universitaire, ne pouvant s’affronter sur le terrain des idées, joue soit sur le registre de la peur, soit sur le spectre de l’affrontement…ethnique. C’est le théorème qu’on avança avec ce coup de force, sans effusion de sang bien sûr. Il semblerait qu’il réponde à une prudence : éviter la guerre civile qu’aurait pu entraîner le limogeage des généraux.
Le peuple, ayant en mémoire les douloureux évènements de 1989, il est certain qu’il ne voulait absolument pas d’une telle perspective de réédition. On accepta l’argument, pour que la paix règne ». Sauf que, passée cette frayeur, il fallait d’avantage expliquer les vrais mobiles. Que non ! Les politiques ont occupé le terrain. Et on est passé aux affrontements de positionnements.
Les élections, anticipées, c’est donc pour le 6 juin. Et vu l’état des choses, il serait souhaitable que les uns et autres pensent au destin profond de la Mauritanie. En attendant, il est presque certains que deux catégories vont être perdantes : les paysans et éleveurs qui, selon toutes vraies semblances, se trouveront hors de leurs milieux, et les élèves et étudiants.
Si les premiers seront dans les grandes transhumances, pour certains, et les autres occupés à surmonter la difficile phase de soudure, les scolaires eux risquent tout simplement de voir leurs cours sacrifiés. Car dès la mi-mai, pas l’ombre d’un doute, professeurs et enseignants seront embrigadés dans des campagnes ou bureaux de campagnes.
Deux semaines après le scrutin ce sera toujours la politique. Et inutile de dire que les épreuves du baccalauréat se fichent des moments d’errance. Année blanche ? Echecs en séries ? Il serait préférable de ne pas y penser, si on sait déjà le niveau très décrié de l’école nationale.
Alors, pour sauver l’école et redonner espoir au peuple mauritanien, prenons soin de bien préparer les élections de juin. La Mauritanie n’en peut plus d’attendre. Pitié, arrêtons de la prendre en otage !
Bios Diallo
Al Mourabit N°25 du 26 janvier 2009
Mieux : « Je ferai tout pour faire échouer ce coup d’état », a-t-il martelé lors d’une interview accordée à la correspondante de Rfi à Nouakchott. Une preuve que de l’espoir il en a encore. Même s’il a du rebrousser chemin, sous la contrainte, vers son village de Lemden après que des autorités de la police aient stoppé à Ouad Naga le cortège qui devait le faire entrer en grande pompe à Nouakchott.
Sans baisser les bras, ses amis ont tenu, eux, à exprimer ce qui les tenait à cœur. Et montrer ce qui fait l’objet de toute leur colère : « L’homme qu’on a empêché d’arriver ici pour vous parler, dit le président de l’Assemblée Nationale, Messaoud Ould Boulkheir, et membre du Front National pour la Démocratie et le Développement, FNDD, est bien et le seul président qu’il vaille soutenir.
C’est lui le président élu, et c’est à lui que nous devons nous identifier. Autrement dit, nous ne reconnaîtrons jamais ni le général Mohamed Ould Abdel Aziz, ni ses sujets. Sidi doit revenir à son fauteuil ».
Côté gouvernement, c’est une autre fin de non-recevoir cinglante qui siffle dans le brouillard de la capitale happée par des jours de poussière et de froid : « Il est hors de question, nous disait la semaine dernière Mohamed El Mokhtar Ould Zamel, député d’Aoujeft, que nous acceptions qu’on nous impose le retour d’un homme décrié et dont le peuple ne veut plus à cause de sa mauvaise gestion et de ses positions partisanes sur plein de choses ».
Dans le Face à… le député était allé jusqu’à dire qu’il trouvait incompréhensible l’attitude « de certains de nos compatriotes, responsables qui bénéficiaient de beaucoup de respect, qui se lancent dans des diatribes et condamnations contre leur propre peuple. Il s’agit de certains leaders du FNDD, qui savent pertinemment que les sanctions ont toujours touché le petit peuple. […]
Et l’homme de la situation c’est le général Mohamed Ould Abdel Aziz. Parce qu’il a décidé de s’attaquer à la lutte contre la gabegie, le régionalisme, le racisme, le népotisme qui sont les vrais maux du pays ».
On le voit, les propos sont tranchés d’un bord comme de l’autre. Mais dans cette lutte, à coup de dénigrements de toutes sortes jusque chez les meilleurs amis d’hier, on a l’impression que tout se joue hors du plan avenir de la Mauritanie. Peu de lisibilité sur ce qui pourrait déterminer l’avenir des générations futures.
Le regrettable : « Notre classe politique, dit cet universitaire, ne pouvant s’affronter sur le terrain des idées, joue soit sur le registre de la peur, soit sur le spectre de l’affrontement…ethnique. C’est le théorème qu’on avança avec ce coup de force, sans effusion de sang bien sûr. Il semblerait qu’il réponde à une prudence : éviter la guerre civile qu’aurait pu entraîner le limogeage des généraux.
Le peuple, ayant en mémoire les douloureux évènements de 1989, il est certain qu’il ne voulait absolument pas d’une telle perspective de réédition. On accepta l’argument, pour que la paix règne ». Sauf que, passée cette frayeur, il fallait d’avantage expliquer les vrais mobiles. Que non ! Les politiques ont occupé le terrain. Et on est passé aux affrontements de positionnements.
Les élections, anticipées, c’est donc pour le 6 juin. Et vu l’état des choses, il serait souhaitable que les uns et autres pensent au destin profond de la Mauritanie. En attendant, il est presque certains que deux catégories vont être perdantes : les paysans et éleveurs qui, selon toutes vraies semblances, se trouveront hors de leurs milieux, et les élèves et étudiants.
Si les premiers seront dans les grandes transhumances, pour certains, et les autres occupés à surmonter la difficile phase de soudure, les scolaires eux risquent tout simplement de voir leurs cours sacrifiés. Car dès la mi-mai, pas l’ombre d’un doute, professeurs et enseignants seront embrigadés dans des campagnes ou bureaux de campagnes.
Deux semaines après le scrutin ce sera toujours la politique. Et inutile de dire que les épreuves du baccalauréat se fichent des moments d’errance. Année blanche ? Echecs en séries ? Il serait préférable de ne pas y penser, si on sait déjà le niveau très décrié de l’école nationale.
Alors, pour sauver l’école et redonner espoir au peuple mauritanien, prenons soin de bien préparer les élections de juin. La Mauritanie n’en peut plus d’attendre. Pitié, arrêtons de la prendre en otage !
Bios Diallo
Al Mourabit N°25 du 26 janvier 2009